Étiquetage nutritionnel "5 couleurs" menacé : Rivasi veut faire pression sur Touraine
Le compte à rebours est lancé. "Il faut un étiquetage nutritionnel d'ici décembre 2016", a rappelé la députée européenne Michèle Rivasi en introduction d'une conférence de presse sur le sujet, ce mardi 11 à Paris. Car si la loi Santé passée en début d'année prévoit bien l'instauration d'un système d'information sur l'équilibre nutritionnel des aliments directement sur l'emballage, le code "5 couleurs" que Marisol Touraine semblait pourtant soutenir, et qui a été validé par les scientifiques, pourrait bien passer à la trappe.
Cinq couleurs (du vert au rouge) correspondant chacune à une lettre (A à E): le code "5C" est simple et compréhensible au premier coup d'œil. S'il n'est "pas parfait", disait en août 2015 le professeur Didier Jourdan, président de la commission prévention du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), ce dispositif "permet de se repérer rapidement sur la qualité nutritionnelle des produits de supermarchés et offre aussi la possibilité de comparer". Idéal? Efficace en tout cas, même s'il ne serait pas obligatoire, selon les scientifiques et les associations de consommateurs, qui avaient elles aussi plébiscité le "5C" mis au point par le professeur Serge Hercberg.
Sauf que les lobbies sont passés par là, a dénoncé Michèle Rivasi ce mardi. Puis d'expliquer que c'est sous leur impulsion, via l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA) notamment, que Stéphane Le Foll est intervenu dans le dossier. Cédant aux pressions, notamment un "chantage à l'emploi" selon l'eurodéputée, le ministre de l'Agriculture a envoyé un courrier, dévoilé par Mediapart en février, à sa collègue de la Santé pour lui demander "d'écarter" le code 5C car il serait "trop stigmatisant".
Dans la foulée, en mai dernier, Marisol Touraine a rétropédalé et annoncé une expérimentation pour essayer et comparer différents types d'étiquetages, alors même que l'instauration du code 5C semblait acquise. Mettant en doute le protocole de ce test décidé à la dernière minute (des membres de l'association Génération Cobayes, présents à la conférence de ce mardi, disent avoir constaté des manquements), Michèle Rivasi a également mis en doute l'indépendance du comité scientifique qui le supervise. Et de souligner que près de la moitié des experts le composant (six sur treize) ont claqué la porte en dénonçant les conflits d'intérêts impliquant leurs coreligionnaires, à l'image d'Yves Lévy, qui était alors PDG de l'Inserm. Le tout en quelques mois seulement.
Le risque serait grand, selon la candidate à la primaire EELV, que l'incapacité à conclure du comité d'experts ait été organisée sciemment. Faute d'avis scientifique, les industriels seraient libres de choisir leur propre étiquetage, plus flou, moins rigoureux. Leur choix serait clairement porté vers le système "SENS", qu'ils ont proposé eux-mêmes, qui conseille des fréquences de consommation (de "très souvent" à "occasionnellement ou en petite quantité") plutôt que de décrire l'équilibre nutritionnel des produits.
Un premier pas tout de même? "Non! ", a écarté Michèle Rivasi. Pour l'eurodéputée, cette alternative est "illisible" et "incompréhensible" pour le consommateur, et donc inutile. Il y a ainsi urgence à peser sur les autorités pour imposer le code 5C avant que cette "farce d'expérimentation" se termine, prévient l'élue écolo. Car "l'image qu'a la France sur la partie alimentaire en Europe est très importante" et l'avenir d'une évolution cruciale pour enrayer "l'épidémie d'obésité" annoncée par l'OMS se jouerait donc en partie à Paris. Et il faudra que les consommateurs s'en mêlent car, au niveau politique, "Stéphane Le Foll a bien plus de poids que Marisol Touraine dans les arbitrages", soupire Michèle Rivasi en aparté avec FranceSoir. Une pétition, signée par près de 235.000 personnes, a été lancée en début d'année pour tenter de faire pression sur la ministre. Michèle Rivasi comptait lui remettre en main propre ce mardi.
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