La Science est un sport de combat, du Professeur Didier Raoult

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Coccyxgrue pour France-Soir
Publié le 30 décembre 2020 - 11:50
Mis à jour le 28 décembre 2020 - 11:50
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La science est un sport de combat par Didier Raoult
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Didier Raoult
La Science est un sport de combat, du Professeur Didier Raoult
Didier Raoult

Retour sur le second livre paru en 2020 de Didier Raoult, héraut du mouvement littéraire de la « rassuritude ». Une idée de cadeau à prix modique en cette période de vaches non pas folles mais maigres. Un livre qui, en dehors de l'épidémie actuelle, permet de comprendre la conception de la science du professeur.

« La médecine, c'est le soin, c'est donner un traitement à des gens qui sont malades. »

Après Épidémies. Vrais dangers et fausses alertes, le Pr Didier Raoult est devenu une personnalité de 1er plan du covidisme, cette maladie mentale provoquée par « la Covid-19 » comme il faut désormais dire. Je vous renvoie à mon article sur ce précédent ouvrage pour la présentation de l'auteur, ce dangereux charlatan qui empoisonne les gens à l'hydroxychloroquine et les teste massivement avec résultats en moins de 24 h, et sans file d'attente. Si quelqu'un connaît Véran, le docteur qui prône paracétamol, camomille & Rivotril, merci de l'informer de l'existence du Pr Raoult, rebouteux phocéen qui ne se maquille pas et ne se déplace pas pour passer à la télé. Il livre dans cet essai érudit mais écrit dans une langue facile d'accès, sa conception de la science et de la question délicate de la vérité scientifique. Il s'agit de ce qu'on appelle épistémologie, c'est-à-dire une partie de la philosophie qui étudie l'histoire, les méthodes, les principes des sciences. Le professeur brasse large et argumente en citant, au-delà de la littérature médicale, des livres, des films, tout ce qui lui tombe sous la main, pour réfléchir sur la science. Un livre qui souscrit à la devise du site de l'IHU dirigé par ce dangereux rassuriste de la pensée : « Nous avons le droit d'être intelligents ! » À noter que certains chapitres reprennent d'anciens écrits du professeur, livres ou chroniques pour Le Point. Le titre est sans doute une allusion à L'Anthropologie n'est pas un sport dangereux, de Nigel Barley.

Dans ce livre, il est peu question de la Covid-19, mais Raoult subsume sa philosophie de médecin dans un beau paragraphe vers la fin du livre, par lequel je souhaite ouvrir cet article : « Nombre de médecins ont sauvé beaucoup de gens sans comprendre comment ils les sauvaient ; c'est une des bases de la médecine, les interprétations a posteriori : les raisons pour lesquelles ils les ont sauvés sont parfois justifiées, parfois elles ne le sont pas, mais l'important pour le médecin, c'est d'essayer, dans les situations désespérées, de trouver une solution. C'est ce que j'ai fait pendant l'épidémie de Covid-19. La médecine, c'est le soin, c'est donner un traitement à des gens qui sont malades. Ce n'est pas leur dire : « Rentrez chez vous et, si vous n'arrivez plus à respirer, venez à l'hôpital. » La médecine, ce n'est pas cela. Il fallait prendre en charge ces gens. Ce que j'ai fait à Marseille. Et, à chaque fois, on ne me parlait que d'essais, de protocoles randomisés. La très bonne recherche, je sais ce que c'est ; j'ai passé ma vie à en faire. Mais il y a un temps pour tout. Il y a un temps pour la recherche et un temps pour la médecine. Un patient, c'est un malade, pas un objet de recherche. J'ai donc soigné, en tenant compte de l'état des connaissances, et en prenant le moins de risques possibles pour mes patients. Je les ai soignés comme je l'aurais fait pour ma famille ».

Tout est dit, et personnellement je persiste et signe, je refuse et refuserai toujours de sortir de cette conception raoultienne (et pas seulement, heureusement !) : les maladies se soignent avec de la médecine, c'est-à-dire des soins et des médicaments administrés par des médecins et des soignants, point barre. Les applis, les drones, les chiens renifleurs, le « tracer », tout cela c'est la dictature, et il est de première urgence de le refuser, et de revenir à Hippocrate.

