Un séjour découverte de la chasse à courre pour s'opposer aux "préjugés"
Entre les murs épais de l'ancienne abbaye du Val des Choues, Michel et Inès Monot accueillent les visiteurs venus découvrir la chasse à courre, soignant l'image d'un "patrimoine culturel" face aux "préjugés" de ses opposants.
Au petit matin, les valets de limier ont été "faire le bois", arpentant la forêt de Châtillon (Côte d'Or) en compagnie d'un chien expérimenté (un limier) à la recherche de traces de sangliers.
L'imposante abbaye tout entière se prépare à la chasse sous le regard curieux de ces spectateurs.
"Toute cette activité, les chiens, les chevaux, la tradition avec l'équipage en tenue: ce sont des choses qui m'émerveillent", commente Daniel Tourneroche, retraité de 74 ans venu de la région parisienne avec sa femme et un couple d'amis.
Dans le chenil, ce sont les aboiements excités des grands anglo-français tricolores ou des poitevins qui composent la meute dont une cinquantaine - environ un tiers - participera à la chasse.
Les "boutons" (chasseurs membres de l'équipage) se présentent à cheval, épingle à la cravate, redingote "grise à parements bleu marin". Certains portent la trompe de chasse en bandoulière.
Aux quelques dizaines visiteurs par an venant suivre une chasse à courre, Michel Monot veut "transmettre une meilleure image de cette passion", régulièrement ciblée par ses opposants qui dénoncent une pratique "cruelle" ou "archaïque".
- "Fossé" entre ville et campagne -
Deux propositions de loi pour l'interdire, comme c'est déjà le cas en Angleterre ou encore en Allemagne, ont ainsi été déposées, fin 2017 et début 2018, par des parlementaires de plusieurs groupes, mais n'ont pour l'heure jamais été inscrites à l'ordre du jour.
"Aujourd'hui, on est à la croisée des chemins. Si on veut convaincre nos concitoyens du bien fondé de la chasse, il faut la leur faire découvrir", selon M. Monot, pour qui elle doit se pratiquer "dans l'éthique" et avec "un profond respect par rapport à l'animal".
"On est confronté au quotidien à un grand fossé entre les gens qui vivent dans les villes et ceux qui vivent encore dans les campagnes. Si on ne porte pas un soin attentif à la communication, trop de préjugés, trop d'a priori feront qu'on risque de disparaître."
Lorsque la chasse s'élance, les visiteurs sont conduits en voitures à travers la forêt par les valets de limiers, qui tentent de les amener aux points de passage de la meute et des cavaliers. Quelques habitués suivent dans leur propre véhicule ou en vélo électrique.
Arrêtés au bord d'une route à la lisière de la forêt, dans la brume, tous sont aux aguets. On entend, au loin, les chiens. De temps en temps, on retrouvera la meute, suivie par les cavaliers. Certains verront des sangliers.
- Bredouilles -
"Je ne suis pas chasseur, mais j'adore la nature. C'est le cycle de la vie: quand il y a naissance, un jour ou l'autre, c'est la mort. Ça fait partie de la nature", philosophe M. Tourneroche, qui fait valoir que dans la chasse à courre "l'animal a sa chance aussi".
Après plus de cinq heures, l'issue de la chasse lui donne raison: l'équipage rentre bredouille et la meute des chiens est éparpillée dans une partie de cette forêt grande comme Paris.
Denis Brajon, 55 ans, a vécu le même épilogue la semaine précédente. "Je n'y allais pas pour voir la capture d'un animal", précise ce chasseur (au fusil) de Lozère. "C'est quand même la chasse la plus ancestrale qui soit et le nombre de prises est vraiment dérisoire compte tenu de l'investissement demandé."
"On prend un sanglier une fois sur trois", confirment les veneurs (chasseurs à courre), qui répètent à l'envi que la vénerie n'est en fin de compte "pas très meurtrière".
Pour Daphné Fougea, 23 ans, c'est surtout "une passion que mes parents m'ont transmise" et qu'elle espère, un jour, passer à ses propres enfants.
"Mon grand-père m'a dit un jour +ne te passionne pas trop pour la chasse à courre, parce que je pense que l'année prochaine on ne chassera plus+. C'était déjà au tout début des années 2000 et aujourd'hui on chasse encore."
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