Risques du virus et du vaccin : intégration dans le génome humain, Covid long, biodistribution... Jean-Marc Sabatier, partie 3

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Estelle Fougères, pour FranceSoir
Publié le 28 avril 2022 - 20:37
Mis à jour le 02 mai 2022 - 15:17
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Jean-Marc Sabatier, directeur de recherches au CNRS.
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ENTRETIEN [3/3] — Que savons-nous du système rénine-angiotensine dont le dysfonctionnement engendre les maladies Covid ? Comment la protéine Spike du virus, mais également la protéine Spike vaccinale, peuvent-elles affecter les organes sexuels de l'homme et de la femme, menaçant la libido et la fertilité ? Qu'est-ce que le syndrome d'activation mastocytaire ? Les multiples rappels de la vaccination contre le SARS-CoV-2 peuvent-ils induire un syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA) ? La répétition vaccinale peut-elle conduire à des phénomènes d'auto-immunité ou les aggraver ? Quels risques représente la vaccination pour les femmes enceintes et pour les enfants ? L'ARN codant pour la protéine Spike reste-t-il au niveau du muscle deltoïde, comme cela a souvent été affirmé, ou peut-il se déplacer vers d'autres organes ? Le corps de chaque personne étant devenu la plateforme vaccinale, comment contrôler la quantité de protéine Spike produite par l'organisme, qui peut varier selon les personnes, l'âge et qui ne serait pas forcément adéquate ? Des segments d'ARN peuvent-ils être réinscrits dans l'ADN ? Que sait-on de l'intégration dans le génome ? Quelle est l'origine du Covid long ? Comment l'identifier ? Quelles sont les explications physiologiques aux phénomènes observés ?

Telles sont les questions abordées par Jean-Marc Sabatier, directeur de recherche au CNRS et docteur en biologie cellulaire et microbiologie, affilié à l'institut de neurophysiopathologie à l'université d'Aix-Marseille, avec qui nous nous sommes entretenus.

Nous précisons que Jean-Marc Sabatier s'exprime ici en son nom.

Aujourd'hui, nous publions la troisième partie de cet entretien.

Lire ou relire les première et deuxième parties de cet entretien.


Estelle Fougères - Même si les effets secondaires et l’inefficacité de la vaccination sont aujourd’hui bien connus, il paraît essentiel de revenir sur certaines affirmations, notamment pour informer et prévenir le public, dans le cas où de nouveaux vaccins seraient proposés ou imposés. Beaucoup de choses ont été dites sur la vaccination. On a notamment entendu des médecins avancer que l’injection était locale et que les cellules qui reçoivent l’ARNm codant pour la protéine Spike étaient principalement les cellules musculaires. Certains vont jusqu’à certifier qu’en aucun cas l’ARNm ne pouvait aller sur d’autres organes, et qu’il ne pouvait être transmis d’une génération à l’autre. Que pensez-vous de ces affirmations ?

Jean-Marc Sabatier - Il faut savoir que le muscle deltoïde dans lequel se fait l’injection intramusculaire du vaccin anti-Covid-19 est constitué de faisceaux de fibres musculaires (la fibre musculaire est une cellule). Les vaisseaux sanguins (artérioles et veinules) qui assurent la vascularisation du muscle, donnent naissance à un fin réseau de capillaires sanguins qui vascularise chaque fibre musculaire. Ceci implique qu’après injection dans le muscle deltoïde, les éléments constitutifs du vaccin (ARNm, nanoparticules lipidiques, et autres) sont en contact avec le réseau sanguin, et peuvent donc diffuser plus ou moins rapidement dans tout l’organisme. Ceci implique également que la protéine Spike vaccinale ultérieurement produite par les cellules musculaires pourra diffuser dans le corps humain, ce qui a été démontré expérimentalement. 

Des cellules de divers organes et tissus peuvent potentiellement « capter » de l’ARNm circulant non dégradé afin de produire de la protéine Spike vaccinale. Une « capture » par des cellules liées aux organes reproducteurs ne semble pas impossible. 

En ce qui concerne la transmission d’une génération à une autre via l’ARNm, ou une rétrotranscription (copie) de cet ARNm en ADN avec insertion de l’ADN dans le génome humain, elle apparait peu probable, mais constitue néanmoins un risque non négligeable. Je ne serais pas surpris que ce phénomène de rétrotranscription de l’ARNm puis d’intégration génomique de l’ADN correspondant existe in vivo. Il est notable qu’une étude suédoise a récemment montré qu’une telle rétrotranscription intracellulaire de l’ARNm du vaccin Pfizer-BioNTech en ADN, suivie d’une intégration de cet ADN dans le génome de cellules humaines de carcinome hépatique (lignée cellulaire Huh7), était réalisable in vitro grâce à un système de transcription inverse endogène appelé LINE-1. J’ai eu l’occasion de donner mon avis sur le sujet au Dr Alexandra Henrion-Caude qui a soulevé ce danger potentiel de longue date.

