La scolarité serbe de migrants bloqués aux portes de l'UE
Bloqué en Serbie avec sa famille, le jeune Afghan Shvaib Nazari va poursuivre vaille que vaille sa scolarité à Belgrade, dans une école locale.
A 12 ans, cet adolescent fait partie des quelque 700 migrants mineurs scolarisés cette année en Serbie. Le pays balkanique est loin de l'Europe dont rêvait sa famille quand elle a quitté l'Afghanistan il y a 18 mois.
Mais la fermeture de la "route des Balkans", début 2016, a fait de la Serbie un cul-de-sac pour des milliers de migrants, beaucoup d'hommes seuls, mais aussi des familles. Les Nazari y sont depuis onze mois.
Il faut donc s'inscrire dans la durée. Et scolariser les enfants, avec l'aide de l'Unicef qui a formé des professeurs, fournit des interprètes. L'organisation onusienne veut qu'à terme ce programme touche 1.500 enfants et adolescents.
"L'enseignement n'est qu'en serbe et il y a des choses que nous ne comprenons pas", dit à l'AFP Shvaib. "Les gens sont sympathiques et nous aident. Ils prennent nos enfants à l'école, mais ils ne comprennent pas les leçons", dit le père de Shvaib, Zaman Ali Nazari.
Petit à petit, le serbe commence à entrer, et lui comme ses trois frères et ses deux soeurs, entassés dans un centre d'accueil de la banlieue de Belgrade, comprennent des questions basiques.
Chaque jour, un bus les conduit du centre de Krnjaca à l'école Jovan Cvijic, l'une des 47 qui accueillent des migrants en Serbie. Huit des 257 élèves sont des migrants. Ils assistent à "tous les cours qu'ils peuvent suivre sans avoir besoin de bien parler le serbe", explique la directrice Valentina Pandjeitan.
Selon Michel Saint-Lot, représentant de l'Unicef, cette scolarisation est "une étape très importante": "Non seulement l'éducation est un droit fondamental, mais elle offre à ces enfants un semblant de normalité, un mode de vie structuré, une lueur d'espoir."
Leurs parents ne dessinent pas un futur serbe à leurs enfants. Ce n'est pas pour vivre dans ce pays de quelque 7 millions d'habitants où le salaire moyen est inférieur à 400 euros, qu'ils ont franchi les montagnes, traversé les mers et bravé les trafiquants.
- 'Nous ne pouvons rester' -
Uniquement 10% des migrants ont déposé une demande d'asile, sésame indispensable pour un travail et les services publics, explique Sonja Toskovic de Centre pour les droits de l'Homme, une association belgradoise. "Les autres résident ici (...) hors de tout cadre légal", dit-elle.
Selon Ivan Miskovic, porte-parole de l'agence des migrants, le flux d'arrivants s'est tari mais la durée de séjour "a augmenté significativement".
Selon le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), la Hongrie accepte seulement une cinquantaine de personnes par semaine. L'attente est longue: plus d'un an pour les familles, beaucoup plus pour les hommes seuls. "On verra à la fin de l'année combien resteront en Serbie", dit Sonja Toskovic. En 2017, 158 demandes d'asile ont été déposées. Pour l'heure, il n'y a eu qu'une réponse favorable.
Les Nazari espèrent partir dans cinq ou six mois et rejoindre un autre fils à Vienne. "La Serbie est un bon pays", mais "nous ne pouvons rester ici", dit Zaman Ali Nazari, le père de Shvaib, un chauffeur routier qui dit avoir quitté Kaboul après que des Talibans ont fait main basse sur sa cargaison.
Dans le bâtiment 17 du centre d'asile, la famille est à l'étroit, les six enfants âgés de 5 à 15 ans tentant de trouver un espace pour jouer, dessiner ou lire, entre les couchages, la table pour quatre, une petite armoire.
Ces enfants arrivent avec leur histoire traumatique dans un pays où leurs hôtes "ont leurs propres difficultés", dit Michel Saint-Lo. Selon lui, "il y a un sentiment d'incertitude des deux côtés". Mais cette barrière n'est pas insurmontable, selon Valentina Pandjeitan.
Au début du programme il y a un an, les parents serbes ont redouté une baisse de niveau. Rassurés sur ce point, "ils n'ont plus soulevé aucun problème".
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