Fraude fiscale : Jérôme Cahuzac saura mardi s'il va en prison

Auteur:
 
Par Sofia BOUDERBALA - Paris (AFP)
Publié le 13 mai 2018 - 11:56
Image
L'ancien ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, le 21 février 2018, lors de son dernier jour du procès en appel au Palais de Justice de Paris
Crédits
© Eric FEFERBERG / AFP
Jérôme Cahuzac pourrait se retrouver derrière les barreaux à l'issue du verdict.
© Eric FEFERBERG / AFP

Il avait menti à la France entière sur ses comptes cachés à l'étranger: l'ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac, condamné en 2016 à trois ans de prison pour fraude fiscale et rejugé en février à Paris, saura mardi s'il va en détention.

Un premier compte en Suisse, puis un transfert à Singapour via des sociétés offshore immatriculées dans les mers du Sud: cette fraude sophistiquée de l'ancien pourfendeur de l'évasion fiscale restera comme le plus retentissant scandale du quinquennat de François Hollande.

Un électrochoc, qui allait aboutir à la création d'un parquet national financier et d'une agence anticorruption. Un nouveau projet de loi présenté en mars va jusqu'à proposer de rendre obligatoire la publication du nom du fraudeur en cas de condamnation pénale, pratique dite du "name and shame".

Pour Jérôme Cahuzac, 65 ans, qui incarna la lutte contre la fraude fiscale avant de devenir un paria de la République, tout l'enjeu est désormais de savoir s'il ira ou non en détention.

A l'issue du second procès, l'accusation a requis la "confirmation" de la condamnation à trois ans de prison ferme et cinq ans d'inéligibilité pour fraude fiscale (2010-2012) et blanchiment (2003-2013), décrivant un manquement qui avait "durement rompu l'équilibre social".

Après la révélation de son compte caché par le site d'information Mediapart, Jérôme Cahuzac avait menti pendant des mois, "les yeux dans les yeux", à ses proches, aux parlementaires, aux médias. Il avait finalement démissionné en mars 2013 puis avoué l'existence d'un compte à l'étranger.

"Votre plus grande contribution à la lutte contre la fraude fiscale aura été votre procès", avait asséné l'avocat général à l'ancien président de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Une confirmation du jugement enverrait l'ex-ministre derrière les barreaux alors qu'une peine égale ou inférieure à deux ans d'emprisonnement ouvrirait la possibilité d'un aménagement de peine.

A la barre de la cour d'appel, l'ancien député socialiste, qui vit la plupart du temps reclus en Corse, avait confié sa "peur d'aller en prison".

Son avocat et ami Jean-Alain Michel a réclamé une peine qui "n'accable pas plus que nécessaire un homme cassé". Son nouveau conseil, Eric Dupond-Moretti, suggérait "d'alourdir la peine" mais de l'assortir du sursis, mettant en garde la cour contre le risque de suicide de son client.

- Le "déni" de Birdie -

Plus sobre qu'en 2016, Jérôme Cahuzac a concédé un "déni" persistant. Mais, sur le fond, sa ligne de défense n'a pas changé: c'est la volonté de constituer un trésor de guerre au profit du mouvement de l'ex-Premier ministre Michel Rocard, qui expliquerait le "basculement" dans la fraude, et l'ouverture d'un premier compte en Suisse en 1992. La suite relèverait d'une "fuite en avant".

Des arguments balayés par l'avocat général, qui note au contraire un puissant "sentiment d'impunité".

Cette affaire est avant tout l'histoire de la chute d'un homme. Un chirurgien de talent saisi du virus de la politique, mais aussi un fraudeur au nom de code "Birdie" qui se fait remettre dans la rue des liasses de billets provenant de ses comptes cachés.

Dans les années 90, il fallait placer l'argent qui coulait à flots de la florissante clinique d'implants capillaires gérée par le chirurgien et son épouse dermatologue. Ce sera plutôt la Suisse pour lui, l'île de Man pour elle. Les comptes de la mère du médecin servent aussi à blanchir les chèques des riches patients anglais. Leur patrimoine global dissimulé est estimé à 3,5 millions d'euros.

En appel, Jérôme Cahuzac s'est retrouvé seul face à ses juges, avec l'ex-avocat genevois Philippe Houman, condamné en première instance à un an avec sursis et 375.000 euros d'amende pour avoir mis en place le montage financier ayant permis le transfert d'avoirs à Singapour.

Les autres protagonistes de l'affaire, l'ex-épouse du ministre comme les banquiers suisses, avaient renoncé à faire appel et sont donc définitivement condamnés: Patricia Cahuzac à deux ans de prison et la banque genevoise Reyl & Cie à l'amende maximale de 1,875 million euros.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
ARA
Décès de ARA, Alain Renaudin, dessinateur de France-Soir
Il était avant toute chose notre ami… avant même d’être ce joyeux gribouilleur comme je l’appelais, qui avec ce talent magnifique croquait à la demande l’actualité, ou...
07 novembre 2024 - 22:25
Portraits
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.