Attentat de Nice : l’image de Christian Estrosi écornée
Il avait fait de la sécurité un de ses chevaux de bataille, multipliant mesures et déclarations: l'attentat commis sur la Promenade des Anglais le 14 juillet à Nice écorne passablement l'image de Christian Estrosi, ex-maire LR de la ville, désormais 1er adjoint chargé de la sécurité. Dès les premières heures après l'attaque, qui a fait 84 morts, l'élu avait demandé un "sursaut" de l’État, critiquant le dispositif mis en place pour assurer la sécurité des festivités. Depuis, la polémique n'a pas cessé entre le gouvernement d'un Manuel Valls appelant M. Estrosi à "se reprendre" et l'élu local, également président de la région Paca, fustigeant des "mensonges d’État".
L'enjeu est d'autant plus capital pour le Niçois -né dans la capitale azuréenne le 1er juillet 1955- qu'il a depuis longtemps fait de la question de la sécurité un de ses thèmes favoris, même s'il s'est appliqué à estomper cette image lors du second tour des régionales, pour l'emporter face à la députée FN du Vaucluse, Marion Maréchal-Le Pen, après le retrait du candidat PS. Le 19 janvier 2015, moins deux semaines après l'attentat contre Charlie Hebdo, il avait assuré être "à peu près convaincu que si Paris avait été équipé du même réseau" de vidéosurveillance que la ville de Nice, "les frères Kouachi n'auraient pas passé trois carrefours sans être neutralisés". Dix-huit mois plus tard, le dispositif n'a finalement pas permis de repérer le 19 tonnes de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel sur la Promenade des Anglais lors de ses repérages avant l'attentat, alors que la circulation d'un camion de ce type sur cette artère est interdite par arrêté municipal.
En 2014, alors maire, M. Estrosi s'était pourtant félicité de "la verbalisation de 16 poids lourds" ayant "emprunté la Promenade des Anglais comme voie de transit", et avait annoncé que la police municipale continuerait ces contrôles. "Si nous l'avions vu sur la Promenade via nos caméras, nous aurions relevé l'infraction, puis nous l'aurions relayée au parquet, qui aurait décidé de poursuivre ou non. (...) Tous les jours, ce type de poids lourd vient livrer les hôtels, approvisionner les plages", a assuré dimanche dans le JDD Sandra Bertin, responsable de la vidéosurveillance de la ville, évoquant par ailleurs des pressions du ministère de l'Intérieur pour modifier son rapport sur les policiers présents le 14 juillet.
Qu'a-t-il manqué au dispositif pour être plus efficace? La reconnaissance faciale, assure M. Estrosi. Il l'avait demandée lors de la préparation de l'Euro pour assurer la sécurité des fan-zones. Il est depuis revenu à la charge, assurant dans Le Parisien: "si on nous avait autorisés à utiliser notre logiciel de reconnaissance faciale, (...) on se serait rendu compte que le conducteur du camion avait été condamné à six mois de prison avec sursis pour violence". Ancien adjoint de M. Estrosi à la sécurité, aujourd'hui conseiller municipal d'opposition proche d'Olivier Bettati (FN), Benoît Kandel assure que la police municipale "avait les moyens techniques" d'établir des barrages sur la Promenade des Anglais pour empêcher le passage d'un camion, avec notamment la possibilité de déployer des plots de béton. C'est le directeur départemental de la sécurité publique qui a explicitement écarté cette idée, s'est défendue la mairie dans Le Figaro.
M. Bettati, lui aussi un ancien proche de M. Estrosi, a même demandé au maire de Nice, Philippe Pradal (LR), l'ouverture d'une commission d'enquête municipale sur "le rôle exact de la direction de la police municipale et de l'adjoint en charge de ce secteur (M. Estrosi, NDLR) dans le cadre de l'organisation des festivités du 14 juillet". "Il est singulier d'observer que le gouvernement et des élus Front national se retrouvent à l'unisson, tels la carpe et le lapin, pour tenter de nous faire croire que la lutte antiterroriste relèverait désormais, non plus de l’État, mais de nos 36.000 communes! Mais qui peut imaginer que les Français soient dupes une seule seconde", a réagi l'entourage de M. Estrosi dimanche auprès de l'AFP.
Évoquant des "réunions d'experts" et des "attaques ridicules pour masquer les vraies questions", M. Estrosi a pour sa part reconnu dimanche qu'il n'avait participé, comme le préfet, a-t-il assuré, à aucune des réunions préparatoires aux festivités du 14 juillet, au cours desquelles avait justement été défini le dispositif de sécurité.
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