Réformes de la SNCF : que craignent les cheminots ?
Ouverture à la concurrence, transferts de salariés, embauches hors statut, réforme du régime spécial de retraite, dette... Passage en revue des sujets sensibles à la SNCF qui inquiètent les syndicats de cheminots, avant la remise jeudi du rapport de Jean-Cyril Spinetta.
- La libéralisation du rail
L’ouverture à la concurrence du transport intérieur de voyageurs va porter un dernier coup de rabot au monopole de la SNCF, au plus tard fin 2023.
Aux avant-postes de la contestation, la CGT-Cheminots, premier syndicat, refuse la libéralisation et souhaite au contraire que le "monopole de la SNCF" soit "confirmé pour améliorer le service public". Elle accuse la concurrence d’avoir "tué" le transport de fret, libéralisé depuis 2006 et lourdement déficitaire.
L’Unsa (deuxième) dénonce aussi la "désastreuse" libéralisation du fret. Pour Sud Rail (troisième), la concurrence va "casser" la SNCF et conduire à "la régression sociale".
- Les transferts de personnels
L’ouverture à la concurrence va entraîner des transferts de personnels dès lors qu'une entreprise remportera le contrat d’exploitation d’une ligne. Leur transfert sera-t-il obligatoire ou volontaire?
Le patron de la SNCF, Guillaume Pepy, plaide pour un "transfert obligatoire". "La solution la meilleure", disait-il en décembre, "car elle empêche le nouvel opérateur de choisir les salariés" et "permet à chacun de conserver son emploi dans sa zone géographique".
Les salariés seraient transférés avec un "sac à dos social", contenant une grande partie du statut des cheminots.
La CFDT, quatrième syndicat, vise un "bouclier social" d’un "niveau élevé", avec maintien du statut du cheminot. "Notre souci est de pouvoir sécuriser le salarié", qui doit avoir le choix entre le transfert et "une mutation au sein de la SNCF", demande ce syndicat.
- Quel avenir pour le statut des cheminots ?
La SNCF, divisée en trois Epic (Établissement public à caractère industriel et commercial) depuis la réforme ferroviaire de 2015, compte deux sortes de personnels: les statutaires (90%, plus de 140.000 personnes) et les contractuels. Il faut avoir moins de 30 ans pour être embauché au statut, qui offre la garantie de l’emploi, un régime spécial de retraite, des règles pour la rémunération, le déroulement de carrière, etc.
La SNCF doit "aller plus loin sur les réformes, le statut, la mobilité, le régime de retraite", avait dit Emmanuel Macron en juillet à des cheminots.
Le scénario d'une transformation de la SNCF en société anonyme (SA), de nouveau évoqué récemment, pourrait entraîner "l'extinction du statut", au moins pour les nouveaux embauchés, note une source proche du dossier. Ce fut le cas à La Poste, en 2010, devenue SA pour affronter la concurrence.
Le passage de la SNCF en SA "et la fin du statut pour les futurs embauchés", c'est "inacceptable", tonne la CGT. La CFDT veut également le "maintien du statut et du recrutement aux conditions du statut".
Pour l’Unsa, la convention collective en cours de négociation dans le secteur ferroviaire "devra se rapprocher le plus possible du statut".
- Dette contre retraite ?
La dette de la SNCF pèse lourd, plus de 50 milliards. C’est "une dette d’Etat issue de décennies de politique du tout TGV et de politiques clientélistes d’aménagement du territoire", accuse Sud-Rail.
Si l’Etat "reprend la dette, quel nouveau pacte social la SNCF est-elle prête à avoir?", avait demandé le président Macron en juillet.
La CGT exige sa reprise par l'État "sans contrepartie", c’est-à-dire sans concession sur le statut des cheminots, ni leur régime de retraite, aujourd'hui subventionné par l'Etat.
- Les billets gratuits
Les Facilités de circulation (FC), gratuites ou presque, dont bénéficient tous les agents de la SNCF et leur famille, sont "sans cesse remises en cause", s’inquiète l’Unsa.
"On n’a pas envisagé de changer les règles, ni le périmètre des FC", assure une source interne, proche de la direction. Elles font "partie du pacte social de l'entreprise de la même manière que les billets gratuits chez Air France" et c’est "un sujet tellement sensible".
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