Jacline, la Bretonne par qui tout a commencé ou presque
Accordéoniste musette, hypnothérapeuthe et agent de sécurité incendie pour les "fins de mois difficiles", Jacline Mouraud, égérie inattendue de la contestation populaire du 17 novembre, a ouvert une boîte de Pandore qu'elle ne compte pas refermer de sitôt.
A l'entrée du pavillon où vit cette mère de trois grands enfants, qu'on appelle Jacline avec un c "par coquetterie", l'affiche "Stop-linkisation" sur le compteur donne le ton. Horripilée par "la traque aux automobilistes", Jacline, à l'origine d'une vidéo virale de 4min38, vue plus de six millions de fois sur Facebook, n'a "pas envie d'être un mouton".
A 51 ans, cette native de Guérande qui tombe surtout amoureuse de militaires, n'a pas vu arriver la célébrité, elle qui ne possède "rien sauf sa voiture" et vit avec moins de 1.000 euros par mois. Son SUV diesel noir, acheté 11.000 euros il y a 10 ans, est sagement garé sur le parking du lotissement de Bohal (Morbihan), le gilet jaune sur le tableau de bord.
Si la musicienne avait déjà eu sa photo en 2014 dans la presse locale pour avoir composé un nouvel hymne national, choquée par les paroles sanglantes de La Marseillaise, la Bretonne au sourire Ultra-Brite écume aujourd'hui les plateaux télé et assure avoir perdu "trois kilos" depuis que les journalistes ne peuvent plus se passer d'elle.
Elle trouve tout de même "qu'il y a un problème" à se voir invitée, elle, "la personne lambda", pour débattre à la télé avec des députés. C'est encore "à Jacline Mouraud" en personne que la secrétaire d'Etat Emmanuelle Wargon a répondu dans une vidéo postée sur Twitter.
Branchée directement sur le canal de l'Elysée, Jacline doit pourtant encaisser, du fond de sa campagne, les portraits peu flatteurs qui la brossent en illuminée poujadiste. La presse a ainsi exhumé son intérêt pour le paranormal et les séances d'ectoplasmie en compagnie de Michelle, "médium à effet physique".
- "Miroir aux alouettes" -
Prenant soin de ne jamais prononcer le mot "fantôme", elle s'en remet à François Mitterrand qui déclarait, un an avant sa mort, "croire aux forces de l'esprit". Son intérêt pour les "chemtrails" l'a également cataloguée dans la catégorie des complotistes. "Je m'en fiche", balaye la quinqua.
Si son entourage vit "plutôt mal" cette si soudaine célébrité, Mme Mouraud se sent investie d'une mission qui va bien au-delà des voitures. De fait, elle est devenue en quelques semaines sur les réseaux sociaux la confidente de ceux qui se sentent abandonnés: une retraitée de 71 ans qui "ne peut plus manger après le 10 du mois" et "n'attend plus que la mort" ou encore une femme de 36 ans qui vit avec 515 euros par mois avec deux enfants.
"Vous croyez que je vais les laisser tomber ?", s'indigne-t-elle. "Tant qu'on me donnera la parole, je parlerai de ces gens". Que veut-elle alors, au juste ? "Les gens qui ne +sont rien+ demandent de pouvoir vivre dignement", réplique celle qui a comme lecture "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent".
Les mesures annoncées mercredi ? "Un miroir aux alouettes", selon elle. "Comment peuvent-ils être aussi obtus ? On taxe, on aide, on taxe les aides et on recommence, le Premier ministre a juste réussi à exacerber la colère des Français", assure celle qui entend créer, le 17 novembre, le "plus grand parti de France, celui du peuple".
Les liens entre gilets jaunes, les déçus de Marine Le Pen et ce retraité membre du groupe identitaire Les Barjols qui est soupçonné d'avoir voulu s'attaquer au président Macron ? Jacline n'est pas au courant et n'est de toute façon "pas responsable de tous les citoyens français". "Si quelqu'un se montre violent, samedi, il sera tout de suite remis en place", assure la Bretonne, qui sera transportée à moto, d'un point de blocage à un autre.
"Je connais des gens qui veulent bloquer plusieurs jours", souligne Jacline, qui n'a aucune envie d'offrir une porte de sortie au gouvernement et trouve "hallucinant de voir comment les gens se sont fédérés pour s'organiser sans personne".
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