Une victoire au goût de revanche pour Marine Le Pen

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Par Anne RENAUT - Paris (AFP)
Publié le 26 mai 2019 - 22:48
Mis à jour le 27 mai 2019 - 00:01
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Marine Le Pen le 26 mai 2019 à Paris
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© Bertrand GUAY / AFP
Marine Le Pen le 26 mai 2019 à Paris
© Bertrand GUAY / AFP

La liste Rassemblement national, arrivée légèrement en tête des élections européennes dimanche devant celle soutenue par Emmanuel Macron, donne une victoire au goût de revanche à Marine Le Pen qui renaît de ses cendres présidentielles et s'installe comme première opposante au chef de l'Etat.

La liste conduite par Jordan Bardella devance celle de Nathalie Loiseau de 1 à 2 points, selon les estimations des instituts de sondage.

"Le peuple français a infligé une sanction claire ainsi qu'une leçon d'humilité au président de la République", a déclaré la tête de liste Jordan Bardella pour qui "c'est (Emmanuel Macron) et sa politique qui sont rejetés". Il s'exprimait devant les militants réunis à Paris qui sautaient de joie et lançaient "on a gagné".

Marine Le Pen a pour sa part appelé Emmanuel Macron à "dissoudre" l'Assemblée nationale.

Dans un contexte de participation plus élevée, "les électeurs de Marine Le Pen se sont mobilisés parce qu'ils savaient que c'était une possibilité de prendre une revanche, symbolique, sur la présidentielle", où Marine Le Pen a été battue par Emmanuel Macron, à 66% contre 34%, après un débat jugé calamiteux, explique le politologue Jean-Yves Camus.

Le parti d'extrême droite a réussi à mobiliser au-delà du premier tour de la présidentielle, où elle avait obtenu 21,3% des voix, mais pas autant qu'aux dernières européennes en 2014 (24,86%).

Il devient une nouvelle fois le premier parti français au Parlement européen, où il entend y piloter, avec la Ligue italienne, un "super groupe" de partis nationalistes et eurosceptiques.

- Effet "gilets jaunes" -

Cette victoire conforte Marine Le Pen dans son rôle de première opposante, même si au Parlement, le premier parti d'opposition reste LR qui, lui, ne franchit pas la barre des 10%.

De village en village, misant sur la "proximité" d'avec la France des "oubliés", la cheffe du RN et son fidèle lieutenant Jordan Bardella n'ont cessé de pilonner leur adversaire Emmanuel Macron, confronté avec les "gilets jaunes" à la pire crise de son quinquennat, jusqu'à l'inviter à "partir" en cas d'échec, se faisant ainsi l'écho des "Macron démission" entendus sur les ronds-points.

Cette élection est une "forme de traduction politique de ce qu'on a vu à l'occasion des +gilets jaunes+, à savoir que si vous vous sentez proche des +gilets jaunes+, vous votez massivement pour le RN", explique Brice Teinturier directeur général délégué de l'institut Ipsos.

"La crise des +gilets jaunes+ et l'installation d'un match par Emmanuel Macron et par Marine Le Pen a contribué à installer la liste de Jordan Bardella comme principal réceptacle de la colère et du vote anti-Macron", ajoute Jérôme Fourquet directeur du département opinion de l'institut Ifop.

En théorisant le clivage "progressistes" contre "nationalistes", miroir de celui entre "mondialistes" et "nationaux" de Mme Le Pen, en s'impliquant dans le grand débat puis dans la dernière ligne droite de la campagne, Emmanuel Macron a "concentré sur lui beaucoup d'attentes" et en même temps "mobilisé l'électorat RN qui veut lui faire mordre la poussière", analyse Jérôme Sainte-Marie, président de l'institut Pollingvox.

Marine Le Pen a elle aussi assumé ce duel, exacerbant l'enjeu en plaidant pour un "vote utile" contre "la politique de Macron" et "l'Europe de Macron".

- Ecologique et identitaire -

La cheffe du RN revient de loin. Après la présidentielle, sa popularité avait chuté jusqu'à 20% d'avis favorables en février 2018, selon Ipsos. Elle n'a cessé de remonter depuis jusqu'à 29% en mai, quasi comme à son point culminant de mars 2017 (30%),

Son échec à la présidentielle avait non seulement déçu les militants mais provoqué des départs au premier rang desquels son numéro deux, Florian Philippot, parti fonder son propre mouvement, et la très populaire ex-députée Marion Maréchal, partie diriger une école de sciences politiques.

Marine Le Pen avait alors entrepris de tout changer "du sol au plafond" au Front national, jusqu'à le rebaptiser "Rassemblement national" pour élargir son électorat.

Elle a fait venir sur sa liste l'ancien ministre sarkozyste Thierry Mariani, qui s'est laissé convaincre par le revirement du RN sur l'euro et l'UE --dont le parti ne veut plus sortir-- et elle a exposé en fin de campagne un ancien soutien de Jean-Luc Mélenchon. Avant de convier explicitement vendredi les électeurs LR, LFI et DLF à voter pour sa liste.

Le RN a aussi présenté un visage écologique inédit, se faisant le chantre du "localisme", des circuits courts et du "juste échange", sous couvert d'une pensée identitaire associée aux idées d'enracinement et de frontières, justifiant son combat contre l'immigration, resté le fil conducteur.

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