 

Scène de générique du futur biopic sur Raoult

Raoult prône le goût de la découverte et des erreurs, qui permettent d'avancer en science, et il tente d'abord d'inventorier toutes les œillères qui nous empêchent de réfléchir librement. Il revient sur le sida, qu'il eu à traiter comme jeune infectiologue, et en retient la leçon de l'intérêt de nommer les choses correctement, surtout quand il est question de sexualité. Il ne cesse de montrer par des exemples à quel point toutes les hypothèses scientifiques en cours sont des erreurs que chaque découverte vient remettre en cause pour peu qu'on ait l'esprit scientifique.

Je cite intégralement une page magnifique sur la « dépendance au sentier » (le fait de ne pas sortir des sentiers battus) : « La dépendance au sentier, ou « path dependence », en particulier dans les domaines juridiques et des sciences sociales, décrit l'influence in consenti des éléments du passé dans nos comportements, qui se reproduisent par eux-mêmes. L'exemple le plus clair est celui des chevaux français. Lorsqu'on fait de l'équitation, en groupe, à la campagne, j'ai remarqué que nos chevaux avaient une volonté extrêmement ferme d'avancer au même rythme et en se suivant très précisément les uns les autres sur le même sentier. C'est quelque chose dont j'ai horreur car je veux rester maître de ma destination et j'ai beaucoup gêné ma famille en forçant mon cheval à sortir du chemin que lui traçait son prédécesseur, ou à l'obliger à faire du galop quand les autres faisaient du trot, puis à faire du pas quand les autres étaient au trot ou au galop. C'est très difficile en France, car les chevaux utilisés pour les balades sont moutonniers et ont une mentalité grégaire. Quand l'un part au galop, les autres suivent, même si leur cavalier ne le leur demande pas. Je ne suis pas un très bon cavalier, mais cela m'irrite particulièrement. Aux États-Unis, les chevaux se comportent différemment. Chacun peut faire à son aise du trot, du galop ou du pas, sans que les autres chevaux s'en émeuvent, et chacun, individuellement, continue à avancer à son propre rythme et sur un itinéraire qu'il a choisi. J'ignore si c'est là le reflet d'une mode d'élevage (et donc de civilisation) différent ou de l'évolution spécifique des races de chevaux. Il est en tout cas clair, de mon point de vue, que la capacité que nous avons, par analogie, à nous insérer simplement dans la file formée par nos prédécesseurs et à adopter le même rythme que nos pairs ou, au contraire, d'essayer de déterminer les choses par nous-mêmes, influe sur l'inventivité ».

Si l'on me confiait la rédaction du scénario d'un biopic sur Raoult, nul doute que ce serait là ma scène de générique, calquée sur Quarante tueurs de Samuel Fuller, avec Luchini galopant cheveux au vent vers une crête qui se rapprocherait et s'éloignerait à la fois… Pour rester dans le cinéma, Didier Raoult me rappelle aussi Doctor Bull (1933), film de John Ford avec Will Rogers.

Les confidences biographiques sont d'autant plus appréciables qu'elles sont parcimonieuses, et je vous laisse les découvrir. Contre Darwin, Raoult est un partisan de la théorie des catastrophes et des aléas : « On pense par exemple que la bataille de Bouvines a été un élément fondateur de l'histoire de France ; en réalité, l'histoire de France est le fruit du hasard, de quelques événements imprévus. Ici, la pluie ; ici, une épidémie ; ici, un terrain boueux… Tous ces éléments ont joué un rôle dans le destin et l'histoire du monde. Croire que les choses devaient s'organiser ainsi parce qu'elles allaient dans le sens du progrès ou de l'Histoire, ou dans un meilleur état, est une illusion progressiste qui prête à sourire. En pratique, encore une fois, ce que l'on observe n'a rien à voir avec la déduction qui a été faite dans la théorie de l'évolution de Charles Darwin. De ce point de vue, les mathématiques actuelles appliquées à la prévision ont une arrogance contredite par tous les principes de la mécanique quantique, qui montrent que les événements chaotiques sont imprévisibles ».

