Gaza : les négociations piétinent, le Hamas et Israël s’accusent mutuellement, plusieurs journalistes tués dans une frappe
Les espoirs de trêve à Gaza sont à nouveau douchés. L’optimisme, la semaine dernière, aussi bien celui de Washington que celui des deux belligérants, à savoir le Hamas et Israël, bute désormais sur des accusations mutuelles qui empiètent sur les négociations. Mais pendant celle-ci, le conflit ne s’apaise pas. Tel Aviv poursuit ses opérations et ses frappes sur l’enclave palestinienne, où cinq journalistes sont décédés hier jeudi. Le pape François a de nouveau dénoncé la “cruauté” d’Israël et Benjamin Netanyahou, visé par un mandat d’arrêt international, ne peut assister aux commémorations du 80e anniversaire de la libération d'Auschwitz en Pologne, de crainte d’être interpellé.
Depuis le 17 décembre, le Hamas, Israël et les États-Unis exprimaient leur espoir quant à une trêve. Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, affirmait “avoir bon espoir”. Le mouvement palestinien estimait “possible” un cessez-le-feu et un échange de prisonniers, mettant tout de même en garde contre de “nouvelles conditions de la part de Tel Aviv. Israël se montrait tout aussi optimiste en soulignant “n’avoir jamais été aussi proche” d’un accord depuis la trêve de novembre 2023.
L’optimisme s’est vite évaporé
En début de semaine, un haut responsable palestinien indiquait à la chaîne britannique BBC que les négociations étaient achevées à 90 %, mais que "des problèmes" restaient "à résoudre". Lundi, le PM israélien s’exprimait “avec prudence” devant le Parlement à propos des “avancées” pour un accord. "Je voudrais dire avec prudence que des avancées ont été faites et que nous ne nous arrêterons pas tant que [les otages] ne seront pas tous rentrés", a-t-il expliqué.
Que prévoit cet accord ? La création d'une zone tampon le long de la frontière israélo-gazaouie avec une présence militaire israélienne, ainsi qu'un cessez-le-feu en trois étapes. Ce plan prévoit un échange de prisonniers, la libération progressive des otages israéliens, le retour supervisé des Gazaouis dans le nord de l'enclave, et l'acheminement d'une aide humanitaire substantielle. La dernière phase comprenait une supervision de Gaza par un comité de technocrates non affiliés politiquement. Cependant, la durée du cessez-le-feu demeure un point de friction majeur, le Hamas aspirant à la fin définitive de la guerre, tandis qu'Israël cherche prioritairement à mettre un terme à la domination du Hamas sur Gaza.
Les négociations se sont ralenties et mercredi, Israël et le mouvement palestinien se sont mutuellement accusés d’en être responsable. Le Hamas a accusé Israël de poser de "nouvelles conditions" dans les discussions en cours à Doha. "L’occupation a imposé de nouvelles conditions, concernant le retrait (de ses troupes de la bande de Gaza), le cessez-le-feu, les prisonniers (otages retenus à Gaza et Palestiniens détenus par Israël) et le retour des déplacés, ce qui a repoussé la conclusion d’un accord", déplore le mouvement.
Tel Aviv a vite répondu, reprochant au Hamas de "poser de nouveaux obstacles dans les négociations". "L’organisation terroriste Hamas ment une fois de plus, revenant en arrière sur des points qui avaient fait l’objet d’un accord, et continuant de poser de nouveaux obstacles dans les négociations", a indiqué le bureau de Benyamin Netanyahou.
Gaza pilonnée, le pape dénonce la “cruauté” israélienne
Faute d’un accord, les opérations israéliennes se poursuivent. Tsahal continue de mener des frappes quotidiennes à Gaza, affirmant ne viser que les militants, accusés de se cacher parmi les civils, qui constituent, majoritairement, les victimes, à l’instar des femmes et des enfants.
Jeudi, au moins cinq journalistes sont morts après un bombardement israélien devant un hôpital. Les victimes travaillaient pour Al-Quds Today, une chaîne de télévision palestinienne affiliée au groupe Jihad islamique. Des images qui ont fait le tour des réseaux sociaux montraient une camionnette enflammée et des corps évacués du véhicule par les secours, avec, accroché au dos sur une pancarte, le mot “presse” en lettres rouges.
Un responsable pédiatrique à l’hôpital Nasser de Khan Younes (sud) a aussi annoncé hier la mort cette semaine, à cause du froid et en 48 heures, de trois bébés de moins d’un mois qui vivaient dans des tentes. “Le cas le plus récent est celui d’une petite fille innocente de trois semaines amené aux urgences avec une baisse importante de température corporelle, qui a entraîné sa mort”, a témoigné le Dr Ahmed al-Farra. “Un bébé de trois jours et un autre de moins d’un mois, tous les deux morts après une baisse importante de température”, font partie du bilan.
L’une des journées les plus meurtrières était celle de dimanche dernier avec au moins 22 personnes mortes dans des frappes israéliennes. Entre mercredi et jeudi, au moins 38 Palestiniens ont été tués. Le bilan total des victimes depuis l'année dernière monte à 45 399 morts, a déclaré le ministère gazaoui de la Santé, soit au moins 300 en une semaine. Quelque 107 940 autres personnes ont été blessées.
Les opérations israéliennes ont encore fait réagir le pape François. “Hier, des enfants ont été bombardés. C’est de la cruauté, ce n’est pas la guerre. Je tiens à le dire parce que cela me touche au cœur”, avait-il déclaré samedi. L’État Hébreu a vite réagi, qualifiant ces propos de “particulièrement décevants car Ils sont déconnectés du contexte réel et factuel de la lutte d’Israël contre le terrorisme djihadiste”. Selon le ministère des AE, “les critiques devraient être uniquement adressées aux terroristes, pas à la démocratie qui se défend face à eux”.
Une “cruauté” ou une “guerre” qui prive Benjamin Netanyahou, visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale, d’un déplacement en Pologne pour les commémorations du 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. Le PM israélien, rapportent les médias locaux, risquent de s’y faire arrêter.
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