BarMar : le nouveau couloir énergétique entre la France et l'Espagne verra-t-il le jour ?

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Anaïs Bertrand, pour FranceSoir
Publié le 03 novembre 2022 - 13:45
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BarMar
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Le président français Emmanuel Macron, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez et son homologue portugais Antonio Costa se sont mis d'accord sur une nouvelle alternative au projet MidCat.
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Le président du gouvernement espagnol Pedro Sanchez et le Premier ministre portugais, António Costa, ont réussi à vaincre les réticences d'Emmanuel Macron en "abandonnant" le projet MidCat au profit d'un projet alternatif ayant pour objectif d'augmenter les interconnexions énergétiques de l'Espagne et du Portugal avec la France.

Les négociations entre les trois chefs d'État ont eu lieu jeudi 20 octobre lors de la réunion tenue à Bruxelles quelques heures avant le début du Conseil européen. Le projet d'un nouveau "corridor énergétique" entre Barcelone et Marseille vise à relier la péninsule ibérique au reste de l'UE et serviront à transporter du gaz et de l'hydrogène renouvelable des deux côtés des Pyrénées.

"Nous sommes parvenus à un accord entre les trois gouvernements pour remplacer le projet MidCat par un nouveau corridor énergétique vert qui reliera la péninsule ibérique à la France et au marché énergétique européen, en proposant l'alternative Barcelone-Marseille", a expliqué Pedro Sanchez à son arrivée au Conseil européen. Ce sera, a-t-il dit, "un pipeline pour l'hydrogène vert et aussi pour le gaz pendant la transition".

La fin du projet MidCat

L'annonce faite à Bruxelles met donc fin à un différend de plusieurs mois entre Madrid et Paris. Pedro Sánchez a défendu, avec le soutien de Lisbonne et de Berlin, l'infrastructure MidCat qui permettrait d'acheminer le gaz de la péninsule ibérique vers l'Europe du Nord en passant par les Pyrénées. Paris, en revanche, a fait valoir que la construction de MidCat prendrait trop de temps pour répondre à la crise énergétique actuelle et, de plus, qu'il s'agissait d'un investissement contraire à la lutte contre le changement climatique.

MidCat a été enterré pour la première fois en 2019 en raison de ses coûts excessifs. La guerre en Ukraine, les pénuries d'énergie et la recherche par l'Allemagne de fournisseurs de gaz alternatifs à la Russie ont conduit l'Espagne, le Portugal et l'Allemagne à promouvoir sa résiliation, mais le refus de la France a été une nouvelle fois retentissant. Parmi les alternatives proposées, il y a celle promue par Sánchez, Costa et le chancelier allemand, Olaf Scholz, de convertir le MidCat en tube à hydrogène dans le futur.

Un changement d'itinéraire

Le projet MidCat sera donc remplacé par un corridor maritime de 360 km entre Barcelone et Marseille. La nouvelle infrastructure, officieusement appelée BarMar, transportera à l'avenir de l'hydrogène renouvelable ainsi qu'une proportion limitée de gaz naturel comme source d'énergie temporaire et transitoire.

Selon le communiqué conjoint publié par les trois gouvernements, il s'agit de "l'option la plus directe et la plus efficace pour relier la péninsule ibérique au centre de l'Europe", dans la continuité d'un autre projet d'interconnexion de gaz renouvelable entre Celourico da Beira (Portugal) et Zamora (Espagne).

L'accord comprend également un engagement à accélérer et à finaliser une nouvelle interconnexion électrique à travers le Golfe de Gascogne, ainsi qu'à identifier, évaluer et mettre en œuvre de nouvelles interconnexions électriques entre la France et l'Espagne, ce sur quoi Paris avait insisté ces derniers mois comme alternative à MidCat.

Le mécontentement des organisations environnementales

Les organisations environnementales et sociales, dont Greenpeace, WWF et l'Observatoire de la dette dans la mondialisation (ODG), s'opposent et jugent inutile la construction de BarMar.

