Royaume-Uni : le Brexit blues frappe la population

Auteur(s)
La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 03 juillet 2016 - 15:18
Image
Une manifestation pro-Union européenne à Londres après le Brexit.
Crédits
©Niklas Halle'n/AFP
Le choc du Brexit aurait pour certains britanniques des conséquences "pires qu'un divorce".
©Niklas Halle'n/AFP
Dix jours après le référendum, certains Britanniques sont encore sous le choc du Brexit. Certains affirment même ressentir des conséquences physiques ou psychologiques rappelant une dépression. Un phénomène qui toucherait d'ailleurs aussi ceux qui ont voté pour une sortie de l'Union européenne.

Mélancolie persistante, troubles du sommeil, sentiment de frustration, de confusion? Vous êtes Britannique? Diagnostic: c'est le Brexit blues.

"On pourrait décrire ça comme une forme de dépression", confie à l'AFP Mick Watson, un partisan du maintien dans l'UE de 41 ans. "Je n'avais jamais rien ressenti de tel auparavant (...). Mon travail en souffre, ma vie privée en souffre, j'ai le sentiment que mon mode de vie est menacé", ajoute ce chercheur à l'Université d'Edimbourg.

A l'instar d'une guerre ou d'une révolution, le référendum sur la place du Royaume-Uni dans l'Union européenne fait partie de ces grands bouleversements susceptibles de marquer profondément et durablement l'histoire d'un peuple et d'une nation.

La victoire du "Leave" a laissé un pays coupé en deux: 17,4 millions d'électeurs ont voté pour quitter l'UE, 16,1 millions pour y rester, certains vivant comme un véritable traumatisme l'adieu au projet européen. Reste une formidable frustration, une sensation de vide, de manque, comme si une présence familière s'était subitement évanouie.

Si les symptômes rencontrés sont "multiples", "l'incertitude" est le sentiment dominant, explique à l'AFP le Dr Jay Watts, de la Queen Mary University de Londres. "Il y a d'abord le choc et le sentiment de trahison ressentis par les électeurs du maintien qui pour beaucoup ne se reconnaissent plus dans le Royaume-Uni dans lequel ils vivent", développe-t-elle.

Mais le mal, ajoute la praticienne, touche aussi les pro-Brexit, "exaspérés d'être dénigrés" pour leur choix, et qui se sentent aussi parfois "coupables d'avoir voté pour une promesse d'espoirs (...) qui ne s'est pas réalisée".

Ce à quoi il faut ajouter un facteur aggravant: le "caractère irréversible" du référendum, "qui fait que d'une certaine manière, c'est pire qu'un divorce", souligne Will Davies, un chercheur de l'université Goldsmiths, à Londres.

Cette perte de repères, cette sensation de ne plus reconnaître son propre pays, c'est ce que traverse l'acteur américano-britannique David Schaal (Les Boloss, The Office - version britannique). "Je me réveille la nuit, inquiet pour le futur du pays et la manière dont je vais pouvoir m'y intégrer", dit-il à l'AFP.

"Ce n'était pas juste un vote pour sortir de l'Europe. C'était un vote sur notre identité nationale. C'est comme si nous avions perdu la tolérance et la justice qui, d'après moi, faisaient du Royaume-Uni ce qu'il est", dit-il en pointant du doigt ceux qui pendant la campagne ont mis sur le dos de l'immigration tous les maux du pays.

D'autres s'épanchent sur les réseaux sociaux, usant d'un humour désabusé pour exorciser leurs démons. "Je travaille en pyjama pour la TOUTE PREMIERE fois. Je crois que j'ai le #Brexitblues", dit Lucy Mann sur Twitter. "J'ai résisté à la tentation de prendre dans mes bras le livreur polonais pour lui dire que je l'apprécie toujours", tweete Charlotte Day.

La déprime gagne aussi les immigrés européens, pleins de doutes quant à ce Royaume-Uni qui ne leur paraît plus si prompt à leur ouvrir les bras. "J'oscille entre l'abattement, la colère, la tristesse, l’inquiétude, l’espoir", écrit Aurore Valantin, une Française de 37 ans installée à Worthing (sud de l'Angleterre), sur son blog, Croqlife.

"En tant qu'étranger vivant dans un pays, on a pas eu le droit de vote, on se sent vraiment impuissants", dit-elle à l'AFP. "J'ai des amis très proches qui ont réellement des symptômes physiques et psychologiques. J'ai une amie qui ne mange quasiment plus, qui a perdu du poids, qui hésite entre prendre du Valium et se mettre à boire", ajoute-t-elle.

Pas question pour autant de plier bagages, poursuit Aurore, qui préfère "noyer son chagrin" en racontant sur son blog cette Angleterre qu'elle aime tant, sa culture de "tolérance et d'excentricité", et "qui ne ressemble en rien à celle qui se profile suite à la victoire" des pro-Brexit.

Pour "combattre le Brexit blues", le quotidien Evening Standard recommande lui de se tourner vers... l'Europe, ou en tout cas vers sa gastronomie, et donne une liste de restaurants londoniens où l'on peut déguster du vin français, de la mamaliga (plat à base de polenta) roumaine ou encore des tapas espagnoles.

Ou comme on aime à le dire au Royaume-Uni: "Keep calm and carry on" ("Gardez votre calme et tenez bon").

 

À LIRE AUSSI

Image
Theresa May
Brexit : Theresa May et Michael Gove veulent attendre pour déclencher la procédure de sortie
Theresa May et Michael Gove, les deux favoris à la succession du Premier ministre britannique David Cameron ont annoncé qu'ils attendraient pour déclencher la procédur...
01 juillet 2016 - 21:10
Politique
Image
L'Union Jack
Le Royaume-Uni perd son AAA, les agences de notation sanctionnent le Brexit
Après la chute de la livre sterling et de la bourse de Londres, une mauvaise nouvelle supplémentaire touche l''économie britannique suite au "Brexit": les agences de n...
28 juin 2016 - 12:31
Tendances éco
Image
Le drapeau des partisans du "Brexit"
Brexit : Le Royaume-Uni divisé, l'Europe impatiente
Après le vote en faveur du Brexit, la classe politique britannique est très divisée, et ne sait pas comment enclencher la suite. L'Europe est tout aussi sivisée sur le...
27 juin 2016 - 09:41
Politique

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Les dessins d'ARA

Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.