Jean Nouvel porte plainte contre la Philharmonie, qui lui réclame 170 millions d'euros
Les Ateliers Jean Nouvel ont porté plainte pour "concussion" et "favoritisme" contre la Philharmonie de Paris, qui réclame à l'architecte 170 millions d'euros en raison du dérapage budgétaire survenu lors de la construction de la salle de concert, a-t-on appris lundi de sources concordantes.
Dans sa plainte, déposée le 14 octobre auprès du parquet national financier, le cabinet fondé par l'architecte Jean Nouvel conteste "vigoureusement" la demande financière adressée par l'établissement public Philharmonie de Paris, jugée "exorbitante" et "injustifiée".
A l'origine de cette créance: l'envolée du coût de la prestigieuse salle de concert parisienne, passé de 173 millions d'euros lors du lancement du projet en 2006 à 386 millions d'euros lors de son inauguration en janvier 2015.
Selon les Ateliers Jean Nouvel, ce dépassement s'explique par la gestion défaillante du projet par la Philharmonie elle-même. Pour cette dernière, il est au contraire imputable à l'architecte, accusé d'avoir fortement sous-évalué le coût du chantier et d'avoir effectué des "modifications permanentes".
En avril 2017, l'établissement chargé de gérer la salle a ainsi adressé une facture de 170,6 millions d'euros à l'architecte. Cette demande, confirmée par "titre exécutoire" en septembre 2017, comprend des pénalités de retard évaluées à 91 millions d'euros.
Pour les Ateliers, ce montant "est totalement disproportionné non seulement dans l'absolu mais aussi par rapport aux sommes qui ont été effectivement perçues" par l'architecte, à savoir 12 millions d'euros d'honoraires, selon la plainte consultée par l'AFP.
"Les faits sont d'autant plus inhabituels que" la Philharmonie "a fait le choix de poursuivre uniquement le maître d'oeuvre, à l'exclusion des entreprises. Ce traitement différencié ne trouve aucune explication légitime", écrivent les avocats de l'architecte, Me William Bourdon et Vincent Brengarth.
Pour eux, la demande de la Philharmonie relève de la "concussion", à savoir la perception par un agent ou un établissement public de sommes qu'il sait être indues.
Les avocats dénoncent également des faits de "favoritisme" pour des ordres de service passés avec l'entreprise Bouygues, sélectionnée sans l'accord de l'architecte. Ils accusent enfin la Philharmonie de "faux et usage de faux" pour avoir signé des document de chantiers avec l'en-tête du cabinet d'architecte, après sa mise à l'écart.
Jean Nouvel et la Philharmonie sont engagés dans un bras de fer médiatique et judiciaire depuis l'inauguration du 14 janvier 2015, à laquelle l'architecte avait refusé de participer, mécontent de la façon dont s'était terminé le chantier.
Le prix Pritzker 2008, qui se considère évincé du projet et donc libre de s'exprimer, a été jusqu'à parler de "sabotage", accusant le directeur de la Philharmonie d'avoir pris des décisions "désastreuses" au cours du chantier.
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.