"Cette proposition d'infrastructure ne répond pas aux besoins des citoyens pour faire face à la crise énergétique et s'éloigne d'une transition énergétique juste", déclarent les organisations dans une déclaration commune, dans laquelle elles annoncent une campagne pour arrêter le projet gazier.

En outre, ils critiquent le fait que BarMar transportera du gaz fossile "au moins pendant cette décennie, car on estime que l'entrée en service pour transporter de l'hydrogène se fera en 2030".

Les mouvements écologistes soulignent également la difficulté de construire ce gazoduc sous-marin qui, selon eux, nécessiterait "des matériaux spéciaux, comme un alliage d'acier spécifique, et des compresseurs plus puissants et adaptés, le tout à des coûts très élevés", ainsi que des études techniques des fonds marins et des impacts sur les écosystèmes marins.

Bien que l'itinéraire soit encore inconnu, selon les écologistes, il est probable qu'il traverse le golfe de León, "qui est l'une des zones présentant l'indice de biodiversité le plus élevé de la Méditerranée, où se trouvent des zones marines protégées, le corridor des cétacés et le sanctuaire Pelagos".

De nouvelles divergences en faveur du nucléaire 

Moins d'une semaine après s'être mis d'accord sur la construction du BarMar, les gouvernements espagnol et français ont une nouvelle fois fait part de leurs divergences à l'égard de cette source d'énergie.

Dans ce cas, il ne s'agit pas de son transport, mais de son essence même. Alors que l'Espagne insiste sur le fait qu'il doit être "vert" et obtenu avec de l'électricité provenant de sources renouvelables qui n'émettent pas de CO2 dans l'atmosphère, la France est d'accord avec le mantra "zéro émission", mais fait valoir que le processus doit également être possible, avec un traitement égal, grâce à l'énergie nucléaire, une idée également soutenue par l'Allemagne et six autres pays de l'UE.

La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a regretté que pour l'instant, les plans de Bruxelles n'incluent pas l'hydrogène d'origine nucléaire, et a fait référence à la lettre dans laquelle huit pays de l'UE ont demandé à la Commission de prendre en compte la séparation de l'hydrogène des autres éléments dans lesquels il se trouve dans la nature par un procédé électrique basé sur l'énergie nucléaire.

Des stratégies énergétiques opposées

Paris et Berlin sont en désaccord depuis des mois sur les mesures à prendre pour freiner l'inflation énergétique. Emmanuel Macron a insisté sur l'opportunité d'acheter du gaz communautaire.

Le président français s'est engagé à étendre au reste de l'UE le mécanisme ibérique de découplage du prix de l'électricité et du gaz, qui a permis à l'Espagne de bénéficier actuellement d'un coût de l'électricité nettement inférieur à celui de l'Allemagne ou de la France. Mais le gouvernement allemand a bloqué ces propositions pendant des mois tout en soutenant le projet de gazoduc MidCat entre l'Espagne et la France, qui sera finalement abandonné au profit d'un hydrogénoduc sous-marin reliant Barcelone et Marseille.

Le président français n'a également pas apprécié l'annonce par Berlin, fin septembre, d'un plan d'aide de 200 milliards d'euros pour les entreprises allemandes, dont l'industrie est sur la corde raide après la fermeture du robinet à gaz russe. Aux accusations d'égoïsme national, l'Allemagne a répondu que tous les pays défendent leurs intérêts et a accusé les Français de promouvoir des solutions européennes qui cherchent avant tout à favoriser les priorités de la France.

Pour l'instant, Sanchez, Macron et Costa ne se sont pas encore mis d'accord sur la date de construction de l'infrastructure BarMar, sur le moment où elle pourrait être opérationnelle et sur son mode de financement. Les trois parties ont convenu de finaliser ces détails les 8 et 9 décembre lors du sommet euroméditerranéen qui se tiendra à Alicante.

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