Autisme : dès la maternelle, apprendre à communiquer et vivre avec les autres
Quand ils sont arrivés dans la seule UEM (Unité d'enseignement en école maternelle) de Paris, ouverte en septembre 2014 dans le XXe arrondissement, ces enfants avec troubles du spectre autistique (TSA) ne parlaient pas et portaient encore des couches, se souvient leur institutrice, Camille Schneider.
Aujourd'hui, ils sont propres, communiquent avec des mots, des images ou des gestes, et sont "devenus des élèves", même s'ils ont encore des troubles du comportement.
Ils sortent en récréation et déjeunent à la cantine avec les élèves des classes "ordinaires" de l'école Surmelin.
Il n'existe que 60 unités de ce type en France, créées dans le cadre du 3e plan autisme (2013-2017) et associant Education nationale et secteur médico-social. Chacune compte sept élèves de 3 à 6 ans, encadrés par des professionnels spécialisés utilisant des méthodes éducatives et comportementales recommandées par la Haute autorité de santé (HAS).
Le gouvernement a prévu d'en ouvrir 50 de plus à la rentrée de septembre. Elles préparent les enfants à intégrer une école primaire ordinaire, accompagnés d'une auxiliaire de vie scolaire (AVS), à moins qu'une autre prise en charge soit jugée mieux adaptée.
Ainsi, à l'école Surmelin, trois ont été réorientés vers un institut médico-éducatif (IME) et leurs places réattribuées.
En cette veille des vacances de printemps, quatre petits garçons de 4 à 5 ans sont présents, avec l'institutrice, deux éducatrices et une AVS, toutes à temps plein.
L'équipe comprend également, à mi-temps, une psychologue, une psychomotricienne et une orthophoniste.
Pour réduire les distractions pendant les activités individuelles, la salle de classe est organisée en espaces délimités par des cloisons.
Les enfants ont chacun un emploi du temps affiché au mur, où les activités (travailler, toilettes, récréation, cantine etc) sont représentées sur des images qu'ils enlèvent et mettent dans la case "fini" au fur et à mesure. "Cela les aide à anticiper l'activité suivante", explique Mme Schneider.
D'autres méthodes anglo-saxonnes sont utilisées: Pecs et Makaton, des systèmes de communication par échange d'images et par signes, que l'adulte "traduit" en mots pour inciter l'enfant à les prononcer, ainsi que l'ABA (analyse du comportement appliquée), un système de motivation basé sur la récompense.
"Nous utilisons une palette de possibles", explique Fabien Marmonier, inspecteur de l'Education nationale. "On colle aux besoins de chaque enfant, en accord avec ses parents pour qu'il y ait une continuité à la maison".
Les enfants emportent un petit classeur de pictogrammes à leur domicile, où se rendent régulièrement les éducatrices.
En classe, en groupe ou individuellement, ils jouent, écrivent leur nom et quelques mots, font des exercices de motricité... Autant d'activités destinées à développer leur langage et autres capacités, et à réduire leurs troubles du comportement. Ils apprennent également les codes sociaux qui leur font défaut: attendre son tour, dire bonjour ...
Par intervalles tout au long de la matinée, l'un des petits garçons manifeste son opposition en poussant des cris perçants. Casques antibruit sur les oreilles, ses camarades ont l'air de l'ignorer.
La collation est prétexte à un nouvel exercice de communication. "Je veux du yaourt" ou "de la compote", disent-ils oralement ou en montrant l'image. On leur donne cuillère par cuillère, pour les obliger à redemander.
"Nous avons des compteurs du nombre de demandes qu'ils ont formulées dans la journée. Cela nous permet de voir si ce qu'on fait a des répercussions positives. Sinon, on change", explique Mme Schneider.
Les associations de parents déplorent que ces unités ne soient pas plus nombreuses. Florent Chapel, porte-parole du Collectif autisme et coauteur de Autisme, la grande enquête (ed. Les Arènes), compare les 770 places prévues aux "8.000 enfants autistes qui naissent chaque année en France". "Une goutte d'eau dans l'océan!".
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