Les assistants vocaux nuisent au développement social et émotionnel des enfants
Dans un article scientifique publié dans la revue Archives of Disease in Childhood, des universitaires dénoncent l’impact négatif des assistants vocaux sur les enfants qui y sont exposés. Leurs réponses automatiques souvent inappropriées pourraient notamment entraver le développement social et les opportunités d'apprentissage des enfants.
Les appareils d’assistance vocale sont de plus en plus répandus dans les foyers
L’assistance par commande vocale est maintenant proposée de manière systématique par les géants du Web pour réaliser les tâches du quotidien via les smartphones ou enceintes connectées. Commander à manger, éteindre la lumière, chercher une adresse ou appeler une personne, peut se faire en échangeant avec ces intelligences artificielles. Ces assistants s’appellent Google Home, Amazon Alexa ou Siri chez Apple, et ils sont de plus en plus présents au cœur des foyers, à tel point que de nombreux enfants y sont confrontés quotidiennement.
En raison de cette explosion de leur usage, un groupe de chercheurs a voulu creuser la question des impacts psychologiques de ces technologies sur les utilisateurs, notamment les plus petits. Les enfants peuvent utiliser ces outils de différentes manières, et certains parents dépassent les limites, en exposant leurs enfants à des applications de lecture et à des jeux éducatifs via les assistants vocaux. Selon les chercheurs, cela pourrait "affecter négativement le développement cognitif et social des enfants".
En attribuant des caractéristiques et un comportement humains aux appareils, les enfants deviennent moins empathiques
Pour allumer ces appareils, les GAFAM proposent de s’adresser aux enceintes ou aux smartphones comme s’il s'agissait de vraies personnes. Or, selon les auteurs de l’article Ananya et Anmol Arora, de l'Université de Cambridge, cela crée un risque de sur-anthropomorphisme des appareils numériques, c'est-à-dire une tendance à attribuer des caractéristiques et un comportement humains à un appareil.
Lors du stade crucial du développement social et émotionnel des enfants, interagir avec des appareils numériques comme avec des personnes de leur entourage pourrait avoir des conséquences à long terme sur l'empathie, la compassion et la pensée critique, explique la chercheuse Ananya Arora. En plus de cela, une enceinte connectée ne va pas demander à un enfant de dire “merci” ou “s’il vous plaît”, et n’accordera aucune importance au ton de la voix de l'utilisateur. Ce sont pourtant des modalités d’expression que les adultes qui entourent un enfant sont censés surveiller et guider en permanence, lorsqu’ils parlent avec des enfants. "Le manque de capacité à s'engager dans une communication non verbale fait de l'utilisation des appareils une mauvaise méthode d'apprentissage de l'interaction sociale", précisent les chercheurs.
Les géants du Web conscients du succès des enceintes auprès des enfants proposent déjà des fonctionnalités dédiées. Alexa, par exemple, a mis en place une fonction pour renforcer l’utilisation du “mot magique”. Mais récemment, Amazon a également annoncé vouloir lancer une nouvelle fonctionnalité permettant d’imiter la voix de n'importe qui et permettre ainsi aux enfants d'écouter une histoire avec la voix de leurs parents, de quelqu’un de connu ou même de quelqu'un de décédé. Alors que certains se réjouissent de cette innovation, d’autres signalent les limites éthiques de la technologie et son caractère effrayant, capable de faire “parler les morts” et d’imiter des qualités humaines, avec des impacts négatifs méconnus, sur les enfants notamment.
La recherche d'informations est une "expérience d'apprentissage importante"
Laisser une intelligence artificielle chercher sur le web des informations à leur place n’est pas non plus bénéfique pour les enfants, qui devraient développer, en cherchant par eux-mêmes, la pensée critique et le raisonnement logique. Les chercheurs ont également mis en évidence certaines des réponses inappropriées données aux enfants, notamment un cas dans lequel Alexa a demandé à une fille de 10 ans d’introduire une pièce de monnaie dans une prise électrique.
Des enceintes qui surveillent
Les inquiétudes concernent également les problèmes de confidentialité : la CNIL rappelle que ces assistants vocaux ont directement accès à la vie privée des utilisateurs, car tout ce qui est dit à portée de micro est enregistré (et parfois écouté) dans le Cloud. Y compris à votre insu puisqu’un assistant est susceptible de participer à une conversation dès lors qu’il croit détecter son “mot-clé”, comme “Ok Google”, “Siri”, ou “Alexa”.
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