Chômage : 2018 débute par une baisse en demi-teinte
Baisse du chômage mais hausse persistante des travailleurs précaires: les chiffres du 1er trimestre 2018 publiés mercredi par Pôle emploi font apparaître une situation contrastée sur le marché du travail.
Le verre est à moitié plein. La baisse du chômage se poursuit, avec 32.100 chômeurs en moins (-0,9%) au 1er trimestre. Sur un an, le nombre de chômeurs décroît de 1,2%. Toujours élevé, leur nombre atteint 3,70 millions, son plus bas niveau depuis le 3e trimestre 2014.
En outre, toutes les classes d'âge profitent de la baisse trimestrielle: les jeunes (-0,6% en métropole), comme les seniors (-0,6%).
Mais le verre est aussi à moitié vide. Parallèlement à cette baisse du chômage, le nombre de demandeurs d'emploi exerçant une activité poursuit sa hausse, ininterrompue depuis la crise de 2008. Ces personnes - qui travaillent souvent à temps partiel ou en contrats courts mais restent inscrites à Pôle emploi car elles cherchent un meilleur emploi ou un emploi plus durable - sont 2,23 millions au 1er trimestre, soit 1,5% de plus que fin 2017.
Résultat: le nombre de demandeurs d'emploi, avec ou sans activité, est stable (+1.900, +0,0%) sur le trimestre, à 5,93 millions. Il est même en hausse de 2,1% sur un an.
"La précarisation continue de s'aggraver", réagit Force ouvrière dans un communiqué. La CFDT fait le même constat. La CGT va plus loin, accusant le gouvernement et le patronat de faire un "chantage à l'emploi précaire".
La reprise économique se traduit, dans un premier temps, par "des créations d'emplois plutôt précaires - des CDD, de l'intérim... - donc des allers-retours entre l'activité et le chômage", explique Bruno Ducoudré, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "Quand vous travaillez un jour par-ci, un jour par-là, dans la restauration par exemple, vous n'allez pas vous désinscrire de Pôle emploi", développe-t-il.
Un deuxième facteur, réglementaire celui-là, peut aussi expliquer cette situation: la mise en place, depuis 2014, d'un mécanisme de droits rechargeables. Ceux-ci allongent la durée d'indemnisation des demandeurs d'emploi lorsqu'ils retravaillent, ce qui les "incite à rester inscrits à Pôle emploi", selon M. Ducoudré.
- Record des embauches en CDI -
Un autre bémol vient nuancer la baisse du chômage: la forte hausse, dans le même temps, du chômage de longue durée. Petite activité incluse, 2,74 millions de demandeurs d'emploi sont inscrits depuis plus d'un an. Un chiffre en hausse de 1,9% sur le trimestre et de 6,5% sur l'année.
La publication mi-figue mi-raisin de Pôle emploi est, une nouvelle fois, en décalage avec les autres indicateurs du marché du travail, qui, dans le sillage de la croissance, sont tous dans le vert.
C'est notamment le cas des embauches en CDI, qui ont atteint un niveau record au 1er trimestre 2018, flirtant avec le million.
Par ailleurs, l'autre indicateur du chômage, le taux publié par l'Insee, fait apparaître une décrue bien plus rapide. Selon l'Institut national de la statistique, le taux de chômage s'est établi à 8,9% de la population active fin 2017, en baisse de 1,1 point sur l'année. L'Insee publiera en mai ses chiffres pour le 1er trimestre 2018.
Les chiffres publiés mercredi marquent la fin d'une vieille tradition: la publication mensuelle de l'indicateur de Pôle emploi.
Cette publication chaque fin de mois, qui était redoutée par les ministres du Travail - Michel Sapin (2012-2014) la comparaît à "la cadence du tambour des galères" -, était aussi décriée par de nombreux économistes et statisticiens, qui lui reprochaient sa grande volatilité sans lien avec les évolutions du marché du travail.
Au mois le mois, ces chiffres pouvaient être affectés par des aléas administratifs: demandeurs d'emploi désinscrits pour avoir oublié d'actualiser leur situation auprès de Pôle emploi, qui se réinscrivent le mois suivant, nombre de jours ouvrés pendant la période d'actualisation, ou encore bugs dans l'envoi de SMS de relance aux demandeurs d'emploi pour les inviter à s'actualiser...
Le passage à des moyennes trimestrielles doit permettre de lisser les tendances.
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.