En Ile-de-France, les collégiens favorisés et défavorisés n'ont pas les mêmes profs
Moins d'enseignants titulaires, des profs plus jeunes et des équipes pédagogiques moins stables: les collégiens des quartiers défavorisés en Ile-de-France bénéficient de conditions de travail moins favorables que ceux des zones plus privilégiées, avec à la clé une inégalité dans les acquis scolaires, souligne une étude.
Le Conseil national d'évaluation du système scolaire (Cnesco) a regardé "au plus près" les ressources humaines des 874 collèges publics de l'Ile-de-France, une vaste région que les chercheurs ont découpée en quartiers rassemblant des populations à coloration sociale assez proche, de 2.600 habitants en moyenne.
Ces travaux, menés pendant deux ans et publiés mercredi, mettent en lumière les inégalités territoriales dans l'éducation dans les académies de Paris, Versailles et Créteil. L'étude laisse de côté les collèges privés, les chercheurs n'ayant pas pu obtenir les données statistiques à leur sujet.
Les contractuels (enseignants non titulaires) représentent 5,5% des professeurs de collèges des territoires parisiens et de banlieue (Neuilly-sur-Seine et Boulogne) très favorisés, contre 13% en moyenne dans les territoires franciliens cumulant le plus de difficultés socio-économiques.
Au sein de cette dernière catégorie, l'étude note des différences entre les départements. Ainsi, le taux de contractuels est proche de 18% dans le Val-d'Oise et de seulement 7,4% en Seine-et-Marne.
Autre élément étudié, l'âge des professeurs. Là encore, les collèges de Paris, Neuilly et Boulogne se distinguent, avec seulement 9,6% de leur corps enseignant âgé de moins de 30 ans. Ces jeunes profs représentent en revanche plus du quart des effectifs en territoires défavorisés et plus de 30% en territoires cumulant le plus de difficultés socio-économiques.
Un phénomène connu, puisque les jeunes profs du secondaire sont souvent affectés dans les territoires les moins attractifs en début de carrière, mais que cette étude permet d'évaluer précisément.
- Des résultats au brevet très différents -
Le Cnesco a ensuite mesuré la stabilité des équipes enseignantes au sein des établissements, élément fondamental dans la réussite scolaire des élèves selon les chercheurs en France et à l'étranger.
La part des enseignants affectés dans le même établissement depuis au moins huit ans est de 28% des territoires parisiens et de banlieue (Neuilly-sur-Seine et Boulogne) très favorisés, 30% dans les banlieues résidentielles favorisées, 22% dans les quartiers défavorisés et 17% dans les quartiers les plus défavorisés.
Les chercheurs du Cnesco ont aussi passé au tamis les résultats du brevet 2017, l'examen national que passent les élèves en fin de Troisième.
Si l'écart de résultats entre les élèves des quartiers les plus favorisés et ceux des plus défavorisés est relativement faible (89% de réussite pour les premiers, 83% pour les seconds), le constat est très différent lorsqu'on ne prend en compte que les notes des épreuves écrites nationales (qui représentaient 50% de la note finale, les 50% restant provenant du contrôle continu pendant l'année scolaire).
Ainsi, en se basant seulement sur les notes des épreuves finales, 56% des élèves de Paris, Neuilly et Boulogne obtiendraient l'examen, contre seulement 23% dans les quartiers les plus défavorisés. Ces chiffres montrent donc une inégalité dans les acquis scolaires.
L'étude note aussi des différences entre les départements. Ainsi, dans les Yvelines, les collégiens des quartiers les plus favorisés réussissent mieux aux épreuves finales du brevet que la moyenne francilienne des enfants favorisés. Mais les élèves les plus défavorisés dans ce département affichent un taux de réussite de seulement 15% (contre 23% en moyenne dans ce type de quartiers en Ile-de-France).
Le Cnesco se garde de tirer des conclusions hâtives à partir de ces données mais émet plusieurs recommandations pour accompagner les professeurs débutants et stabiliser les équipes: tutorat, formations spécifiques pour les jeunes enseignants souvent affectés dans les quartiers les moins favorisés, y compris "une formation aux codes culturels" dont les jeunes professionnels sont souvent éloignés, aides au logement ou places en crèche...
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