Estelle Fougères - Ces médecins affirment également que les cellules qui produisent la protéine Spike suite à l’injection, sont rapidement détruites par le système immunitaire. L’ARN étranger resterait très peu de temps dans l’organisme et produirait juste la quantité nécessaire pour aider le système immunitaire à réagir en cas d’infection « naturelle » par le SARS-CoV-2 avant d’être éliminé. À partir de ces affirmations, on peut se poser plusieurs questions. Les cellules sont-elles détruites rapidement ?

Jean-Marc Sabatier - En théorie, les cellules produisant de la protéine Spike vaccinale devraient être détruites rapidement par notre système immunitaire, car elles expriment l’antigène viral (la protéine Spike) à leur surface. Néanmoins, la protéine Spike vaccinale affecte notre réponse immunitaire innée (et par voie de conséquence, notre immunité adaptative/acquise), car elle suractive - via sa fixation potentielle sur le récepteur ECA2 - le système rénine-angiotensine (SRA) qui contrôle cette immunité innée (les cellules de l’immunité innée sont les monocytes, macrophages, cellules dendritiques, granulocytes, mastocytes et cellules NK tueuses). 

La protéine Spike vaccinale provoque ainsi un « syndrome d’activation macrophagique » (elle provoque aussi un « syndrome d’activation mastocytaire ») qui conduit à une immunodéficience (le système immunitaire ne fonctionne pas correctement), avec notamment une chute de la production d’interférons et une lymphocytopénie (déplétion/déficits des cellules NK tueuses, des lymphocytes T auxiliaires (CD4+) et cytotoxiques (CD8+), et des lymphocytes B). Ceci va freiner l’élimination des cellules produisant de la protéine Spike vaccinale. 

Par ailleurs, l’ARNm des vaccins Comirnaty (Pfizer-BioNTech) et Spikevax (Moderna) a été modifié afin d’augmenter sa durée de vie dans l’organisme. En effet, certains codons de l’ARNm ont été substitués par d’autres codons « équivalents » (codant pour le même résidu d’acide aminé) dans le but d'augmenter la proportion de bases Guanosines et Cytidines plus stables. Une queue de poly-Adénosines a été rajoutée pour ralentir la dégradation enzymatique de l’ARNm. Enfin, l’uridine a été remplacée (par la méthyl-1-pseudouridine) dans l’ARNm pour en augmenter sa stabilité et diminuer la réponse inflammatoire. Ainsi, la demi-vie plasmatique de l’ARNm des vaccins est donc très supérieure (et pas comparable) à celle d’un ARNm naturel.

Estelle Fougères - Comment est-il possible de connaître la quantité nécessaire alors que les différents vaccins ne contiennent pas la même quantité d’ARN messager ; le vaccin Pfizer est composé de 30 microgrammes d’ARNm tandis que celui de Moderna en contient 100.

Jean-Marc Sabatier - Le problème est qu’il y a beaucoup d’inconnues (probablement moins pour les sociétés qui les commercialisent) dans les caractéristiques réelles de ces vaccins, notamment sur (1) la bio-distribution de l’ARNm (après injection) et de la protéine Spike vaccinale produite, ainsi que des adjuvants (nanoparticules lipidiques ou autres), (2) la durée de vie des constituants des vaccins, et (3) les effets secondaires associés à ces constituants. 

La différence importante de contenu en ARNm des vaccins Comirnaty et Spikevax suggère que des études d’optimisation des doses d’ARNm dans ces vaccins n’ont pas été réalisées dans les normes (si elles ont été étudiées). Normalement, la dose optimale en ARNm serait celle qui induit une réponse immunitaire maximale en toute innocuité, c’est-à-dire sans effets indésirables sur l’organisme qui le reçoit. Pour les vaccins actuels, il n’y a pas véritablement de dose optimale, car il existe une toxicité certaine, associée à leur utilisation. La dose optimale serait à mon sens le flacon vide, car ils ne respectent pas les normes généralement strictes de vrais vaccins en termes d’efficacité et d’innocuité.

