Alstom : le gouvernement veut à tout prix déminer le dossier, à huit mois de la présidentielle de 2017
Le gouvernement a engagé des discussions tous azimuts sur l'avenir du site d'Alstom à Belfort, menacé d'un transfert massif d'activité, pour tenter de trouver au plus vite une solution à un dossier empoisonné à huit mois de la présidentielle.
L'exécutif "se donne dix jours" pour venir en aide aux plus de 400 salariés travaillant dans l'usine historique d'Alstom, ont rapporté plusieurs syndicats à l'issue d'une rencontre mardi avec le secrétaire d'État à l'Industrie, Christophe Sirugue.
"Des rencontres vont être organisées avec l'ensemble des acteurs de la filière (ferroviaire) dans les prochains jours", a ajouté un représentant de la CGT en citant la SNCF, la RATP et le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif).
La direction d'Alstom a également entamé des discussions avec le gouvernement et a précisé à l'AFP qu'"aucune décision ne sera(it) prise avant leurs conclusions".
Dans le même temps, le PDG du groupe, Henri Poupart-Lafarge, a reçu mardi un groupe d'élus franc-comtois à Paris. Et selon Marie-Guite Dufay (PS), présidente du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, le groupe est "conscient qu'il y a une fenêtre de tir et de négociations avec le gouvernement".
Dans un message envoyé aux salariés, M. Poupart-Lafarge avait affirmé auparavant que la pénurie de commandes rendait "aujourd'hui, impossible (...) un avenir pérenne pour les activités du site de Belfort".
Mais depuis Bucarest, François Hollande a redit que "tout sera(it) fait pour que le site de Belfort soit pérennisé" pour "plusieurs années".
Pour le président, le dossier est empoisonné, après la promesse non tenue de maintenir les hauts fourneaux de Florange, au début du quinquennat.
Il est "hors de question que le site de Belfort ferme", a martelé mardi le Premier ministre Manuel Valls.
L'annonce du transfert de la production de locomotives de Belfort à Reichshoffen (Bas-Rhin) d'ici à 2018, mercredi dernier, nourrit les critiques, à droite comme à gauche, sur la faiblesse du gouvernement en matière de politique industrielle.
L' État, qui détient 20% des voix au conseil d'administration d'Alstom, assure avoir été mis devant le fait accompli.
"Invraisemblable" que l'État ait "l'air de découvrir le problème", a ironisé mardi Alain Juppé (LR), tandis que François Fillon (LR) a dénoncé les "postures politiques" gouvernementales. Benoît Hamon (PS) a évoqué une "chronique de l'impuissance volontaire". Le député européen PS et ex-syndicaliste Edouard Martin a renvoyé pour sa part dos à dos droite et gauche qui "se fichent" de l'avenir de l'industrie.
Dans son courrier aux salariés, le PDG d'Alstom a assuré avoir "alerté les pouvoirs publics" sur la situation "depuis plusieurs mois", une affirmation appuyée par plusieurs élus de droite.
L'annonce tombe particulièrement mal pour l' exécutif. François Hollande, toujours englué dans une impopularité record, voit en effet parasité son discours sur l'amélioration de la situation économique, le fameux "ça va mieux".
Face aux critiques de la droite, il a tenté de reporter la faute sur son ex-ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, selon lequel il n'a cependant jamais été question de cette fermeture lors de ses discussions avec le groupe.
Du fait de la spécialisation des usines d'Alstom, les dernières commandes décrochées par le constructeur doivent profiter à d'autres sites.
Le gouvernement va "travailler" avec "l'ensemble de ceux qui, en capacité de passer un certain nombre de commandes en France, peuvent permettre d'assurer le plan de charge qui permettra de sauver les activités ferroviaires d'Alstom à Belfort", a expliqué le ministre de l'Économie, Michel Sapin.
Tous les feux sont maintenant braqués sur le groupe public SNCF, principal client d'Alstom dans l'Hexagone.
Mais le groupe est lourdement endetté et le pari est délicat alors que ces marchés publics font normalement l'objet d'appels d'offres ouverts à des concurrents étrangers souvent moins chers.
Selon le secrétaire d'État aux Transports, Alain Vidalies, cinq projets en cours de discussion pourraient sauver le site de Belfort en comblant le "trou de commandes qui va de 2018 à 2022".
La presse de mercredi ne cache pas ses doutes sur la réussite de l'opération: "agitation stérile" (Le Figaro), "concours de simplisme" (Les Echos), "larmes de crocodile" (La Croix).
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