Drones : les appareils civils de plus en plus performants

Auteur(s)
Philippe Cohen-Grillet
Publié le 13 septembre 2013 - 19:52
Mis à jour le 05 novembre 2014 - 18:13
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Un drone quadricoptère de la marque "Phantom".
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©DR/DJI
Le quadricoptère «Phantom» de la firme américaine DJI.
©DR/DJI
Jusque-là réservés aux usages militaires, les drones ont investi la sphère civile. Ultra-performants, ces appareils sont désormais utilisés par l'industrie, l'agriculture ou les forces de police. Mais surtout, la technologie s'est démocratisée et tout un chacun peut s'offrir un drone pour quelques centaines d'euros.

Pour un peu, on se risquerait à citer Bourvil, alias Augustin Bouvet, dans La grande vadrouille: "La guerre a du bon voyez-vous!". Comme souvent, les avancées technologiques militaires engendrent des innovations dans le domaine civil (que l'on songe à l'ancêtre d'Internet, par exemple). La plus récente et spectaculaire de ces déclinaisons est l'apparition de drones à usages civil ou domestique.

Sécurité civile, police et agriculture

Certes, piloter à distance un petit avion ou un hélicoptère miniature relève de la banalité depuis belle lurette, un détour par le Salon du modélisme suffit pour s'en convaincre. Mais la maîtrise des mini-drones, de plus en plus précise, et surtout l'adaptation de capteurs vidéo de haute résolution ont définitivement extirpé ces engins de la catégorie des joujoux pour adultes.

Désormais, de nombreux secteurs bruissent du bourdonnement de drones, qu'il s'agisse de la sécurité civile ou de l'agriculture. Les applications foisonnent: prévention des feux de forêt, évaluation du trafic routier, vérification de l'état de ponts ou de viaducs, observation des cultures et des troupeaux. 

Mobiles, plus maniables et nettement moins coûteux qu'un hélicoptère traditionnel, les drones peuvent également survoler et offrir des images d'endroits dangereux ou inaccessibles pour l'homme. Au Japon, des appareils sont utilisés pour la surveillance de volcans toujours actifs et des centrales nucléaires. 

Une firme française, Parrot, s'impose progressivement comme l'un des leaders sur le marché des drones civils. L'entreprise a présenté son dernier bébé lors du Salon aéronautique du Bourget en juin dernier. Baptisé eBee, ce drone d'une envergure de moins d'un mètre dispose d'une autonomie de trois quarts d'heure et d'un programme permettant de traiter des images aériennes et de produire des cartographies géolocalisées en 3D (voir la vidéo de la démonstration en cliquant ici). 

Ce concentré de technologie a permis de cartographier l’étendue des destructions après le passage de l'ouragan Sandy en Haïti. Autres applications plus écolos, eBee a été utilisé pour le comptage des tortues en Indonésie ou pour visualiser l’extension des plantations et déterminer le pourcentage de forêt restant au Ghana.

Une autre entreprise tricolore, Delair-Tech, fondée par des ingénieurs pétroliers, s'est, elle, spécialisée dans la conception de drones civils à longue portée. Elle a déjà raflé un contrat pour la surveillance de gazoducs de GDF-Suez et décroché plusieurs distinctions dont la médaille du Redressement productif .

L'œil de la police

En Floride, des drones de la société Condor Aerial ont survolé cet été les îles de Keys pour repérer dans cette zone de 360 km2 les poches d'eau où se reproduisent les moustiques qui ont la fâcheuse tendance à importuner les touristes. A charge pour les gardes forestiers de détruire les nids des insectes. Coût d'un appareil, 50.000 euros! Mais la manne touristique vaut bien la dépense. 

Cet usage un peu plus offensif des drones est la spécialité de Condor Aerial. La société met en avant son partenariat avec l'Association nationale des shérifs. Sur son site, elle vante cette collaboration policière à grand renfort de vidéos infrarouges montrant la traque de suspects. 

Outre-Atlantique, le recours aux drones par les forces de l'ordre est devenu courant. Un site internet rend compte de ces opérations. Et en la matière, l'Afrique du Sud a ouvert la voie, d'abord en utilisant des drones Seeker pour surveiller le déroulement de la première élection démocratique en 1994, puis en l'étendant à la lutte contre la criminalité urbaine.

