Les accointances du nazisme avec l'écologie : Mère Nature, une nouvelle divinité [4/5]

Auteur(s)
Philippe Simonnot, journaliste pour FranceSoir
Publié le 08 avril 2021 - 21:38
Mis à jour le 07 avril 2021 - 22:48
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Accointances du nazisme et de l'écologie - par Philippe Simonnot
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Walther Darré, ministre de l'Agriculture à Goslar, le 13 décembre 1937
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FEUILLETON {4/5] - Le 1er juillet 1935 est adoptée la loi sur la protection de la nature (Reichsnaturschutzgesetz), qui vient compléter les lois sur les  animaux.

« Notre campagne nationale, énonce-t-elle, a été profondément modifiée parc rapport aux temps originels, sa flore a été altérée de multiples façons par l’industrie agricole et forestières [...] Aujourd'hui, une conscience claire s’est fait jour des dommages intellectuels  (sic), mais aussi économiques d’un tel bouleversement de la campagne allemande [...]. Le gouvernement allemand du Reich considère comme son devoir de garantir à nos compatriotes, même les plus pauvres, leur part de la beauté naturelle allemande ».

Dès lors est instauré le concept de « monuments naturels », qui ne doivent rien à la main de l’homme. « Les monuments naturels, au sens où l’entend cette loi, sont des créations originales de la nature dont la préservation relève d’un intérêt public en raison de leur importance et de leur signification scientifique, historique, patriotique, folklorique, ou autre - il s’agit par exemple des rochers, des chutes d’eau, des accidents géologiques, des arbres rares. » Il s’agira donc de créer des « zones naturelles protégées » - une nouveauté radicale pour l’époque qui faisait de ces zones sauvages de véritables monuments, qui pour « naturels » qu’ils fussent, n’en étaient pas moins sacrés et pourvus de droits. Comme si une nouvelle divinité avait été, intronisée, Mère Nature.

La célèbre injonction de Descartes « à nous rendre maîtres et possesseurs de la nature », qui a gouverné les esprits depuis le 17ème siècle est ici balayée et même renversée. Et avec elle, la raison cartésienne.

Mais c’est surtout l’ordre biblique qui est ici atteint – et on ne s’en étonnera pas qu’il en soit ainsi dans une loi nazie. Rappelons ce texte fondateur de la Genèse : "Dieu dit : ‘Faisons l’homme à notre image, comme notre ressemblance, et qu’ils dominent sur les poissons  de la mer, les oiseaux du ciel, les bestiaux, toutes les bêtes sauvages et toutes les bestioles qui rampent sur la terre’.  Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. Dieu les bénit et leur dit : ‘Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la ; dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre. Dieu dit : ‘Je vous donne toutes les herbes portant semence, qui sont sur toute la surface de la terre, et tous les arbres qui ont des fruits portant semence : ce sera votre nourriture.’» (Genèse 1, 26-30).

Notre lecteur sait quel parti le christianisme sut tirer de ce texte pour fonder le capitalisme : https://www.francesoir.fr/opinions-tribunes/le-christianisme-est-linventeur-du-capitalisme. En sacrant la nature et ses « monuments », la loi nazie vise d’une flèche trois cibles : le judaïsme, le christianisme et le capitalisme.

Hermann Goering, maréchal du Reich, l’adjoint le plus puissant de Hitler, fut l’un des grands prêtres de cette écologie profonde avant la lettre. Il avait dans ses nombreuses attributions la direction de l’Office des Forêts. Et la loi de 1935 lui donnait le contrôle de toutes les agences de protection de la nature. Elle exigeait de l’administration à tous les niveaux de consulter les conservateurs avant d’envisager quelque mesure que ce soit qui pourrait altérer les paysages, que la propriété soit publique ou privée.

Goering consacra 40 000 hectares autour de sa propriété de Carinhall, située au milieu de la forêt de Schorfheide, à une réserve naturelle pour préserver la faune et la flore. Il avait l’habitude de dire qu’un sentiment de compréhension profond pour la Nature est la fondation de toute culture.   

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