Essais cliniques Pfizer : "Personne ne se soucie des événements indésirables graves non signalés" Christine Cotton et Brook Jackson
Dans ce Debriefing, nous recevons Christine Cotton et Brook Jackson pour évoquer les bonnes pratiques cliniques d’un essai thérapeutique. Toutes deux ont travaillé sur l’essai clinique de Pfizer. Brook Jackson a participé à cet essai en tant que directrice médicale de Ventavia Research Group. Christine Cotton, biostatisticienne, a quant à elle écrit une expertise méthodologique sur cet essai. Toutes deux ont dénoncé des résultats qui ne peuvent pas être considérés comme « fiables » et « intègres » au regard des bonnes pratiques cliniques.
Que sont les bonnes pratiques cliniques ?
Pour appréhender le sujet des bonnes pratiques cliniques dans un essai thérapeutique, il est important de comprendre tout ce que recouvre cette pratique.
Les bonnes pratiques cliniques sont des lignes directrices ou recommandations et documents techniques visant à assurer la sécurité des personnes qui participent à la recherche dans les essais cliniques et à homogénéiser les pratiques dans le monde entier. Les directives concernent tous les intervenants d’un essai clinique, le sponsor (le laboratoire pharmaceutique), le centre investigateur (personne qui recrute les patients dans l’essai), le service de gestion des données (personnes en charge du développement du système électronique dans lequel les centres saisissent les données), les statisticiens, la pharmacovigilance, l’assurance qualité… Il s’agit de documents à suivre afin de s’assurer que les données sont fiables et intègres, explique la biostatisticienne Christine Cotton.
L’évaluation des pratiques cliniques de l’essai thérapeutique de Pfizer
L’expérience de Brook Jackson sur le site Ventavia
Brook Jackson, directrice médicale, est à l’origine de ce que l’on a appelé « le Pfizergate », cette fraude de grande ampleur qui a impliqué la société pharmaceutique Pfizer, son sous-traitant, la société Ventavia Research Group chargée des essais cliniques, et la Food and Drug Administration (FDA).
Employée de Ventavia, Brook Jackson pointe de très nombreux dysfonctionnements dont l’absence de sérieux dans la manipulation des vaccins qui ne sont pas conservés à la bonne température et l’absence de suivi des patients, notamment pour ceux qui avaient effectué un signalement d’effets secondaires ou une suspicion de covid-19 et qui n’ont jamais été recontactées par téléphone afin de déterminer si une visite sur le site était nécessaire ou non.
Un manque de rigueur est également mis en évidence par des photos, des documents internes de l’entreprise, mais également des enregistrements audios emportés par Brook Jackson.
Des photos ont révélé les principales anomalies : aiguilles jetées dans un sac en plastique au lieu d’une boîte réservée aux objets tranchants, matériaux d’emballage de vaccins sur lesquels sont inscrits les numéros d’identification, soulevant le problème de l’anonymat. Un problème qui se retrouve également au niveau des dossiers des patients accessibles aux membres du personnel censé « être en aveugle » et dans lesquels l’attribution du produit a été inscrite par le personnel « non aveugle » chargé de l’administration du vaccin.
Après avoir signalé toutes ces violations aux bonnes pratiques cliniques identifiées sur le site Ventavia, la directrice médicale a envoyé une plainte à la FDA. Quelques heures plus tard, elle a reçu un courriel de la FDA qui l’informe qu’elle ne peut pas faire de commentaires sur une éventuelle enquête. Le même jour, elle est licenciée par Ventavia.
Quelques semaines plus tard, Pfizer a soumis sa demande d’autorisation d’urgence à la FDA. La réunion qui s’est tenue le 10 décembre 2020 n’a fait aucune mention des problèmes rencontrés sur le site de Ventavia et la FDA a délivré son feu vert le lendemain.
Lire aussi : "PfizerGate" ? Révélation sur des essais cliniques falsifiés par le triptyque Pfizer – Ventavia - FDA
Le rapport d’expertise méthodologique de Christine Cotton
La biostatisticienne, Christine Cotton, a écrit un rapport qui a consisté à réaliser une évaluation des pratiques méthodologiques mises en œuvre dans les essais Pfizer pour le développement de son vaccin ARN messager contre le Covid-19, au regard des bonnes pratiques cliniques. Pour ce faire, elle a examiné l’ensemble des documents du laboratoire Pfizer enregistrés auprès des autorités américaines et européennes, ce qui comprend les protocoles, les rapports cliniques et les différents plans de gestion de risque.
Au fur et à mesure de son analyse, Christine Cotton a repéré de très nombreux biais et en conclut que l'on ne peut pas faire confiance aux résultats de 95 % d’efficacité annoncée par le géant pharmaceutique pour son critère principal, à savoir, la première apparition de Covid-19 symptomatique à partir de sept jours après la deuxième dose.
Cette efficacité serait faussée par plusieurs facteurs :
— Le participant a la responsabilité de signaler ses symptômes aux personnes du site l’ayant recruté, afin de déterminer s’il est cas Covid-19 symptomatique. Tout report incomplet ou mauvaise appréciation par le participant qui n’a pas la compétence de juger de son état de santé est susceptible de modifier les résultats.
— L'utilisation autorisée d’antipyrétiques qui suppriment les symptômes, fièvre et douleur plus importante dans le groupe vaccin mène à une sous-estimation du nombre de cas symptomatiques, puisque seuls les participants signalant les symptômes doivent réaliser un test PCR dans le cadre de cet essai. Autrement dit, pas de symptôme signifie, pas de test PCR et pas de test PCR, pas de Covid. Pour bien faire, la biostatisticienne pense qu’il aurait été plus approprié de réaliser des tests PCR à l’ensemble de la population incluse dans l’essai clinique ou d’utiliser un autre critère permettant de compter les covid-19, qu’ils soient symptomatiques ou pas, tel que la sérologie anti-nucléocapside.
L’autre problème est l’évaluation de la tolérance au vaccin puisque l’analyse intermédiaire a été réalisée sur des participants ayant été suivis maximum trois mois avec deux mois médian après la seconde dose. Cela signifie que 50 % des participants suivis moins de deux mois et 50 % suivis plus de deux mois : une durée d’observation trop courte pour recueillir la tolérance à moyen et long terme. La chute des anticorps neutralisants avait déjà été observée dans l’étude préclinique sur les macaques. Cette absence de mesure a donc masqué la chute des anticorps, ce qui a été reconnu quelques mois plus tard par le laboratoire Pfizer.
À ces inconnues déjà nombreuses viennent s’ajouter des informations capitales manquantes (aucune donnée sur l’utilisation du vaccin pendant la grossesse et l’allaitement, aucune donnée sur les patients immunodéprimés ou présentant des comorbidités), aucune information non plus sur les interactions avec d’autres vaccins et sur la sécurité à long terme, non-report d’effets indésirables graves dans les rapports cliniques.
Christine Cotton a de ce fait mis en évidence la présence de biais et de déviations majeures aux bonnes pratiques cliniques ne permettant pas d’assurer la validité des résultats fournis dans les différents rapports cliniques Pfizer ayant été examinés dans l’urgence par les différentes autorités de santé, tant en termes d'efficacité, d’immunogénicité, et de tolérance.
Lire aussi : Essais Pfizer sur le vaccin anti-covid : le rapport explosif de Christine Cotton
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