A la gare de Lyon, les cheminots votent pour "délégitimer" la réforme
"Pour ceux qui veulent voter, l'urne est ici!": à la gare de Lyon, à Paris, les cheminots grévistes ont joué lundi le jeu de la "vot'action", une consultation "symbolique" qui entend "délégitimer" la réforme ferroviaire et son "principal acteur, Guillaume Pepy".
11H00, lundi: les cheminots arrivent au compte-gouttes, sous une pluie fine et continue, pour participer à l'assemblée générale qui se tient dans un ancien centre de tri postal aux murs décrépis, au bout de la voie 23.
A l'entrée de la cour intérieure, une militante de la CGT-Cheminots s'époumone pour inciter les nouveaux arrivants, munis de chasubles, drapeaux et mégaphones, à voter. "Pour ceux qui veulent voter, l'urne est ici !", dit-elle, bulletins de vote en main.
"Est-ce que tout le monde a voté?", crie à ses côtés un autre gréviste portant un pull noir "Fier de lutter, fier d'être à la CGT". "Je suis juste un militant, je leur rappelle qu'il faut voter... Mais je ne leur dis pas ce qu'il faut voter!", glisse-t-il dans un sourire aux journalistes présents.
Les quatre syndicats de la SNCF ont lancé lundi et pour une semaine cette consultation qui n'a aucune valeur légale, avec une question: "Êtes-vous pour ou contre le pacte ferroviaire porté par le gouvernement?"
Avant l'AG de la gare de Lyon, les grévistes se pressent pour obtenir un bulletin de vote, signer la liste d'émargement (nom, prénom et numéro de matricule) censée empêcher les fraudes, et glisser le petit bout de papier dans l'urne.
"Ça fait 15 ans que j'ai pas voté!", rigole un cheminot.
- "Symbolique et médiatique" -
Pour Béranger Cernon, secrétaire général de la CGT-Cheminots à la gare de Lyon, "les agents apprécient énormément" la consultation, à la portée "symbolique et médiatique", parce que "ça fait des mois et des mois (...) qu'on nous explique que les cheminots n'ont rien compris à la réforme".
Après le vote, l'assemblée générale démarre: une grosse centaine de personnes se massent à l'intérieur d'une petite salle, ouverte pour échapper à la pluie, tandis que d'autres patientent à l'extérieur.
"Pour une grève censée être morte..." s'amuse Fabien Villedieu, représentant SUD-Rail à la gare de Lyon, en constatant la forte affluence du jour.
Au micro, les deux leaders syndicaux saluent le taux de grévistes "quasiment historique" recensé en cette journée voulue "sans train et sans cheminots", fustigent le patron de la SNCF Guillaume Pepy -- "menteur", "porte-parole du gouvernement" -- et insistent sur l'importance du vote.
Il faut une participation élevée "pour qu'on délégitime" la réforme ferroviaire et son "principal acteur, Guillaume Pepy", harangue le représentant de SUD-Rail, interrompu par de sonores "Pepy démission!".
"Est-ce que vous avez croisé des collègues qui disent: +Vive la réforme du ferroviaire+? Ça n'existe pas", tranche M. Villedieu. "La moindre des choses avant de nous imposer quelque chose, c'est de nous consulter".
Une consultation du personnel, comme celle qui a conduit le patron d'Air France à quitter la compagnie, "Pepy dit +j'en veux surtout pas+, parce que sinon il sait qu'il va sauter", attaque Béranger Cernon.
Le dirigeant de la SNCF "se dit +moi la démocratie ça m'emmerde un peu. Vous êtes bien gentils les gars, vous êtes mobilisés mais moi j'aime bien faire ce que je veux", résume le représentant de la CGT. "Mais ça ne marche pas comme ça", prévient-il.
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