Estelle Fougères - Une autre question qui me paraît importante est celle qui a été soulevée par l’épidémiologiste Martin Zizi lors du Conseil scientifique indépendant du 17 mars 2022. Ce professeur de médecine rappelle que dans le cadre de ce « vaccin génique », le corps est devenu sa propre plateforme vaccinale, une sorte d’usine de production du vaccin. À partir de là, on comprend bien que le problème qui se pose est le contrôle de la quantité de protéine Spike produite par le corps, qui peut varier selon les personnes, l’âge, et qui ne serait donc pas forcément adéquate. Or, un produit pharmaceutique doit normalement avoir une posologie fixe pour être légal. Martin Zizi explique qu’il aurait fallu procéder à des biopsies musculaires, afin d’établir des échelles de calibration au minimum par tranche d’âge, ce qui n’a pas été fait. Que pensez-vous de cette proposition ? Voyez-vous un autre moyen de procéder ?

Jean-Marc Sabatier - Personnellement, je pense que le Dr Martin Zizi a raison. La quantité injectée devrait être adaptée à des tranches de poids. Ceci est néanmoins partiellement fait, car les enfants reçoivent des doses vaccinales plus faibles (pour les enfants de 5 à moins de 12 ans, la formulation pédiatrique du vaccin Comirnaty est de 10 microgrammes d’ARNm par injection, tandis qu’elle est de 3 microgrammes pour les enfants âgés de moins de 5 ans).
La production de la protéine Spike vaccinale doit varier d’une personne à une autre, car il existe des variabilités inter-individuelles (dont l’âge, l’état de santé, le sexe, etc.) qui devraient effectivement affecter la production de la protéine Spike. Il aurait fallu procéder à des analyses poussées de bio-distribution de l’ARNm, mais également de la protéine Spike produite, au niveau des divers organes et tissus. La biopsie est une méthode qui pourrait être utilisée, mais il y en a d’autres.

Estelle Fougères - Parmi les nombreux effets secondaires observés, il semble que ce soit chez les personnes les plus jeunes qu’ils se manifestent le plus fréquemment. Par exemple, on ne rencontre pas de myocardites chez les personnes âgées. Pouvez-vous nous expliquer les différences de réactions en fonction de l’âge, du système immunitaire ?

Jean-Marc Sabatier - Il faut savoir que les performances du système immunitaire d’une personne varient en fonction de l’âge, de facteurs génétiques et environnementaux, ainsi que de l’alimentation. Les enfants ont un système immunitaire qui est très réactif et une immunité innée (réponse immunitaire immédiate) très puissante. Pour ces derniers, une dose relative supérieure du vaccin pourrait être néfaste, et conduire à davantage d’effets secondaires, sans nécessairement conduire à une meilleure réponse immunitaire contre le virus.

Par exemple, il apparaît que le vaccin Spikevax (environ trois fois plus dosé en ARNm que le vaccin Comirnaty) est associé à une incidence plus grande de myocardites (et péricardites) chez les jeunes hommes de 14 à 29 ans. Cette pathologie apparait généralement dans les 3 à 14 jours, et principalement après l’injection de la seconde dose de vaccin. Elle nécessite un traitement de soutien avec des médicaments anti-inflammatoires. La myocardite se manifeste par des palpitations ou arythmies cardiaques, des essoufflements et/ou des douleurs thoraciques transitoires et brutales.

Selon moi, la myocardite est une inflammation du muscle cardiaque liée à la suractivation du SRA des cellules myocardiques par la protéine Spike vaccinale produite. Le récepteur AT1R (du SRA), qui est pro-inflammatoire, en est directement responsable. Le SRA est différent entre les enfants, adolescents, adultes et personnes âgées, car il varie fortement pour un même individu de la naissance à la mort. Ces différences additionnelles peuvent expliquer la sensibilité accrue des jeunes vaccinés à la myocardite. Les personnes âgées, pour lesquelles on ne rencontre pas de myocardites, ont un système immunitaire affaibli et donc moins réactif que les personnes jeunes.

Estelle Fougères - Le problème de la rétrotranscription ou transcription inverse a été mentionné à plusieurs reprises. Sans affirmer qu’elle était certaine, la généticienne Alexandra Henrion-Caude ou le biologiste en génétique moléculaire Christian Vélot ont avancé qu’elle était possible. Pouvez-vous revenir sur ce mécanisme, pensez-vous que des segments d’ARN peuvent être réinscrits dans l’ADN ? Que disent les dernières études ?

Jean-Marc Sabatier - Comme mentionné précédemment, une rétrotranscription (copie) de l’ARNm des vaccins (Comirnaty et Spikevax) en ADN, avec une insertion de l’ADN néoformé dans celui du génome humain (au sein du noyau cellulaire), constitue un risque très faible, mais à ne pas négliger dans la stratégie de vaccination de masse. L’étude suédoise déjà citée suggère que c’est possible en utilisant des cellules in vitro (en éprouvette), ce qui n’implique pas que c’est le cas in vivo (dans l’organisme humain). Il y a d’autres études expérimentales convergentes qui ont également montré que des fragments de l’ARN total du virus SARS-CoV-2 pouvaient être intégrés in vitro dans des lignées cellulaires.

