Les dirigeants du G20 se réuniront le 9 et 10 septembre à New Delhi sans Vladimir Poutine ni Xi Jinping pour discuter des crises mondiales "les plus compliquées depuis longtemps"
GÉOPOLITIQUE - Les dirigeants du G20 parviendront-ils ce week-end à un accord sur les nombreuses crises qui divisent le bloc ? Réunis le 9 et 10 septembre à New Delhi en Inde, les 19 États membres du Groupe des Vingt, le principal forum de coopération économique internationale, avec l’Union Européenne, devront surmonter leurs divergences sur la guerre en Ukraine, le changement climatique et l’économie mondiale. En l'absence des présidents russe, Vladimir Poutine, et chinois, Xi Jinping, Joe Biden tentera de renforcer ses alliances.
Visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale pour "crimes de guerre", des accusations "nulles et non avenues" selon le Kremlin, Vladimir Poutine ne se rendra pas à New Delhi. C’est son ministre des Affaires étrangères, Serguei Lavrov, qui le remplace encore une fois, deux semaines après avoir représenté la Russie lors du dernier sommet des BRICS-11 (groupe composé du Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud et de six autres États depuis août, ndlr).
Des absences de poids
Xi Jinping ne sera pas non plus de la partie. Mais son absence à lui est sujette à interrogation. Ce sommet du G20 intervient au moment où les relations entre le pays hôte, l’Inde, et la Chine sont crispées. Leur frontière himalayenne commune, dont le tracé est contesté, a récemment été le théâtre de nombreux incidents entre les armées de ces deux puissances nucléaires. Lundi, des exercices militaires de grande ampleur ont débuté dans le nord de l’Inde. L’opération, "un exercice d’entraînement annuel" selon New Delhi, durera 11 jours et se poursuivra pendant le sommet du G20.
Pékin reproche aussi à son voisin son appartenance au "Quad", un partenariat de sécurité avec l’Australie, le Japon et surtout, les États-Unis. La Chine, dont les relations commerciales et géopolitiques avec Washington sont tout aussi tendues en raison de la question taïwanaise et les nombreuses sanctions américaines, considère cette alliance quadrilatérale comme une tentative de contrer son influence.
Xi Jinping, dont les raisons de l'absence n’ont pas été communiquées, sera remplacé par son Premier ministre, Li Qiang, a-t-on confirmé.
De son côté, le président américain Joe Biden, "déçu" par la décision de Xi Jinping, sera bien présent au sommet du G20, qui représente environ 85% de l’économie mondiale. Il discutera, selon la Maison Blanche, "d'une série d'efforts conjoints pour s'attaquer aux problèmes mondiaux", notamment le changement climatique et "l'atténuation des conséquences économiques et sociales de la guerre menée par la Russie en Ukraine".
Mais l’absence de ses deux homologues russe et chinois fait tache et éloigne même les chances d’aboutir à un accord sur ces questions. La Russie est l’un des protagonistes de la guerre en Ukraine et la Chine, deuxième puissance économique mondiale, est considérée comme l’un des pays les plus pollueurs de la planète, aux côtés de l’Inde. Pékin et New Delhi rejettent les critiques en mettant les pays occidentaux, berceaux de la Révolution industrielle il y a deux siècles, devant leur "responsabilité historique" dans la crise climatique.
"Sans la participation de la Chine, des questions risquent de ne pas voir le jour ou de ne pas aboutir à une conclusion logique", confirme Happymon Jacob, professeur de sciences politiques à l'université indienne Jawaharlal Nehru. La guerre en Ukraine compromet également la vocation première du Groupe des Vingt, à savoir la coopération économique. "Tant que la Russie ne mettra pas fin à cette guerre, ce ne pourra jamais être business as usual", affirme Wolfgang Buechner, porte-parole du gouvernement allemand.
L’Inde, leader autoproclamé du "Sud Global"
Lors d’une réunion des ministres des Affaires étrangères du G20 en mars dans la capitale indienne, la Chine et la Russie ont refusé de signer la déclaration finale exigeant "un retrait des forces russes de l'Ukraine".
Pour le pays hôte, ce sommet est une opportunité de s’imposer comme un acteur mondial de premier ordre. L’Inde, qui fait désormais partie du cercle fermé des grandes puissances spatiales depuis l’alunissage de sa sonde Chandrayaan-3 en août, se définit comme le leader du "Sud Global". Pays fondateur des BRICS, New Delhi, mené par son Premier ministre Narendra Modi, fait pression pour élargir le G20 en accueillant l’Union Africaine. En plus de vouloir servir de "pont" entre les pays développés et les pays en développement, l'un des États les plus peuplés au monde entend également profiter de son appartenance à ce groupe pour réformer les institutions internationales.
En sa qualité de présidente du G20, l’Inde a multiplié dernièrement les efforts pour convaincre les pays membres de surmonter leurs désaccords. Tentatives vaines, à l’image de la réunion des ministres de l’Énergie du groupe en juillet, qui n’a pas abouti à un accord ou une feuille de route visant à réduire le recours aux énergies fossiles.
Un quelconque accord sur la question climatique se heurte par ailleurs à la réticence de la Chine et de l’Inde, dont l’énergie dépend encore du charbon. L’Arabie saoudite et la Russie résistent à l’abandon de combustibles fossiles comme le pétrole afin de ne pas ébranler leurs économies.
Des crises qui divisent ce bloc et qui sont "bien plus difficiles, plus compliquées et plus inquiétantes qu'elles ne l'ont été depuis longtemps", de l’avis du ministre indien des Affaires étrangères, S. Jaishankar.
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