A la Gare du Nord, les portiques entre sécurité et agacement
Patiemment, ils attendent au bout des quais réservés aux trains reliant Paris à Bruxelles, Amsterdam et Cologne, que la voie s'affiche sur les écrans. Certains voyageurs, prévenus par la SNCF des nouvelles mesures de sûreté, sont arrivés avec plus de 40 minutes d'avance. Avant l'embarquement, une vingtaine de policiers, CRS et agents de la sûreté ferroviaire se regroupent devant le train. Deux chiens fouillent minutieusement chaque wagon.
Dans le grand hall, égayé par les illuminations de Noël, les voyageurs sont assaillis par les messages sécuritaires, qu'il s'agisse des multiples affiches prévenant du plan Vigipirate ou des haut-parleurs rappelant à intervalles réguliers le "renforcement des contrôles aux frontières".
Après les attentats du 13 novembre à Paris (130 morts) et l'attaque ratée fin août dans un train Amsterdam-Paris, le gouvernement a décidé d'installer des portiques pour les passagers empruntant le Thalys. Ils sont opérationnels à Paris depuis dimanche.
"Tout ce qui peut permettre de faire un voyage sans stresser, c'est impeccable", commente Catherine Segers, une Parisienne prête à partir pour un séjour de 3 jours à Bruxelles avec son compagnon. "Ca me rassure".
Quand le numéro du quai s'affiche, les voyageurs se dirigent prestement vers le train. Quatre couloirs délimités au sol par des bandes blanches s'offrent à eux, menant chacun vers un portique. Des agents de sécurité patrouillent le 21 décembre 2015 à la gare du Nord à Paris
Pour le train de 09h25 à destination de Bruxelles, le premier bagage à passer sur le tapis roulant du scanner à rayon X est un cabas en plastique rose. Pas besoin de se déchausser, d'enlever ses clés, de sortir son ordinateur portable ou de jeter son café. Juste d'ouvrir son manteau. Les réglages précis des machines permettent de détecter armes et couteaux, assure un agent de sécurité.
"Je ne suis pas sûre que ce soit très efficace", remarque Rose-Marie Ferré en franchissant le portique avec une poussette. "Dans un contexte global de surveillance, un jihadiste a été contrôlé trois fois sans être arrêté", souligne cette mère de famille. Avec les nouvelles mesures de sécurité, "les terroristes ont surtout gagné leur paris d'embêter les citoyens".
Si certains passagers sont circonspects, aucun n'est récalcitrant. Les contrôles se déroulent sans heurt, rapidement. Les agents aident à porter sur le tapis roulant les valises les plus lourdes. En 10 minutes, l'essentiel des passagers est passé.
Toutes ces mesures de sécurité, si elles ne sont pas forcément efficaces, "rassurent les badauds, c'est un mal nécessaire", estime Yann Gallet, qui se rend à Amsterdam pour un voyage de fin d'année avec plusieurs collègues. "On s'en est pris plein la tronche il y a un mois. On ne va pas faire les innocents ou les naïfs. On s'adapte".
Richard, un Parisien de 54 ans qui se rend une fois par semaine à Bruxelles pour raisons professionnelles, juge à l'inverse l'installation des portiques d'une "stupidité hallucinante".
"Ce n'est pas la sécurité dans le Thalys qui me préoccupe, c'est celle dans le RER A, la ligne de métro la plus fréquentée du monde, ou celle dans le café où je vais prendre mon croissant", explique-t-il.
"Tout ça parce qu'on pense que les terroristes sont venus de Bruxelles. Mais ils sont venus par la route!" s'agace-t-il en attendant le moment d'embarquer. "Même si ce n'est qu'une demi-heure, on perd du temps, on perd l'avantage du train sur l'avion", regrette-t-il.
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