Mais quid des règles d'utilisation des drones par la police, du respect de la vie privée des citoyens et des risques de dérives? En France, où le recours parfois abusif à la vidéosurveillance fait déjà polémique, le ministère de l'Intérieur ne dispose pas (encore) d'une flottille de drones.

Un de ces appareils a pourtant survolé le territoire à des fins sécuritaires. Non des moindres puisqu'il s'agissait d'un drone militaire Harfang de l'armée de l'air. Celui-ci a été testé lors de la venue du pape Benoît XVI à Lourdes en septembre 2008. 

A chacun son drone

A l'époque, les militaires s'extasiaient devant les performances de l'engin transmettant des images d'une grande précision en temps réel via satellite. Il s'agissait, surtout, d'opérer un essai grandeur nature dans le ciel français. Cinq mois plus tard, les Harfang étaient déployés en Afghanistan et le sont actuellement au Mali. La France va d'ailleurs combler son retard dans le domaine des drones militaires.

Les nouvelles générations de drones civils présentent une agilité jamais atteinte. Le chercheur Raffaello D'Andrea, de l'Institut de technologie de Zurich, a ainsi réalisé une démonstration stupéfiante lors des dernières rencontres scientifiques TED (à voir en cliquant ici). Les ballets de ses quadricoptères sont étonnants: ces machines sont capables de réaliser des chorégraphies, de s'échanger une balle, de jouer au ping-pong. Mieux encore, grâce à des algorithmes, elles «apprennent» à se développer et à résoudre des problèmes physiques et à prendre des décisions collectives. Mais ces engins, truffés de technologie hi-tech, restent coûteux.

D'autres, en revanche, sont accessibles au grand public. Parrot propose des drones entre 300 et 600 euros dont les heureux propriétaires rivalisent d'imagination acrobatique et diffusent en ligne les vidéos filmées par leur drones. Même chose et tarifs similaires pour les machines de la firme américaine DJI qui offrent de splendides images de la ville de Dallas ou de chaînes de montagnes chinoises. 

Une réglementation complexe

La plupart de ces drones peuvent être dirigés à partir d'un smartphone ou d'une tablette et sont à même de revenir seuls à leur point de départ. Les plus férus de technologie peuvent se ruer sur les caméras de l'américain GoPro ouconstruire eux-mêmes leur propre drone. Avis aux bricoleurs et aux ingénieurs en herbe car on se situe tout de même à mille lieues du bon vieux Meccano…

Les films de vacances vont donc changer de dimension. Mais attention, toutefois, à respecter une réglementation un tantinet complexe. La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a en effet édicté des règles précises et contraignantes pour l'usage des drones. Selon qu'ils survolent une zone habitée ou non, l'altitude et le rayon d'action de l'appareil sont strictement encadrés. Et pas question, bien sûr, d'utiliser un drone pour reluquer la voisine (ou le voisin) faisant bronzette en petite tenue derrière ses thuyas. D'ailleurs, qui pourrait avoir une telle idée?...

Certains esprits qui voient le mal partout ou aiment à se faire peur ont imaginé l'usage qui pourrait être fait de ces drones entre les mains de criminels ou de terroristes. L'hypothèse a bien évidemment été envisagée par les services de police et de renseignement. Il semblerait, en l'état actuel, difficile sinon impossible d'adapter une arme sur un petit hélicoptère grand public piloté à distance et de déclencher le feu. 

Un jeune Russe, adepte des jeux vidéos, a tenté l'expérience. Sur YouTube circule une vidéo de ses «exploits» déjà visionnée près de 20 millions de fois. On y voit un quadricoptère armé d'un fusil mitrailleur défourailler à tout va sur un groupe de mannequins puis se diriger vers une salle de réunion reconstituée qu'il réduit en miettes, ses occupants en plastique y compris. 

Bref, une arme, quelques centaines d'euros: le carnage à portée de tous. Mais cette vidéo a été analysée par des experts et des services policiers. Conclusion: il s'agit d'une mise en scène -certes réussie- mais totalement fausse et réalisée grâce à des effets spéciaux et un habile montage. Reste donc, comme champ d'entraînement illégal, le jardin de la voisine…

 

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