Votation contre la loi Travail : les militants se mobilisent dans la rue
"On ne s'épuisera pas, la lutte on la mènera même sur les plages cet été!". Postée devant le Printemps Homme à Paris, Nathalie invite les passants à voter "pour ou contre le retrait" du projet de loi Travail, sur l'un des 400 points de la "votation citoyenne" organisée à travers la France. Avec une poignée de collègues du Printemps, tous de la CGT, elle s'est portée volontaire pour animer devant les grands magasins, lieu emblématique de la consommation, ce référendum lancé par les sept syndicats opposés à la loi El Khomri.
Des cheminots en grève de la Gare Saint-Lazare, à deux pas des grands boulevards, sont venus leur prêter main forte, gilets rouges sur le dos. Pas de stand, ni d'urne: le vote se fait sur le trottoir, au hasard des passages. "Bonjour, nous organisons une votation, venez vous exprimer!", lance Amélie, une jeune cheminote, en tendant un tract listant les raisons d'exiger le retrait d'un projet "inacceptable". A ceux qui semblent intéressés, elle propose de remplir un "bulletin de vote": il faut renseigner son nom si on veut, cocher "pour" ou "contre" le retrait du projet, et répondre à une deuxième question: "faut-il aujourd'hui des droits nouveaux pour les salariés, les jeunes, les privés d'emploi et les retraités?".
"On ne vous impose pas d'être d'accord avec nous, on vous demande votre avis", explique Marc, gilet rouge de la CGT-Cheminots sur le dos, à Khem, un informaticien du privé. D'abord hésitant, il finit par signer "pour" le retrait, "parce que cette loi donne trop de souplesse aux employeurs". Deux lycéennes s'arrêtent, enthousiastes. "Ils veulent donner encore plus aux patrons", estime Irène. Au bas de son bulletin, elle ajoute: "Révolution!". "Au début on était très mobilisé, mais avec les examens ça s'écrème", regrette-t-elle. L'immense majorité des signataires sont déjà acquis à la cause. Les autres ne s'arrêtent pas. Sur 153 votants, seuls 5 auront voté contre le retrait. "C'est pas une opération évidente, surtout dans un quartier comme ça", concède Marc, salarié de la SNCF. Une femme l'a traité de "sale communiste", une autre lui a demandé s'il n'avait "pas honte de faire grève pendant les inondations?". Mais dans l'ensemble, il y a peu d'agressivité.
Convaincus d'avoir l'opinion avec eux, les militants refusent de baisser les bras contre une réforme jugée "inique" et voient dans ce référendum une "possibilité de s'exprimer alors que le gouvernement ne le permet pas". "Tous les jours, on essaie de faire quelque chose pour rendre la lutte constructive, permettre de s'engager autrement que par la grève", confie Marc. Parce que la grève, "tout le monde ne peut pas la faire: des personnels ont peur, alors qu'ils rejettent le projet", affirme Yanne, salariée d'un grand magasin et élue CGT.
"Chez nous, on se mobilise plus contre le travail du dimanche", témoigne Nathalie, cadre au Printemps, avant d'ajouter: "la loi Macron + la loi El Khomri, ça va être terrible!". Un collègue lui parle de l'Euro de foot qui va "endormir les Français"... "C'est panem et circences! répond-elle. Mais on ne s'épuisera pas, même cet été sur les plages, dans les campings, on mènera la lutte".
Sur le parvis de l'Hôtel de Ville, un vrai stand avec urnes trône devant la cantine où déjeunent les agents de la mairie de Paris. Ici, l'accueil est plutôt bon. "Les gens prennent le tract avant d'aller manger, et votent en sortant", se félicite Naouel, auxiliaire de puériculture et responsable CGT Petite enfance. De simples passants votent aussi, comme ce retraité qui voit dans la loi "une remise en cause des acquis de 1936". A 14h30, les urnes sont "pleines: 290 votants, sur 1.000 à 1.200 salariés qui déjeunent ici chaque jour", selon la CGT. Et quasiment que des "pour" le retrait. Le résultat de cette votation doit être remis au gouvernement aux alentours de la mi-juin.
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