Me Vardin : "j'ai peur pour mes concitoyens"
Me Vardin est l'invité de notre debriefing, proposé en partenariat avec BonSens.org : son confrère Me Lebreton, avocat au barreau de la Réunion et en métropole, devait se rendre à la Réunion pour plaider dans le cadre d’une affaire. Quelle ne fut pas sa surprise quand pour aller à la Réunion on lui demanda d’abord un certificat de résidence fiscale puis après de démontrer qu’il avait une audience. Devant cette rupture d’égalité manifeste, Me Vardin, avocat à la Réunion a fait une requête en référé invoquant le motif impérieux pour que Me Lebreton puisse se rendre à son audience. La plaidoirie s’est tenue samedi et au dernier moment la préfecture s’est ravisée et a donc donné son blanc-seing pour que Me Lebreton puisse voyager. Le tribunal n’a donc pas eu à statuer puisque la requête était dénuée de son fondement lors de l’audience.
« Clairement un abus de position » nous indique Me Alexandre Vardin – « encore nous sommes avocats et des hommes de droits, cependant imaginez pour le simple citoyen. Il faut arrêter ! »
Retrouvez ici le référé (en pdf)
Interrogée par France Soir, Me Séverine Manna indique, de source vérifiée, que le président du tribunal administratif a ouvert l’audience en insistant sur le fait que l’affaire était grave car une telle application des mesures sanitaires entravait l’exercice de la profession d’avocat. En effet le service public de la justice n’est pas interrompu par les mesures sanitaires. Alors comment peut-on refuser à l’avocat qui est justement auxiliaire de justice d’assurer la continuité de sa mission ? Une incohérence parmi tant d’autres.
Notons qu’à Paris, l’Ordre des avocats a rappelé à l’occasion des différents confinements que la seule production de sa carte professionnelle par un avocat suffisait à établir qu’il était en droit de circuler librement. Ce droit ne s’arrête pas à la France métropolitaine.
Et Me Manna analyse la décision : « D’aucuns diront que la décision aboutit à deux non-lieux à statuer et ne dit rien, mais tout avocat rompu à ce type de contentieux remarquera un détail très important. Le juge condamne l’État à verser la somme de 1000€ à Me Lebreton. Le montant pour ce type de contentieux est plutôt très élevé au regard des usages et surtout en cas de non-lieu, il est plus que rare qu’une indemnisation des frais d’avocat soit allouée.»
Et elle rajoute : « Cela signifie que le magistrat n’a pas été dupe. Le Préfet était allé trop loin dans son pouvoir de police et ce rétropédalage organisé en dernière minute ne l’aura pas convaincu. Le juge n’a pas pu statuer mais il a marqué le coup comme un "dernier avertissement avant poursuites" ! »
Une fois n’est pas coutume à la Réunion ou en métropole, c’est la régularisation avant audience... Une décision fustigeant l’action du gouvernement ou de ses organes décentralisés n’est pas concevable. Les avocats qui travaillent sur les dossiers liés à la crise sanitaire ont bien remarqué cette façon de fonctionner.
mis à jour le 14 avril 2021 avec les commentaires de Me Manna
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