Personnellement, je n’exclus pas la possibilité d’une intégration génomique pour le SARS-CoV-2, du fait de (1) la persistance d’effets secondaires longtemps après une infection dans les cas de Covid long qui suggère la présence résiduelle du virus qui pourrait provenir soit d’une élimination partielle, soit d’une possible intégration génomique (dans les cas de Covid long observés suite à une vaccination, cela pourrait reposer sur une intégration génomique de l’ARNm vaccinal), (2) du parallèle avec le coronavirus de la péritonite infectieuse féline (PIF) qui peut s’exprimer de nouveau de multiples années après une infection chez le chat, et dont la cible est le SRA félin avec des maladies associées ressemblant fortement à la Covid-19 des humains. Je dois rappeler qu’il s’agit ici de pistes relativement improbables, même si elles ne sont pas formellement impossibles.

Estelle Fougères - Si cette rétrotranscription était possible, quelles pourraient être les conséquences ? Que sait-on de l’intégration dans le génome, du virus ou du vaccin ?

Jean-Marc Sabatier - Vous parlez d’un scénario catastrophe ! En fait, il pourrait ne rien se passer, avec une intégration génomique « silencieuse ». Des réactivations du provirus intégré seraient envisageables, avec des effets « délétères » transitoires sur l’organisme. Dans le cas d’une éventuelle intégration génomique de l’ARNm codant pour la protéine Spike vaccinale, ce serait globalement la même chose (phase « silencieuse » ou effets « délétères » transitoires). Il faut savoir que même dans un tel scénario catastrophe d’intégration génomique, il faudrait que de nombreuses conditions soient remplies pour que le provirus intégré du SARS-CoV-2, ou que la partie codante de la protéine Spike vaccinale, soit exprimé(e)/transcrit(e). Les risques restent donc, dans tous les cas, très limités. Il faut néanmoins ne pas jouer à la « roulette russe » avec la nature, et suivre le principe de précaution qui devrait s’appliquer aux vaccins actuels pour lesquels le recul est quasi inexistant, à savoir éviter la vaccination à outrance des populations.

Estelle Fougères - Dès le début de la pandémie, des personnes diagnostiquées avec le Covid ont fait savoir publiquement que leurs symptômes persistaient parfois très longtemps après l’infection. C'est ce qu'on appelle communément le "Covid long" ou le syndrome post-Covid-19. Jusqu’à une date très récente, de très nombreux praticiens doutaient de la réalité de cette pathologie. À leur décharge, l’origine des maux dont souffrent les malades n’est pas aisée à établir et la plupart des symptômes dont ils souffrent ont encore des origines mystérieuses pour de nombreux médecins. Quels peuvent être les symptômes d’un Covid long ?

Jean-Marc Sabatier - Il existe de multiples symptômes pour les personnes souffrant d’un Covid long. Les diverses études en recensent plus d’une centaine. On estime que 20 à 30% des personnes infectées par la Covid-19 présenteraient une ou plusieurs des pathologies initiales de la maladie, au-delà de cinq semaines (environ 10% seront toujours affectés par des troubles associés six mois après l’infection virale).

Les principaux symptômes - correspondant aux plus fréquemment rapportés- sont la fatigue chronique, les troubles neurophysiologiques (vertige, perte de mémoire, désorganisation spatiale, troubles de l’humeur et du comportement, céphalées), de la perte de l’odorat (anosmie) ou du goût (agueusie). Il y a aussi les douleurs (articulaires, tendineuses, musculaires), l’insomnie, les troubles auditifs (acouphènes), oculaires et menstruels, les nausées, l’anxiété, l’irritabilité et l’odynophagie (douleur lors de la déglutition due ici à une inflammation de l’œsophage). Il faut également mentionner la toux, les palpitations et les troubles cardiothoraciques (tachycardie ou dyspnée, c’est-à-dire une sensation de gêne respiratoire). Ces symptômes du Covid long peuvent être transitoires et présenter un caractère cyclique (apparition, disparition, puis réapparition).

Estelle Fougères - Certains patients se plaignent de symptômes qui partent pendant quelque temps, mais reviennent par la suite. Quelles pourraient être les explications à cette pathologie ? Y a-t-il un virus latent qui peut rester sous forme asymptomatique et qui peut être à l'origine de crises symptomatiques ?

