Les accointances du nazisme avec l'écologie : le vert et le brun [2/5]
FEUILLETON [2/5] - L’inspirateur de la première législation allemande qui conjugue le vert (écologique) et le brun (nazi) est Walther Schoenichen (1876-1956), disciple convaincu de Ernst Haeckel.
Sa carrière avait commencé sous la République de Weimar. Biologiste de renom, il est nommé en 1922, sous la République de Weimar, à la tête du Staatlichen Stelle für Naturdenkmalpflege in Preußen (Office d’Etat pour la Préservation de la Nature en Prusse).
En 1926, Schoenichen publie un livre d’éducation où il proclame : « Il n’y a aucun doute qu’une catastrophe raciale-hygiénique menace notre peuple. » Il y encourage les femmes « valables racialement » à faire des enfants et décourage les autres d’en faire autant. Il salue l’âme germanique pour son amour de la nature. Selon lui, les canaux, les chemins de fer et les ouvertures de mines sont autant de crimes contre la nature commis par des personnes animées par un esprit non-allemand du commerce. Les premiers panneaux publicitaires dans les rues de Berlin sont infectés du « poison juif ». Il appelle à l’abolition du capitalisme. Il publie « La cathédrale verte, un livre allemand sur la forêt ». Tout un programme, qui ravirait encore aujourd'hui les contempteurs de l’exploitation forestière. En 1932, il adhère au Parti nazi.
Le journal prussien qu’il dirige publie, dans son premier numéro de 1933, une photo d’enfants marchand avec un drapeau orné d’un swastika, avec ce sous-titre : « Le peuple allemand doit être nettoyé, et de même la campagne allemande ». Pour lui, le nazisme est l’accomplissement des rêves environnementalistes.
En 1934, Schoenichen publie Naturschutz im Dritten Reich, ( Protection de la Nature dans le IIIème Reich), où il exalte les liens entre les Aryens et la nature. Il y prie pour qu’un jour l’Allemagne puisse conduire un mouvement de protection de la nature à l’échelle européenne (une vue d’avenir !). Enfin, il y déplore que le capitalisme ait pollué l’air que nous respirons et l’eau que nous buvons.
Grâce aux efforts de Schoenichen et des collègues que cette figure de proue avait convaincus, l’écologie est introduite dans l’éducation allemande dès cette époque. L’un de ces collègues, Ernst Lehmann, définit le nazisme comme une « biologie appliquée », ajoutant : « cette aspiration à l’interconnexion avec la totalité de la vie, avec la nature elle-même, une nature dans laquelle nous sommes nés (jusqu'ici quel écologiste ne reprendrait pas ces termes) , c’est le sens le plus profond et la véritable essence de la pensée nationale-socialiste. »
Schoenichen se félicita en 1940 de la conquête de la Pologne par l’armée allemande, il y voyait une opportunité pour créer des parcs naturels, mais aussi pour réduire la densité démographique en Allemagne, une fois que les Polonais auraient laissé leur place aux citoyens du IIIème Reich.
En 1942, il est nommé directeur du Reichstelle für Naturschutz (Office d’Etat pour la Protection de Na nature). La même année il publie Naturschutz als völkische und internationale Kulturaufgabe (Préservation de la Nature, une tâche nationale et internationale). De fait, alors même que l’Allemagne est plongée dans une guerre sans fin, les préoccupations écologiques ne sont pas oubliées, quitte à gêner les industries d’armement ou les nécessités de la défense du territoire !
Après-guerre, Schoenichen ne sera pas inquiété. Il continuera sa carrière de professeur.
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