Sur ses méthodes de recherche, il évoque sa « technique JNSP » – qui signifie « je ne sais pas ». Il insiste sur le fait que contrairement aux idées reçues, le cancer est souvent une maladie infectieuse, et exprime une évidence qui pourrait s'appliquer au Covid : « Mais l'accroissement du nombre de cancers est essentiellement lié à l'allongement de la vie. […] on meurt effectivement toujours de quelque chose au XXIe siècle et, quand on meurt vieux, on meurt plus fréquemment d'un cancer ou d'une maladie artérielle ou cardiaque ».

Le Pr Raoult fait l'apologie du vin en se basant sur des études publiées : « Pour résumer, l'excès d'alcool a des inconvénients : un certain nombre d'accidents de la route, de même que certains cancers et maladies chroniques. En contrepartie, l'alcool exerce un effet protecteur tout à fait spectaculaire sur les problèmes cardiovasculaires. Le résultat général est qu'une consommation modérée de vin allonge l'espérance de vie d'une manière très significative. » Il critique la notion de seuil pour les risques : « On arrive à un paradoxe au niveau de l'alcool : il n'y a pas de seuil, donc on considère que l'alcool est cancérigène depuis sa première goutte ! » Cela a de quoi rassurer, car la prohibition de l'alcool dans tous les domaines de la vie sociale à l'heure actuelle fleure un peu trop l'islamisation rampante, comme ces préfets qui se sont mis à l'interdire ici ou là sous prétexte de Covid.

Ce livre propose des réflexions iconoclastes sur de nombreux sujets, et vous saurez même tout sur les « trayeurs de verge » ! Une réflexion sur le paludisme appelle à la modestie sur les fausses bonnes idées : « Enfin, les moustiquaires constituent en soi un outil mécaniquement remarquable pour combattre le paludisme. Si l'on met une moustiquaire sur son lit, comme les anophèles piquent la nuit, nous devrions être protégés. Cette technique a parfaitement fonctionné pendant quelques années. Toutefois, une étude réalisée dans l'équipe de paludisme de mon unité a observé un rebond dans la maladie, lié en partie au changement de mœurs des anophèles, qui dînent plus tôt ! Ces moustiques qui piquaient majoritairement pendant la nuit ont commencé à être actifs dès 19 heures puisque « le restaurant humain » leur était fermé à partir de 22 heures ».

Didier Raoult montre une tolérance rare en médecine : « Pendant plusieurs siècles, certains praticiens avaient des réputations exceptionnelles, bien que la pharmacopée fût ridicule. Nous négligeons cette partie de notre métier et je pense que c'est une erreur. En tout cas, celle-ci renaît dans des formes alternatives, qui montrent bien la nécessité de ces soins non basés sur une rationalité claire », et des réflexions politiquement incorrectes : « Nous sommes une civilisation eugénique, mais nous ne voulons pas nous l'avouer, le terme ayant une connotation insupportable puisqu'il a été récupéré par le nazisme. Toutefois, en pratique, le diagnostic anténatal n'est jamais que de l'eugénisme. Supprimer un fœtus parce qu'il sera malformé, parce qu'il a une anomalie dont on ne sait si elle sera réparable dans les vingt ou trente ans qui viennent, est purement et simplement de l'eugénisme ».

Parmi les réflexions à rebrousse-poil, j'en apprécie une sur le fait que la disparition des punitions corporelles n'est pas forcément un progrès, car il note que plus les agressions baissent, plus on emprisonne de gens pour « un certain nombre de faits répréhensibles, qui nous apparaissent maintenant évidents et qui, avant, étaient dérisoires ». Il remarque de façon iconoclaste que dans les pays où la charia coexiste avec un code civil, les criminels choisissent souvent la charia : « Je dois reconnaître que, dans la même situation, si pour un délit ou un crime, on me proposait le choix entre dix coups de bâton ou six mois de prison, je choisirais très certainement des coups de bâton ». Eh bien soit : cent coups de bâtons administrés par Véran pour rassurisme et pour avoir osé soigner les gens plutôt que les tracer !

