Réforme constitutionnelle : la déchéance de nationalité soumise au vote des sénateurs
Le Sénat à majorité de droite vote solennellement ce mardi 22 la révision constitutionnelle annoncée par François Hollande après les attentats du 13 novembre mais dans une version qui, de fait, scelle quasiment la fin de la déchéance de nationalité. "J'attendrai que le Sénat se prononce sur l'ensemble du texte pour savoir les conclusions que je dois en tirer", avait prévenu jeudi le chef de l’État en marge du sommet européen de Bruxelles, après l'examen du texte à la Haute Assemblée.
Pour aller au Congrès, le texte doit avoir été voté dans les mêmes termes par les deux chambres. Or les positions des députés et des sénateurs sur la déchéance de nationalité semblent inconciliables d'autant que le compromis de l'Assemblée avait été trouvé à l'issue de semaines de déchirements à gauche et la démission de Christiane Taubira du gouvernement.
Deux scénarios semblent encore possibles, si l'on en croit des sources gouvernementales: poursuivre le projet de réforme avec le seul article 1 sur la constitutionnalisation de l'état d'urgence, plus consensuel que la déchéance, en lui adjoignant éventuellement la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (sur laquelle les deux chambres s'apprêtent à se mettre d'accord); ou carrément abandonner l'ensemble du projet. Plusieurs voix à gauche ainsi qu'à l'UDI plaident pour la première option.
Manuel Valls de son côté a annoncé qu'après le vote du Sénat, il y aurait une rencontre entre le président de la République, les présidents des deux chambres, et lui-même. Le président du Sénat Gérard Larcher (Les Républicains, LR) se dit prêt à "engager le dialogue avec l'Assemblée et le gouvernement". Mais l'ensemble de la droite sénatoriale devrait voter pour la version du Sénat, la gauche s'y opposant, sans surprise.
Le Sénat a réservé la déchéance de nationalité aux seuls binationaux, pour éviter des apatrides, là où l'Assemblée l'avait ouverte théoriquement à tous les Français afin de ne pas créer de "discrimination". Les sénateurs ont aussi prévu la déchéance que pour les crimes, et non les délits. Et pour eux, cette mesure doit être du ressort de l'exécutif et non du juge.
Toutefois, l'arrestation de Salah Abdeslam, suspect clé des attentats du 13 novembre, de nationalité française, replace au premier plan la question de la déchéance. Cette arrestation "met dans la difficulté la droite sénatoriale qui ne veut pas reprendre la formule qui avait été décidée aux 3/5e à l'Assemblée nationale", a accusé Jean-Christophe Cambadélis. Le premier secrétaire du PS a aussi demandé que "la droite sénatoriale sorte de son jeu politicien" pour rendre possible la réunion du Congrès.
Jean-Christophe Cambadélis "tente bien maladroitement de faire oublier les divergences au PS, profondément divisé sur la question de la déchéance de nationalité", a réagi le patron des sénateurs Les Républicains (LR) Bruno Retailleau. "La position du Sénat est celle de la raison, elle a toujours été la position de la France. Le président de la République l'avait justement rappelé à Versailles", a-t-il ajouté. Quant à Philippe Bas (LR), le président de la commission des lois du Sénat, il a estimé encore possible la tenue d'un Congrès "si les députés vont en direction du Sénat".
L'ancien Premier ministre François Fillon (LR) a de son côté affirmé que François Hollande avait "échoué" sur la réforme constitutionnelle, "c'est une évidence". François Fillon s'était opposé à l'Assemblée à la réforme constitutionnelle, à l'opposé du président de son parti Nicolas Sarkozy et rival pour les primaires de la droite qui a soutenu le compromis trouvé.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.