Riccardo Stracciari : l'art peut-il transmettre le concept de la victoire ?
CHRONIQUE — L'art, une école de la victoire : épisode 1. Ce qui distingue les arts dits classiques de divertissements aussi agréables soient-ils, est la très grande technicité qu’ils exigent, une technicité générée depuis le for intérieur de l'être humain plutôt que par quelque amplification électronique, stroboscopie, etc.
Chez l’artiste, cela signifie une volonté d’apprentissage sur de longues années, doublée d’une force intérieure le permettant de soutenir dès son plus jeune âge la tension suscitée par des émotions très puissantes, pratiquement « de vie et de mort ».
Ces facultés sont extrêmement rares et font que les grands artistes sont considérés et non sans raison, comme en quelque sorte des surhommes dotés de qualités presque divines. Ils sont aussi, souvent, l’incarnation des qualités de leur nation ; le rôle qu’a joué Giuseppe Verdi dans le Risorgimento italien étant un exemple récent et pertinent.
Une fois acquise cette technique, qui demande au moins une décennie d’études, l’artiste accompli ira puiser des idées nouvelles depuis un domaine foisonnant, dépourvu de paroles ou d'images fixes, loin dans le préconscient. Il possède la faculté de les « ramener à la surface » de la conscience pour les transmettre d’esprit à esprit, d’homme à homme.
Face au grand artiste, nous sommes en réalité face à la créativité pure. Si nous répondons à l’appel qu’il nous lance, c’est que cette créativité existe en chacun de nous. C’est elle qui nous amènera la victoire.
Aujourd’hui, Riccardo Stracciari (1875-1955), baryton
S’il nous est possible de savoir quels étaient la technique et le savoir du 19ème siècle, c’est grâce aux enregistrements très anciens d’une poignée de musiciens extraordinaires et notamment, de Riccardo Stracciari, formé à Bologne par Umberto Masetti. Encore aujourd’hui objet d’étude des chanteurs lyriques, le baryton bâtissait une tension artistique presque insoutenable. Chaque note a un sens et revêt une couleur qui lui est propre, la ligne de chant ne tombe jamais, la voix, très noble, semble venir de fort loin, à la fois matérielle et absolument impalpable, tel un ange ou un esprit. Alors que les Elon Musk de ce monde prétendent dans leur hubris vaincre la mortalité, le grand artiste comme Stracciari l'accepte. Ainsi il nous transmet comme par osmose son opposé, le "non-mortel". Son optimisme, sa combativité sont irrépressibles. Lorsque l’artiste sort sur scène, rien d’autre n’existe pour lui sauf faire honneur à son art et à son prochain.
Nous vous invitons à l’écouter.
« Eri tu » (Un Ballo in Maschera)
Per me giunto... (Don Carlo)
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