Paris : la police évacue le bidonville de migrants situé près du métro Stalingrad
Sac sous le bras, les uns terminant une toilette sommaire, se brossant les dents sur un bout de trottoir, les autres déjà prêts, attendant patiemment de monter dans un bus, les hommes, les femmes et les enfants qui occupaient ce campement, devenu le plus gros bidonville de France après l'évacuation de celui de Calais, ont été réveillés avant 6h.
"On emmène les gens où? A Paris ou en province?" s'inquiète Abderrahmane, 19 ans, Guinéen. "Je n'ai aucune idée de où on va. A Paris, à côté, ça me va. L'important pour moi, c'est d'avoir des papiers. Ca fait un mois que j'étais ici dans une tente, c'est bien de partir", explique Khalid, 28 ans.
Sur place, la ministre du Logement Emmanuelle Cosse a confirmé que l'évacuation concernait "entre 3.000 et 3.500 migrants". "On a les places pour héberger tout le monde (...) Ca se passe bien, il y a peu de familles", a-t-elle déclaré à l'AFP. Près de 600 membres des forces de l'ordre étaient mobilisés sur place, selon la préfecture de police de Paris.
Le préfet de la région Île-de-France Jean-François Carenco, a également insisté sur le fait que "c'est une grosse opération", qui vise à orienter ces plusieurs centaines de personnes vers 74 centres d'hébergement en Ile-de-France, plus des gymnases.
Quelque 80 bus devaient faire les rotations vers ces centres. Le premier est parti vers 06H20, a constaté une journaliste de l'AFP.
Cette opération, qui intervient dans la foulée du démantèlement de la "Jungle" de Calais, devrait établir un nouveau record, par le nombre de migrants concernés, dans l'histoire des quelque 30 évacuations menées à Paris depuis un peu plus d'un an par les pouvoirs publics.
Déjà évacué à plusieurs reprises, le campement s'était reconstitué rapidement au cours des dernières semaines, disséminé sur plusieurs centaines de mètres, sous le métro entre les stations Jaurès et Stalingrad, près du canal Saint-Martin et surtout sur le terre plein de l'avenue de Flandres transformé en campement insalubre.
Soudanais, Afghans et Érythréens s'étaient installés dans une myriade de tentes, sur des matelas voire pour les moins chanceux à même le sol, dans des conditions sanitaires et humaines très dégradées. Il y a quelques jours, "une cinquantaine de cas suspects de varicelle" avaient été signalés selon la préfecture, sans qu'il y ait d'urgence sanitaire selon elle.
Ce campement avait déjà connu deux évacuations record ces derniers mois, le 26 juillet (près de 2.500 mises à l'abri) et le 16 septembre (près de 2.100). Au total, près de 20.000 prises en charge avaient été faites par les pouvoirs publics avant l'opération de vendredi.
Mais les évacuations s'étaient ralenties avec l'été, cédant le pas à des contrôles policiers visant à "préserver la salubrité et l'ordre public", mais vivement dénoncés par les collectifs de soutien.
Depuis juin 2015, les campements se sont régulièrement reconstitués dans les quartiers proches de la gare du Nord, alimentés par des arrivées depuis la Méditerranée et des aller-retours entre la capitale et Calais.
Pour plusieurs associations, le grossissement de Stalingrad s'expliquait d'ailleurs par des reports depuis la "Jungle", avec l'arrivée de migrants cherchant un passeur pour la Grande-Bretagne. Une thèse réfutée côté gouvernemental, où l'on met en avant les migrants venant sur ces campements dans l'attente d'une évacuation.
Pour empêcher la reconstitution de ces campements, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a décidé au printemps d'ouvrir un "centre d'accueil humanitaire" dans la capitale. Doté de 400 lits au départ, il accueillera les migrants quelques jours, avant de les répartir en CAO. Mais l'évacuation du campement est un préalable à son ouverture, sans quoi des centaines de personnes à la rue risqueraient de se presser à ses portes dès le premier jour.
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