Les traducteurs dans la tourmente face à l’avènement de l’IA
Seront-ils les premiers "remplacés" ? Comme beaucoup d'autres, les traducteurs souffrent de l'amélioration de l'intelligence artificielle (IA), qui semble faire le boulot beaucoup plus rapidement, et presque aussi bien tant que la tâche n'est pas trop ardue. La cadence s’accélère drastiquement, si les fils ne sont pas directement coupés. Comment réagir ?
Au micro de FranceInfo, une traductrice témoigne des difficultés rencontrées dans son métier. Le secteur, affaibli par l’IA, encourage les professionnels à redéfinir leur métier, voire en changer.
Alors que le média envisage cet été de rencontrer différents professionnels, il s’attarde sur le métier de traducteur, qui vient d’obtenir le soutien du CNL à travers une revalorisation du taux de rémunération dans ses dispositifs d’aide.
La traductrice Virginie Maisonobe, après 17 ans de métier, voit les demandes de ses clients drastiquement évoluer. Spécialisée dans la traduction de sites internet, de fiches produits ou de newsletters, elle a dû depuis l’été dernier s’adapter aux demandes particulières des clients.
Elle reçoit à cet effet un mail lui annonçant une modification dans « la façon dont [ils allaient] collaborer ». Sans délicatesse, il lui demande de « relire des textes qu'il aurait lui-même fait traduire par ChatGPT ». Sachant que l’innovation allait à un moment ou un autre toquer à sa porte, elle prend le parti de dire oui. La machine est alors lancée.
Peu de temps après, un autre client se signale en rompant quant à lui tout net le contrat. En quelques mois seulement, la traductrice ne perd pas moins de 60% de son chiffre d’affaires. Bien que ses clients soient satisfaits de son travail depuis longtemps, l’avènement de l’IA vient bousculer le marché et écrase la concurrence par ses propositions à moindre coût. Viriginie Maisonobe, désemparée, affirme que « c’est comme si [s]a compétence et [s]es années d'expérience n'avaient plus de valeur, du jour au lendemain ».
Alors contrainte de faire office de relectrice de l’IA, elle voit aussi la cadence s’accélérer robotiquement.
« La post édition, cela ressemble à du travail à la chaîne. On nous demande de travailler beaucoup plus vite, sur des volumes beaucoup plus importants. On a moins la possibilité de poser des questions au client, lorsqu'il y a un problème de compréhension. »
Face à la redéfinition complète de son métier, l’heure de la réorientation professionnelle a sonnée pour la traductrice. Comme l’indique FranceInfo, celle-ci prend le parti de rejoindre une nouvelle entreprise dans le courant de l’été et cesse donc son activité de freelance. À présent, la voici référenceuse web trilingue. L’occasion de s’adapter aux demandes du marché en s’intégrant à la demande numérique.
La revalorisation du taux de rémunération du CNL paraît alors camoufler une réalité qui risque de déteindre dans le secteur de la traduction littéraire. Ces quelques aides supplémentaires seront-elles vraiment suffisantes pour colmater la brèche de l’IA sur les fiches de salaire des traducteurs ? Et les autres ?
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