Guerre en Ukraine : vers une guerre mondiale sur le schéma de 1914 ?
L’offensive lancée en Ukraine par la Russie est la plus importante en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Dans le dernier numéro de Spectacle du Monde, qui vient de paraitre en kiosque, l’accent est mis sur les conséquences globales de ce conflit sur le plan militaire et économique, qui ne manqueront pas de bouleverser notre avenir. Le risque militaire majeur : que l’Europe et le monde soient entraînés dans un conflit mondial. Aussi, Maurice Gourdault-Montagne, conseiller diplomatique de Jacques Chirac de 2002 à 2007 ayant négocié au plus niveau avec la Russie, appelle dans ce numéro à mettre immédiatement fin à cette dynamique de guerre qui, par le jeu des alliances, pourrait nous amener à reproduire l’engrenage infernal de 1914.
« Nous refusons de faire la guerre en créant pourtant les conditions de l’affrontement »
Rappelant que le Donbass est en proie à une guerre larvée depuis plus de huit ans, Antoine Colonna, rédacteur en chef du magazine, revient tout d’abord dans un éditorial sur l’échec diplomatique qui a conduit à ce conflit alors « qu’il n’était pas si difficile d’accorder au Donbass un statut similaire à celui de la Catalogne ou de la Wallonie. » Une diplomatie défaillante qui maintient cette triste trajectoire en se matérialisant désormais sous la seule forme de sanctions, dont les effets ébranleront encore plus la stabilité d’une Europe déjà bien entaillée par la crise du Covid-19.
Ces sanctions, souligne le diplomate Maurice Gourdault-Montagne dans son entretien, pourraient indirectement entrainer d’autres pays dans la spirale du conflit russo-ukrainien, bien malgré eux. L’augmentation du prix des produits agricoles et des matières premières pourrait déboucher sur de possibles « émeutes de la faim », notamment en Afrique, des troubles économiques et sociaux aggravés par de fortes perturbations dans les chaînes de production mondiale : la Russie possède la plupart des métaux rares nécessaires pour le fonctionnement des hautes technologies.
« Comprenons bien que la Russie et l’Otan sont sur le point de s’affronter »
Mais c’est sur la dynamique de guerre actuellement à l’œuvre que cet ancien ambassadeur à Pékin, Berlin, Londres et Tokyo a tenu à mettre en garde. Établissant un parallèle avec le système d’alliances qui conduisit en 1914 à la Grande Guerre, il se montre formel : « Comprenons bien que la Russie et l’Otan sont sur le point de s’affronter, entraînant dans leur sillage le reste du monde ». Et de dénoncer : « Nous refusons de faire la guerre en créant pourtant les conditions de l’affrontement ». C’est pourquoi, après avoir livré quelques souvenirs sur la « diplomatie » pour le moins belliqueuse de l’administration de Georges W. Bush au temps où il était en poste, il souligne l’importance du rôle de paix que devrait tenir la France en tant que membre du Conseil de sécurité de l’ONU et puissance nucléaire.
Parmi les différents experts en géopolitique interrogés par le magazine dans le cadre d’une réflexion élargie sur la politique étrangère de la France à l’occasion de cette présidentielle : Igor Ivanov, ancien ministre des Affaires étrangères russes de Boris Eltsine et de Vladimir Poutine. Déplorant, lui aussi, les « lourdes » conséquences qu’induiront immanquablement les sanctions de l’Union européenne, il développe, en vue de ramener de manière réaliste la paix en Europe, la nécessité de réviser le système des relations internationales instauré après 1945. Estimant « illusoire » de procéder autrement comme en « témoigne avec acuité la crise profonde que traversent actuellement les relations entre la Russie et l’Occident », il explique le rôle historique d’architecte de cette unité européenne autrefois portée par la France du Général de Gaulle. Tous ces spécialistes s’accordent sur l’importance du rôle de la France dans les affaires internationales. « Le sait-elle encore ? », demande Antoine Colonna.
Voir aussi : "Il fallait recréer une Russie adverse pour ne pas dissoudre l'OTAN" Général Diamantidis
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.