Jean-Marc Sabatier - Plusieurs pistes ont été décrites sur l’origine du Covid long. L’une d’elles est la présence du virus SARS-CoV-2 latent dans l’organisme, qui n’aurait pas été complètement éliminé (infection virale chronique avec des réactivations plus ou moins transitoires), avec ses effets délétères sur l’organisme. Une autre piste est l’hyper-inflammation induite par le SARS-CoV-2, qui entraînerait la réactivation de microbes endogènes (exemple : le virus d’Epstein-Barr, de la famille des herpès, présent dans 95% de la population mondiale adulte), conduisant à des effets délétères sur l’organisme.

Le Covid long pourrait être associé à la présence d’anticorps auto-immuns dirigés contre une ou plusieurs protéines de l’hôte (tels que le facteur VIII de la coagulation, la protéine PF4 des plaquettes sanguines et autres). Ces anticorps auto-immuns peuvent perturber les voies métaboliques et les processus physiologiques impliqués dans le fonctionnement d’organes et de tissus. Ces anticorps seraient ainsi responsables d’effets délétères résultants de ces perturbations ou dysfonctionnements. Les autres pistes physiopathologiques du Covid long seraient des lésions organiques initiales, dont les symptômes persistants sont des conséquences (dysfonctionnement épithélial, fibrose pulmonaire, microglie cérébrale, etc.), ainsi que des réactions immunitaires et inflammatoires anormales persistantes qui se compliquent (microcirculation, coagulation, fibrose, neuro-inflammation, auto-immunité…). À mon sens, un Covid long pourrait tout à fait résulter d’une combinaison de ces possibilités entrainant des symptômes et troubles multiples plus ou moins forts et potentiellement variables dans le temps.

Pour moi, la cause première serait néanmoins la rémanence du SARS-CoV-2, imparfaitement éliminé, au sein de l’organisme. La présence résiduelle du virus serait effective au niveau de certains organes (dans les cellules humaines, une intégration de l’acide nucléique du virus dans le génome n’apparait pas impossible via une rétrotranscription) et/ou bactériennes (pour rappel, une infection potentielle de bactéries par le SARS-CoV-2 a été décrite dans les intestins).

Cette persistance du SARS-CoV-2 réactiverait - de façon transitoire ou chronique - les symptômes et les maladies Covid-19. Les perturbations du SRA au niveau du système nerveux central expliqueraient, quant à elles, les troubles neurologiques et cognitifs importants qui sont rapportés. Le SARS-CoV-2 est en effet capable d’infecter les cellules cérébrales (neurones, astrocytes, cellules microgliales, et probablement oligodendrocytes) en se fixant sur le récepteur ECA2 de ces cellules. Les voies d’entrée (théoriquement) possibles du SARS-CoV-2 dans le système nerveux central sont (i) la barrière hémato-encéphalique, (ii) le liquide céphalo-rachidien, (iii) la diffusion virale trans-synaptique, et (iv) via les organes circumventriculaires.

Lors de l’infection au SARS-CoV-2, après avoir pénétré dans la sphère ORL, le virus peut attaquer le bulbe olfactif situé sur le plancher de la boîte crânienne, en passant par l’épithélium olfactif qui se situe à proximité (sous le bulbe olfactif), au niveau de la cavité nasale supérieure. D’où l’explication du phénomène d’anosmie (perte de l’odorat), mais également d’agueusie (perte du goût), puisque ce même bulbe olfactif gère également les informations concernant le goût.

Estelle Fougères - S’il reste une présence résiduelle du virus, existe-t-il une possibilité de l’éliminer par médication ?

Jean-Marc Sabatier - Pour répondre de manière satisfaisante à cette question, il faudrait d’abord savoir quelle est la stratégie utilisée par le SARS-CoV-2 pour persister dans l’organisme (s’il y persiste), notamment s’il est latent sous forme de virus stocké dans des cellules réservoirs spécifiques (y compris des cellules bactériennes), ou s’il s’intègre - à l’état de provirus - dans l’ADN du génome des cellules cibles (via une rétrotranscription d’ARN viral copié en ADN, comme le fait le virus de l’immunodéficience humaine).

À partir de cette connaissance, une médication plus ou moins efficace pourrait être envisagée. Par exemple, cela pourrait être un traitement antibiotique suivi d’un traitement antiviral si le SARS-CoV-2 est « caché » dans des bactéries qu’il a infectées, ou un traitement antiviral de type analogue de nucléoside (ou autre) si le SARS-CoV-2 est intégré à l’état de provirus dans le génome des cellules cibles, etc.

