Assistants d'eurodéputés du RN : un rapport de police dévoilé, manoeuvre politique pour Le Pen
Le Rassemblement national a dénoncé dimanche une manoeuvre politique du pouvoir après la sortie dans le JDD d'un rapport de police synthétisant l'enquête qui vaut à Marine Le Pen d'être mise en examen depuis 2018 pour des soupçons d'emplois fictifs d'assistants d'eurodéputés RN.
"Le JDD, organe officiel du pouvoir macroniste, ressort la même sempiternelle affaire des assistants parlementaires, comme à chaque élection", a réagi sur Twitter Marine Le Pen, courroucée de voir cette affaire refaire surface à un mois des élections régionales prévues les 20 et 27 juin.
"Rien de neuf sous le soleil, sauf peut-être des bons sondages en vue ?", a-t-elle encore ironisé.
Le trésorier du RN, Wallerand de Saint-Just, a directement accusé sur BFMTV le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti d'être à l'origine de la "fuite" du rapport, "un tissu ignoble d'inexactitudes et de calomnies", dénonçant un "viol du secret de l'instruction".
"Un mensonge de plus. C'est de la politique des caniveaux", a réagi Eric Dupond-Moretti, tout en déplorant la fuite des procès-verbaux car "le secret de l'enquête ça existe" et que "Marine Le Pen est une justiciable comme les autres".
"Le RN au Parlement européen, c'est un peu prends l'oseille et tire-toi", a estimé pour sa part le secrétaire d'Etat Clément Beaune sur Europe 1/Cnews/Les Echos, alors que de nombreux responsables politiques de tous bords ont dénoncé "la fraude" et "l'escroquerie" du Rassemblement national.
Selon le Journal du dimanche, il s'agit d'un rapport de 98 pages de l'office anticorruption (OCLCIFF) daté du 15 février et adressé à la juge d'instruction Claire Thépaut, qui a mené les investigations. La magistrate a toutefois été nommée en décembre au tribunal de Bobigny et n'est plus chargée du dossier.
Le rapport synthétise, "possiblement à l'intention de la nouvelle magistrate chargée du dossier" commente un des acteurs de l'affaire, les éléments réunis par l'enquête ouverte en mars 2015 et confiée fin 2016 à des juges d'instruction du pôle financier du tribunal de Paris.
Environ 25 élus et assistants du RN, dont la présidente Marine Le Pen, son père Jean-Marie et de hauts dirigeants, sont mis en examen pour "détournements de fonds publics" ou recel de ce délit.
Les magistrats soupçonnent le RN d'avoir "de manière concertée et délibérée" mis en place un "système de détournement" des enveloppes allouées par l'UE à chaque député pour rémunérer des collaborateurs parlementaires (21.000 euros mensuels).
Ces collaborateurs auraient travaillé en réalité pour le parti frontiste, lui permettant ainsi des économies substantielles sur ses salaires.
- "Cynisme" -
Le Parlement européen, partie civile, a réévalué en 2018 son préjudice à 6,8 millions d'euros dans cette affaire, qui a ensuite débouché sur des investigations distinctes à Paris portant sur les assistants d'eurodéputés du MoDem et de La France Insoumise.
Le Rassemblement national, qui conteste tout détournement, est aussi mis en examen dans cette procédure, ouverte également pour "escroquerie en bande organisée" et "travail dissimulé".
"Manifestement Marine Le Pen et le Front national ont un problème avec l'argent public", a critiqué le patron des députés LREM Christophe Castaner sur LCI/RTL/Le Figaro".
L'ex-LR Valérie Pécresse a dénoncé sur radio J des "pratiques totalement inacceptables" qui en disent, selon elle, "long sur le cynisme et les méthodes du RN".
"Quand le parti qui se présente comme celui de la lutte contre la fraude se révèle en être l'un des meilleurs experts !.. Et si on se passait du RN au second tour de l’élection présidentielle ?", s'est interrogé le secrétaire national du PS Olivier Faure sur Twitter, alors que le numéro un des Verts, Julien Bayou, a fustigé "une escroquerie en bande organisée".
Selon plusieurs sources proches du dossier, les investigations n'ont pu être closes en 2020 comme prévu, la crise du Covid-19 ayant notamment retardé la levée d'immunité de l'eurodéputé Jean-François Jalkh par le Parlement européen. Celle-ci, réclamée par les juges d'instruction français en vue de sa mise en examen, la dernière attendue dans le dossier, a finalement été levée le 23 mars.
Ces dernières années, la défense a multiplié les recours, jusqu'à présent rejetés, sans cacher son objectif de "repousser la tenue d'un procès éventuel à l'après-présidentielle 2022", selon l'un des avocats.
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