Raoult explique sa position sur les prévisions épidémiologiques (et ceux qui n'ont pas lu ses livres et ne le connaissaient pas avant la crise actuelle se sont mépris sur son attitude). Il évoque avec humour l'épisode de la « vache folle » : « Il était prévu quelques centaines de milliers de morts en France et nous en avons eu trois ! L'amplification médiatique qui a montré en boucle les trois malades a fini par affoler la population, qui s'est arrêtée brutalement de manger de la viande ! On m'a empêché (ce qui est beaucoup plus grave) de manger des ris de veau pendant trois ans, en raison du principe de précaution imposé par l'État français, pour un choix qui ne regardait que moi ! […] L'État, qui est de plus en plus dictatorial pour notre santé (comme jamais aucun État ne l'a été dans l'histoire de l'humanité), m'a interdit de me faire plaisir avec mon plat préféré, au nom de folies mathématiques ».

 

Retour sur « Les bignoles de l'info »

Au terme de cet article, je voudrais revenir sur mon premier article pour France-Soir. J'avais signalé l'attitude d'un commissaire politique (« administrateur » en novlangue) des khmers bleus de la Wikisphère, qui après que j'eus introduit une poignée de citations de ce livre, avait posté un message signalant que « cette personne est trop clivante pour être citée sur des mots anodins comme grippal, babouin, technologie, imprévisible, etc. ». Suite à mon article, ils n'ont rien retiré de leur délire dans l'article sur le film Hold-up, mais ce commissaire politique dont le nom m'échappe (quelque chose comme « Loubianka » je crois) s'est précipité comme la vérole sur le bas-clergé pour supprimer tous les exemples que j'avais mis, sans les remplacer par d'autres, y compris pour des articles où il n'y avait pas d'exemple ! Je l'ai dûment remercié, et voici notre échange cordial :

« Loubianka » : « @Coccyxgrue : Vous avez continuez de contribuer alors qu'on vous a prévenu que c'était pas une bonne idée de le faire de cette manière-là. J'ai laissé les citations dans les spécialités médicales pour justement seulement me baser sur un aspect neutre. Et vous m'insulter sans chercher à comprendre ce que j'ai fait ni pourquoi, parce que oui, on aurait pu en discuter calmement. La contribution n'est plus votre objectif et c'est dommage ».

« Coccyxgrue » : « Décidément ce khmer bleu de la wikisphère est fâché avec l'orthographe, ce qui est fort étonnant pour un contributeur sur un dictionnaire dont la préoccupation semble plutôt la censure que l'illustration de la langue française. On n'écrit pas "Vous avez continuez" mais "continué", ni "Et vous m'insulter" mais "m'insultez". Très cordialement. »

Étonnamment, « Loubianka » a retiré ma réponse, qui se retrouve nonobstant dans l'historique de sa page de discussion, mais n'a pas corrigé ses fautes ! Un autre contributeur nommé « Noé » est d'ailleurs allé annuler quelques annulations de « Loubianka », mais pas toutes. Il s'agit d'un « administrateur » et « patrouilleur ». Si la milice des khmers bleus se met à contrôler ses commissaires politiques, cela va ressembler à La Grande patrouille ! Je me suis amusé à annuler les autres annulations de « Loubianka », pour continuer à rigoler, mais désormais mes contributions à France-Soir me prennent tout mon temps libre, et je n'ai plus aucun désir de travailler pour Bill Gates, qui est le véritable propriétaire de Wikipédia comme de l'OMS. Un contributeur sur Wikipédia en anglais nommé « Cvrx » a posté un message en français pour témoigner d'une expérience similaire à propos de l'article sur François Asselineau, en citant des extraits de mon article.

Voilà. Bonne lecture pour ces nombreuses soirées où nous serons encore privés de vie sociale, à moins que…

Si vous aimez ce livre vous aimerez aussi Chloro King, la BD de Dadou consacrée au Pr Raoult.

 

La Science est un sport de combat, du Professeur Didier Raoult, humenSciences, 2020, 452 p., 22 €

Coccyxgrue a intégré l'équipe de France-Soir suite à ses mésaventures avec Wikipédia

 

 

 

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