Estelle Fougères - L’existence d’un covid long n’est pas aisée à établir, même pas imagerie. En effet, si l’ensemble des plaintes fonctionnelles des patients orientent vers une implication cérébrale, les examens radiologiques effectués par IRM ou scanner ne montrent aucune lésion morphologique séquellaire. Afin de comprendre les manifestations persistantes de certains malades longtemps après avoir contracté le SARS-CoV-2, le professeur Éric Guedj et son équipe du service de médecine nucléaire de la Timone ont procédé à des examens radiologiques par TEP Scanner.

« C’est un examen qui a tout son intérêt lorsqu’il existe une discordance entre la présence de troubles persistants et une normalité morphologique à l’imagerie. Ce que l’on mesure avec la tomographie par émission de positons, c’est la consommation de glucose au niveau cérébral qui est un excellent marqueur du fonctionnement global » explique le professeur Guedj. Pouvez-vous expliquer pourquoi le TEP Scan est l’examen radiologique approprié pour détecter les problèmes au niveau du cerveau ?

Jean-Marc Sabatier - Le TEP Scan correspond à la tomographie par émission de positons. Cette technique d’imagerie médicale permet de mesurer en trois dimensions l’activité (métabolique ou moléculaire) d’un organe - ici le cerveau - grâce aux émissions des positons issus d’un produit radioactif injecté au préalable (glucose radioactif comme traceur). Il s’agit donc d’une technique d’imagerie fonctionnelle permettant, en recherche biomédicale, de suivre et de visualiser le métabolisme des cellules de notre cerveau, et de détecter d’éventuelles anomalies physiologiques ou pathologies.

Estelle Fougères - Quelles pourraient être les explications physiologiques à ces phénomènes observés ?

Jean-Marc Sabatier - À ce jour, il existe peu de données sur le Covid long. Il a été décrit une hypoactivité du cerveau décelée par imagerie cérébrale chez les personnes souffrant de Covid long. Il a été aussi observé l’implication de canaux calcium sensibles à la ryanodine (RYR). Les canaux ioniques RYR se trouvent dans les muscles striés squelettiques (RYR1), le myocarde (RYR2) et le cerveau (RYR3).

Selon moi, le Covid long est une persistance de symptômes ou maladies de la Covid-19 qui aurait pour principale origine le dysfonctionnement (induit par le virus SARS-CoV-2) du système rénine-angiotensine (SRA).
Comme mentionné précédemment, le SRA joue un rôle clé dans le fonctionnement de l’organisme humain et des mammifères en général. Il est impliqué dans les fonctions rénales, pulmonaires, cardiovasculaires et pilote l’immunité innée et le microbiote intestinal, buccal et vaginal. Il se trouve dans les nombreux tissus et organes dont le cœur, les poumons, le foie, le pancréas, la rate, les reins, les intestins, les organes reproducteurs, les glandes surrénales, le système vasculaire, la peau, les yeux et le cerveau… Le dysfonctionnement du SRA est à l’origine des maladies Covid-19.

Il y a un tropisme cérébral du SARS-CoV-2 et les atteintes neurologiques observées sont dues, selon moi, à une action du virus sur le SRA du système nerveux central. En effet, le SARS-CoV-2 peut infecter les cellules nerveuses (neurones, astrocytes, cellules microgliales et probablement les oligodendrocytes, qui expriment le récepteur ECA2) et s’y multiplier sans détruire les cellules.

L’imagerie cérébrale réalisée chez les patients atteints de Covid Long met en évidence une atteinte du cerveau (induite par le SARS-CoV-2). En effet, certaines zones du cerveau sont particulièrement affectées tandis que d’autres semblent épargnées. Les zones du cerveau affectées révèlent une hypoactivité cérébrale se traduisant par une baisse de la consommation de glucose. Ces observations peuvent être corrélées au SRA-b du système nerveux central. Quant aux pertes de substance grise périphérique des deux hémisphères cérébraux (cortex cérébral constitué des corps de neurones), elles correspondent à la destruction des cellules nerveuses induite par l’infection virale et le dysfonctionnement du SRA-b.

En effet, la protéine Spike du SARS-CoV-2 se fixe sur le récepteur ECA2 des cellules nerveuses et gêne la dégradation de l’angiotensine-2. Il en résulte un excès d’angiotensine-2 qui suractive le récepteur AT1R du SRA-b. Il existe deux sous-types de récepteur AT1R : AT1A et AT1B. Le récepteur AT1A est principalement exprimé dans les régions du cerveau contribuant à la régulation de la pression artérielle et de l'équilibre électrolytique. Le récepteur AT1B est présent dans les structures impliquées dans la mémoire et les fonctions cérébrales supérieures, telles que le cortex cérébral et l'hippocampe. AT2R se retrouve dans les régions cérébrales impliquées dans l'apprentissage et la mémoire, dont l’hippocampe. Les récepteurs AT1R et AT2R ont été mis en évidence dans les neurones, les oligodendrocytes, les astrocytes, et les cellules microgliales de ces régions du cerveau.

