Olaf Scholz rejette la proposition de Trump d'augmenter le budget militaire de l'OTAN à 5% du PIB
En mauvaise posture après un mandat inachevé et peu reluisant, le chancelier allemand Olaf Scholz lance sa campagne à sa propre succession, à 40 jours des élections législatives anticipées, organisées après la chute fin 2024 de son gouvernement. Pour son premier déplacement, le candidat du Parti social-démocrate, troisième derrière l’opposition conservatrice CDU-CSU et l’AfD selon les sondages, mise sur la carte de “l’émancipation”. Réagissant à la critique du président américain élu Donald Trump, qui a suggéré aux pays européens de consacrer 5% de leurs PIB aux dépenses militaires, Olaf Scholz a annoncé son intention, s’il est réélu, de maintenir le taux actuel de 2%, tel que préconisé par l’OTAN. "Quiconque dit que ce n'est pas la voie à suivre doit également dire d'où viendra l'argent", a-t-il martelé.
Lors de sa conférence de presse la semaine passée dans sa résidence à Mar-a-Lago en Floride, Donald Trump a suggéré aux pays membres de l’alliance transatlantique d’augmenter leurs dépenses militaires à 5%. Se montrant très critique, il a déclaré : "L'Europe ne contribue qu'une infime fraction de ce que nous contribuons". Le républicain a qualifié l’objectif de 2% du PIB de “vol du siècle”.
Varsovie partante, Rome réticente, Berlin offusquée
Sa déclaration n’est pas passée inaperçue et les réactions divergent entre du soutien, de la réticence et du rejet. La Pologne, qui a repris début janvier la présidence de l’UE et dont les dépenses militaires avoisinent déjà les 4,12% de son PIB, a soutenu la suggestion de Trump. Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, ministre polonais de la Défense, a même indiqué que Varsovie "pouvait être le lien transatlantique entre ce défi lancé par le président Trump et sa mise en œuvre en Europe".
Son homologue italien Guido Crosetto a exprimé des doutes sur la faisabilité de la proposition de Donald Trump. Un objectif de 5% serait "impossible pour presque toutes les nations du monde”.
En Allemagne, la réaction est défensive et le ton plus dur. Ralf Stegner, membre du Parti social-démocrate, a évoqué des propos “délirants et vraiment insensés”.
Son chancelier a évoqué la question pour la première sortie de sa tournée électorale, à Bielefeld, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Olaf Scholz, dont l’impopularité atteint des seuils records et dont l’image est aussi bien ternie aux yeux des Allemands que de ses soutiens au parti, a précisé que ces cinq pour cent représenteraient plus de 200 milliards d'euros par an. Or, souligne-t-il, le budget fédéral dans son entièreté n'atteint même pas les 500 milliards d'euros.
Pour justifier sa position, il a déclaré qu’un tel objectif ne pourrait se traduire que par "des augmentations massives d’impôts ou des réductions massives dans de nombreux secteurs".
"Je vous garantis que nous continuerons à consacrer 2 % de notre production économique à la défense", a-t-il affirmé. "Quiconque dit que ce n'est pas la voie à suivre doit également dire d'où viendra l'argent”, suggère le chancelier.
Rutte coupe la poire en deux, Scholz veut redresser sa popularité
Ses concurrents, à savoir les conservateurs de la CDU/CSU, comptent bien donner la priorité aux dépenses de défense lors de leurs campagnes électorales. Le leader de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), Friedrich Merz, donné favori par les sondages, a fait part de son intention, s’il est élu, de dépenser davantage pour la défense. Mais contrairement au ministre polonais de la Défense, il ne se prononce pas sur un taux spécifique. "Les 2, 3 ou 5% ne sont fondamentalement pas pertinents, le facteur décisif est que nous fassions ce qui est nécessaire pour nous défendre", a-t-il expliqué.
Actuellement, aucun membre de l'OTAN ne dépense 5% de son PIB pour la défense. Pas même les États-Unis, dont la contribution en 2024 a été de 3,38% de leur PIB, se classant troisièmes après l’Estonie (3,43%) et surtout la Pologne (4,12%), un fervent soutien de Kiev.
S’il n’est pas allé jusqu’au taux proposé par Donald Trump, le SG de l’OTAN, Mark Rutte, ex-Premier ministre néerlandais et ancien Young Global Leader, propose un taux à 3%. "Pour être honnête, 2% ne suffisent pas pour rester en sécurité dans les années à venir. En tant que parlementaires, vous savez bien que la sécurité n'est pas gratuite", a-t-il déclaré lundi devant des eurodéputés.
Tandis que l’Allemagne est l’un des plus proches alliés des États-Unis en Europe occidentale, aussi bien militairement qu’économiquement, Olaf Scholz semble miser sur une émancipation de Berlin de la Maison Blanche. Du moins, celle de Donald Trump, dont l’investiture est prévue pour le 20 janvier. Le chancelier allemand a d’ailleurs critiqué les sorties de Trump concernant le Groenland, en rappelant "l'inviolabilité des frontières" comme principe fondamental du droit international.
Une tentative qui pourrait bien être considérée comme tardive, et qui ne pourrait sans doute pas, en 40 jours, masquer les crises gouvernementales persistantes depuis son arrivée au pouvoir en 2021 et sa popularité en berne.
Selon les sondages, confirmés en partie par de récents revers électoraux du SPD ces derniers mois, les chrétiens-démocrates et leur candidat Friedrich Merz sont en tête avec environ 30% des intentions de vote. Les sondages placent ensuite l'AfD en deuxième position avec 20%.
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