Semi-conducteurs : l'Allemagne dépense sans compter pour séduire Intel
DÉPÊCHE — Dans sa course aux semi-conducteurs, l'Allemagne a cassé sa tirelire pour séduire le géant américain Intel et le convaincre de lancer la construction d'une usine dans le pays. Une initiative qui s'inscrit dans une ambition européenne : atteindre 20 % du marché mondial des semi-conducteurs en 2030.
Annoncée en mars 2022 et prévue pour le premier semestre 2023, l'usine de Magdebourg (centre-est) tarde à sortir de terre, Intel invoquant des surcoûts liés à l'inflation. Pour répondre à ces inquiétudes, l'Allemagne a accepté de signer un chèque de dix milliards d'euros, soit trois de plus que prévu. Une subvention qui n'est pas du goût de tout le monde.
Intel vaut mieux que deux tu l'auras
Ce site offrira "une expansion majeure de la capacité de production d'Intel en Europe", a assuré dans un communiqué Pat Gelsinger, PDG du groupe américain, saluant le geste du gouvernement allemand.
La subvention représentera près d'un tiers de l'investissement total pour ce projet, désormais évalué à quelque 30 milliards d'euros, contre 17 milliards annoncés l'an dernier. Ce sera "le plus gros investissement jamais réalisé par une entreprise étrangère en Allemagne", s'est réjoui le ministre de l’Économie et du Climat Robert Habeck, qui a bataillé pour obtenir la hausse des aides.
De l'autre côté, le ministre des Finances libéral Christian Lindner, déplorait le fait que l'innovation se fasse aux frais du contribuable : "Il n'y a plus d'argent dans le budget", avait-il asséné début juin. Comme en France, après les largesses nécessitées par la pandémie, puis les aides massives aux ménages et entreprises contre l'inflation, le retour promis à l'orthodoxie budgétaire suscite des tiraillements.
Le "Chips Act" européen
Ce projet d'usine allemande s'inscrit dans le cadre du "Chips Act", le programme de l'Union européenne pour qu'elle atteigne 20 % du marché mondial des semi-conducteurs en 2030, ce qui signifie quadrupler la production européenne actuelle. 43 milliards d'euros d'investissements publics et privés sont mis de côté pour cela.
À ce sujet, Intel avait annoncé en 2022 un programme pouvant aller jusqu'à 80 milliards d'euros investis sur dix ans, notamment pour s'installer aussi en Pologne, en France ou en Irlande.
L'Allemagne se veut le fer de lance de ce mouvement destiné à accroître la souveraineté européenne, spécialement par rapport aux États-Unis. Le chèque à Intel pourrait faire monter les enchères avec d'autres investisseurs étrangers tels que le groupe taïwanais TSMC — l'un des plus gros fabricants du monde de puces.
Là encore, cette stratégie du "quoi qu'il en coûte" fait grincer des dents. "Notre faiblesse concurrentielle par rapport aux États-Unis n'est pas la taille des subventions ou des budgets, mais leur efficacité et l'agilité avec laquelle nous utilisons les fonds disponibles", a critiqué lundi le ministre des Finances allemand.
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