Le dysfonctionnement du SRA-b provoque de multiples effets délétères, dont la vasoconstriction (diminution du diamètre des vaisseaux sanguins réduisant ainsi la microcirculation cérébrale), l’inflammation, et le stress oxydant. La barrière hémato-encéphalique contrôle (entre autres) l’apport des nutriments au cerveau, et cette irrigation cérébrale réduite pourrait avoir des effets délétères sur le fonctionnement cérébral (qui se mettrait en mode de protection ou de veille). Il est aussi vraisemblable que les phénomènes pro-inflammatoires (les cellules microgliales qui jouent le rôle des macrophages du système immunitaire dans le cerveau peuvent produire des cytokines pro-inflammatoires lorsqu’elles sont dans leur état activé M1), de stress oxydant et/ou d’intolérance au glucose induits par la suractivation d’AT1R répondent de l’hypoactivité cérébrale observée.
Les différences observées dans l’atteinte de zones cérébrales spécifiques peuvent être expliquées par le fait que le SRA-b s’exprime très différemment en fonction des zones du cerveau concernées.

Dans les zones cérébrales « non-atteintes », le récepteur AT1R (cible privilégiée de l’angiotensine-2) apparaît indétectable (par les techniques expérimentales utilisées) ou fortement sous-représenté par rapport à AT2R (autre cible potentielle de l’angiotensine-2, mais de faible affinité). Ainsi, en absence ou sous-représentation de AT1R, l’angiotensine 2 (hormone et neuropeptide) se fixera majoritairement sur le récepteur AT2R dont les effets protecteurs et réparateurs (vasodilatation, régénération axonale, croissance des neurites) sont opposés à ceux d’AT1R. Ainsi, le récepteur AT2R favorise la survie neuronale et protège des lésions cérébrales. De plus, il a été démontré que le récepteur AT1R peut-être sur-exprimé en cas d’activation cellulaire. Le récepteur AT1R peut aussi fonctionner en hétérodimère, c’est-à-dire qu’il peut s’associer avec un récepteur AT2R ou MasR ou autre (par exemple, AT4R ou MrgD). Le récepteur dimérique hybride (AT1R/AT2R ou AT1R/MasR) ainsi formé présente des propriétés fonctionnelles différentes. Il est notable qu’au niveau du SRA-b du cerveau, il existe aussi la pro-rénine qui se fixe sur le récepteur de la pro-rénine des cellules nerveuses entraînant des effets délétères comparables à ceux induits par le récepteur AT1R.

En fait, bien que les propriétés de ce récepteur soient encore mal définies, il apparait que l’activation du récepteur de la pro-rénine conduit aussi à une suractivation du SRA-b (le récepteur de la pro-rénine se retrouve également au niveau des reins, du cœur, du foie, du pancréas, du placenta, et probablement d’autres organes).

De façon inattendue, il existe aussi dans le système nerveux central un SRA-b intracrine additionnel (et « autonome » par rapport au SRA systémique endocrine qui pilote les divers organes et tissus de l’organisme par son action endocrine, autocrine et paracrine) situé à l’intérieur des cellules nerveuses, et localisé sur les membranes du noyau cellulaire, du réticulum endoplasmique, des vésicules de sécrétion, et des mitochondries (centrales énergétiques de la cellule). Le SRA-b pilote aussi le relargage de neurotransmetteurs (acétylcholine, dopamine, vasopressine, et autres) et la production de NO agissant directement sur l’activité cérébrale (actions sur l’inflammation, l’immunité et les phénomènes mnésiques).

Pour contrer les effets délétères induits par le virus (y compris dans le cerveau), la vitamine D est une molécule à privilégier, tant en prophylaxie d’une infection au SARS-CoV-2 qu’en thérapie de la Covid-19 (dont le Covid Long).

La vitamine D est capable d’agir (directement ou indirectement) sur la pro-rénine et l’activation du récepteur de la pro-rénine, car elle inhibe la production de rénine, d’où son action régulatrice bénéfique sur le SRA (c’est un régulateur négatif du SRA). Ainsi, la vitamine D - notamment D3 ou cholécalciférol - peut, en parallèle d’une inhibition de la suractivation du SRA systémique, contrecarrer activement les atteintes cérébrales des personnes infectées par le SARS-CoV-2 et souffrant de troubles neurologiques associés à un SRA-b dysfonctionnel. Pour rappel, il est aussi possible d’utiliser le calcidiol (Dédrogyl) pour une action très rapide de la vitamine D.

