Crise des migrants : l'Europe "bafoue" les lois, dénonce La Cimade
"Frontières européennes, défense d'entrer?", le titre du rapport d'observation présenté ce jeudi 2 juin par La Cimade est équivoque. L'association de protection des réfugiés et migrants, avec le concours d'autres structures européennes et africaines, a effectué plusieurs missions d'observation en 2015 dans des lieux sensibles de la crise des migrants: le Pas-de-Calais et ses "jungles", l'Italie, et la frontière entre l'Espagne et le Maroc.
Pour ces ONG, les autorités européennes ont, en collaboration avec les Etats voisins (Turquie et Maroc notamment), "intensifié la logique de répression contre les migrants" là ou la solidarité devrait prévaloir, et privilégient la"criminalisation" du phénomène au sauvetage.
Une politique de fermeture des frontières qui aurait un coût humain, car les migrants empruntent alors des routes plus dangereuses pour tenter de contourner les barrières érigées aux frontières. Une situation notamment constatée dans les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, frontières entre l'UE et le Maroc sur la côté africaine.
A Calais, de nouveaux centres d'accueil et d'orientation ont été ouverts à destination des migrants, "mais en parallèle, les autorités poursuivent leur politique de dissuasion et de répression" relève Gipsy Beley, chargée des questions européennes à La Cimade. A cela s'ajoute le démantèlement de certains camps qui "crée un effet d'entassement, des tensions" et abouti à "un effet de dispersion sur le littoral" du nord de la France et de la Belgique.
Les "hotspots" italiens, censés effectuer le tri entre bénéficiaires du droit d'asile et migrants sont également pointés du doigt. Outre une organisation inadaptée, ils créent une "régression du droit d'asile" car sont gérés par des policiers, fait remarquer Sara Prestianni, membre de l'association italienne Arci. Et de craindre une aggravation de cette situation avec la proposition du ministre italien de l'Intérieur de créé des "hotspots flottants" sur des bateaux ou des plates-formes pétrolières désaffectés.
Des mesures qui témoignent selon le rapport de La Cimade que l'Europe cherche à "empêcher l'accès à (son) territoire à tout prix, même celui de la vie". Refoulements violents à Melilla, enfermements illégaux sous prétexte d'expulsion en France, "militarisation" de la Méditerranée... les associations ne sont pas avares d'exemples de cet état d'esprit. Les lois internationales et nationales "sont contournées et bafouées", résume La Cimade.
Elle dénonce notamment l'accord entre l'UE et la Turquie qui prévoit qu'Ankara accueille les migrants syriens arrivés depuis le 20 mars dernier en Grèce, et qu'ils fassent depuis le territoire turc leur demande d'asile en Europe. Un accord décrié qui préoccupe les associations, faute notamment d'accès aux camps turcs pour évaluer la situation des demandeurs.
Selon le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) de l'ONU, 3.771 personnes ont trouvé la mort en Méditerranée au cours de l'année 2015. Ils étaient déjà 720 fin avril 2016, sachant que l'été est plus propice à la traversée. La Cimade demande donc à l'Union européenne de "tirer les leçons" de ce "coût humain intolérable" pour mettre en place une nouvelle politique.
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