La Cour des comptes met en garde contre le gaspillage d'argent public
Maintenance des centrales nucléaires, contrats de génération ou lutte contre la fraude dans les transports: la Cour des comptes a décerné mercredi 10 février ses traditionnels avertissements sur la gestion des deniers publics, formulant des "pistes de réforme" pour améliorer "l'efficience" de l'Etat. "Il ne s'agit pas d'une collection d'anecdotes ni d'un florilège d'observations circonstancielles", a assuré le premier président de la Cour Didier Migaud, en dévoilant devant la presse le rapport annuel de la haute juridiction.
Ce travail "est guidé et structuré par une préoccupation centrale: formuler des pistes de réforme, contribuer à la modernisation des services publics, en expliquant ce qui fonctionne bien et ce qui pourrait progresser", a-t-il poursuivi. Ce volumineux rapport, concentré sur une trentaine de thèmes, donne une fois de plus du grain à moudre à l'Etat et aux collectivités locales, appelés à faire preuve d'une "plus grande sélectivité" et "d'une plus grande efficacité" dans leur action.
Les magistrats s'attardent notamment sur le contrat de génération, l'un des principaux instruments de la politique de l'emploi du quinquennat de François Hollande, considéré comme un "échec". Ce dispositif, qui donne droit à une aide annuelle pour l'embauche en CDI (contrat à durée indéterminée) d'un jeune et le maintien d'un sénior, n'a pas trouvé son public et n'a eu qu'un effet marginal sur le chômage, explique la Cour, qui juge le système "hybride" et "peu lisible".
Au chapitre environnemental, les Sages de la rue Cambon s'inquiètent de l'impact de la loi de transition énergétique, qui pourrait conduire EDF à fermer jusqu'à un tiers de ses réacteurs français, ou encore des failles dans le recyclage des déchets. Les magistrats s'interrogent aussi sur la stratégie de La Poste face à la baisse constante du courrier: il faut des "adaptations profondes" pour réduire le coût de la distribution, estiment les Sages, qui s'inquiètent d'un fort taux d'absentéisme chez les facteurs.
La Cour égratigne enfin la politique de lutte contre la fraude dans les transports en Ile-de-France, dont le coût est estimé à 366 millions d'euros par an, faute d'action de l'Etat. Elle préconise par ailleurs une hausse des tarifs. "Le prix du ticket de métro à Paris est plus bas que dans beaucoup de capitales en Europe ou dans le monde", alors que "les besoins sont considérables en matière d'infrastructures ferroviaires", a déclaré Didier Migaud lors de sa conférence de presse. Dans ce contexte, "la participation de l'usager (...) aura vraisemblablement vocation à augmenter", a-t-il ajouté.
Côté finances publiques, la Cour des comptes se montre en revanche assez mesurée. La prévision du gouvernement, qui s'est engagé à ramener le déficit à 3,3% du PIB cette année, est ainsi jugée "atteignable" même si elle reste "incertaine", en raison d'un risque de dérapage des dépenses publiques. La haute juridiction regrette une "sous-budgétisation chronique de certaines dépenses" et une "surestimation des économies attendues" de la nouvelle convention d'assurance chômage dans le budget 2016.
"En 2016, nous ferons preuve de la même gestion rigoureuse et réactive" qu'en 2015, a répondu le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert. "Les dépenses nouvelles, comme celles du plan emploi financé par l'Etat, seront compensées par des économies complémentaires", a-t-il assuré. Outre ces appréciations thématiques, l'institution de la rue Cambon assortit son rapport d'un droit de suite sur les recommandations formulées les années précédentes.
Parmi les bons élèves de 2016 figurent les certificats d'économie d'énergie, qui se sont "améliorés", mais aussi le dispositif en faveur des biocarburants, qui a connu des "progrès", même si des plus fortes incitations fiscales sont nécessaires. A l'inverse, des cartons orange ou rouge sont adressés à la lutte contre le tabagisme, qui "ne s'est pas donné tous les moyens d'atteindre ses objectifs" selon la Cour, ou au logiciel utilisé pour le calcul de la solde des 180.000 militaires, dont les dysfonctionnements ont conduit à des "trop-versés" de 350 millions d'euros.
Autre point noir: la piste de ski intérieure d'Amnéville, près de Metz, construite en 2005 pour 20 millions d'euros, dont les Sages demandent la fermeture "dans les plus brefs délais". Cette piste, la seule de France et la plus longue au monde, est "structurellement déficitaire" et "sans perspectives de redressement", juge la Cour.
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