Les régions du cerveau dont les cellules sont riches en récepteurs à la vitamine D (calcitriol) sont le cortex cérébral et l’hippocampe. Le cortex cérébral correspond à la substance grise périphérique qui recouvre nos deux hémisphères cérébraux. Le cortex cérébral est le siège de l’intelligence, du mouvement volontaire, de la conscience, de la sensibilité… Il joue un rôle clé dans la motricité, la sensibilité, la sensorialité (capacité à percevoir des sensations pour un être vivant) ou sensoricité (ensemble de l’organisation sensorielle du corps humain).

Le cortex a un rôle indispensable dans le langage et la mémoire. L’hippocampe est une structure du cerveau (appartenant au lobe temporal du cortex cérébral) qui joue un rôle fondamental dans l’apprentissage et la mémoire. Il est endommagé dans la maladie d’Alzheimer.

Estelle Fougères - Certaines zones du cerveau semblent atteintes plus que d’autres. Quelles sont-elles ? Et quelles pourraient être les explications ?

Jean-Marc Sabatier - Il existe des adaptations (ou variantes) locales du SRA dans le corps humain. Le SRA du système nerveux central apparaît particulièrement différent des autres SRA locaux de l’organisme, bien que l’on y retrouve les mêmes acteurs (c’est-à-dire les mêmes molécules ou ligands et récepteurs).

Le récepteur AT2R est très présent dans le cerveau. Il est impliqué dans la réparation des dommages au cerveau (régénération axonale, croissance des neurites, …) et la diminution de l’inflammation, ainsi que la vasodilatation. Autrement dit, le récepteur AT2R a un effet neuroprotecteur. Il favorise la survie neuronale et protège des lésions cérébrales. Le récepteur AT2R s’oppose aux effets délétères du récepteur AT1R responsable des maladies Covid-19 (lorsqu’il est suractivé en présence du virus SARS-CoV-2).

L’angiotensine-2 qui appartient au SRA, est la clé des maladies Covid-19. C’est à la fois une hormone et un neuromodulateur (neuropeptide) capable d’agir sur AT1R et AT2R. Elle cible en priorité AT1R mais, en son absence, elle cible AT2R pour lequel elle a moins d’affinité. Il est notable que certaines zones du cerveau sont très riches en récepteur AT1R, d’autres en récepteur AT2R, ou à la fois en récepteurs AT1R et AT2R mais en proportions variables.

J’ajoute que chez les patients Covid long, l’infection provoque des troubles qui ressemblent parfois à ceux observés pour la maladie d’Alzheimer. Il est notable que le SRA est impliqué dans les maladies neuro-dégénératives comme Alzheimer, Parkinson, Schizophrénie et les troubles de l’humeur. Chez les patients Covid long, le virus ne parait pas totalement éliminé ; il se réactive et ses effets délétères persistent dans le temps.

Estelle Fougères - Pour conclure, avez-vous quelque chose à rajouter ?

Jean-Marc Sabatier - Pour conclure, je rappellerai que toutes ces maladies de la Covid-19 relèvent du dysfonctionnement du système hormonal ubiquitaire SRA qui affecte quasiment tous les organes et tissus de notre organisme. À ce jour, je sais que de nombreux chercheurs (dont les virologues) et médecins sont dubitatifs, car ils pensent qu’il n’est pas possible qu’un seul récepteur cellulaire - ici AT1R - puisse être à l’origine d’autant d’effets délétères et de pathologies variées. En réalité, le SRA dysfonctionnel et son récepteur AT1R sont liés à de très nombreuses voies de signalisation cellulaire (dont les voies P38/MAPK, JAK/STAT, NF-(kappa)B) pouvant affecter les divers organes et tissus de l’organisme. 

J’incite ainsi ces personnes à étudier ce système responsable de l’ensemble des pathologies observées. Ceci me semble essentiel dans la lutte contre la pandémie, car il existe des articles récemment publiés par des scientifiques de renom qui produisent - par leurs travaux expérimentaux - des pièces du « puzzle » SARS-CoV-2/Covid-19, qui démontrent que le SRA est au centre des maladies de la Covid-19 (via le récepteur délétère AT1R). Ces scientifiques en tirent néanmoins des conclusions erronées par un assemblage incorrect des pièces de ce « puzzle », du fait d’une méconnaissance des effets induits par le dérèglement du SRA, et oriente potentiellement des chercheurs vers des voies de recherche infructueuses.

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