Un nouveau Conseil de défense pour l'énergie : encore un passage en force ?

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FranceSoir
Publié le 31 août 2022 - 18:20
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Conseil de défense
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LUDOVIC MARIN / POOL / AFP
Conseil de défense sur la sécurité nationale pour discuter du logiciel espion Pegasus dans la salle Jupiter du palais présidentiel de l'Elysée à Paris, le 22 juillet 2021.
LUDOVIC MARIN / POOL / AFP

"Le président de la République va tenir un Conseil de défense vendredi matin. Il sera consacré à l'approvisionnement en gaz et en électricité, au vu de l'augmentation des prix de l'énergie et en prévision de cet hiver", rapporte BFMTV. À l’origine, le Conseil de défense était consacré aux sujets de sécurité et de défense, mais Emmanuel Macron et son gouvernement ont transposé ce concept dans la cadre dans la lutte contre le Covid, et aujourd’hui de la crise énergétique. Une mauvaise habitude ?

Qu’est-ce qu’un "Conseil de défense" ?

Créé en 1958, ce Conseil, devenu très actif à partir de 2016 et des terribles attentats qui ont été perpétrés cette année-là, se réunit très régulièrement. Après l'attentat de Nice du 14 juillet 2016, François Hollande a pris la décision de tenir chaque semaine un Conseil de défense et de sécurité nationale (CDSN). Le rôle de ce Conseil de défense est multiple : il définit les orientations en matière de programmation militaire, c’est également un outil de dissuasion militaire, il organise la conduite des opérations extérieures, planifie des réponses aux crises majeures, définit la politique française de renseignement, mais également dans le domaine de la sécurité énergétique et économique, ainsi que de la programmation de sécurité intérieure concourant à la sécurité nationale et de lutte contre le terrorisme. Les membres de ce Conseil varient selon les formations. Le Président est permanent.

Le CDSN, réuni en formation plénière, rassemble le Premier ministre, le ministre de la Défense, le ministre de l'Intérieur, le ministre chargé de l'Économie, le ministre chargé du Budget, le ministre des Affaires étrangères, ainsi que les ministres concernés par les sujets abordés. En formation restreinte, les participants varient selon les ordres du jour.

Enfin, il existe deux formations spécialisées du CDSN : le Conseil national du renseignement. "Outre le président de la République, y siègent le Premier ministre, les ministres et les directeurs des services spécialisés de renseignement ainsi que le coordonnateur national du renseignement. Le Conseil national du renseignement définit les orientations stratégiques et les priorités en matière de renseignement. Il établit la planification des moyens humains et techniques des services spécialisés de renseignement".

Et, le Conseil de l’armement nucléaire : "Outre le président de la République, y siègent le Premier ministre, le ministre de la Défense, le chef d'état-major des armées, le délégué général pour l'armement et le directeur des applications militaires du Commissariat à l'énergie atomique. Le Conseil des armements nucléaires définit les orientations stratégiques et s'assure de l'avancement des programmes en matière de dissuasion nucléaire".

"Nous sommes en guerre"

La configuration initiale portant sur la défense et la sécurité est restée en place jusqu'aujourd'hui. Cependant, après le déclenchement de l'épidémie de covid-19 en 2020, le gouvernement a créé un nouveau type de Conseil de défense appelé Conseils de défense sanitaires.

Les décisions du Conseil s’appuyaient sur les avis d’un Conseil scientifique, créé en mars 2020 à la demande du ministère de la Santé : un groupe composé de treize experts scientifiques, qui ont émis différentes recommandations sanitaires, pour certaines très contestées, durant ces deux ans. Ce Conseil scientifique a été dissous récemment et remplacé par le "comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires", présidé par l'immunologue Brigitte Autran.

Lire aussi : "Encore trop de personnes non vaccinées", dénonce Brigitte Autran, présidente du nouveau comité scientifique

Il semble donc que la stratégie d’Emmanuel Macron et de son gouvernement soit de multiplier les Conseils de défense pour résoudre les différentes crises actuelles. Toutefois, la nature de ce conseil pose un problème. En effet, le contenu des sujets et des propos tenus restent secrets, en vertu de leur statut secret défense. Par conséquent, les Français ne connaissent pas les motifs des décisions prises, aucun compte rendu de ces conseils n’est transmis, et leur archivage secret-défense peut durer de 50 à 100 ans !

En outre, ces Conseils de défenses font abstraction du Parlement, ce qui signifie que les décisions prises sont adoptées sans débat démocratique. Une part importante des mesures sanitaires prises pendant ces deux ans, comme l'obligation du port du masque, la décision de confiner toute la population et les couvre-feux, ont été imposées sans consultation de l’Assemblée nationale ou du Sénat. De surcroît, cela suggère que seul l’exécutif et un petit groupe "d’experts" sont à même de juger quels choix sont les meilleurs pour le peuple français. Nos dirigeants deviennent de facto une autorité morale et intellectuelle supérieure pour le peuple français, à qui ils n'ont aucun compte à rendre !

La fin de l’abondance…

Aujourd'hui, beaucoup de Français s’inquiètent de l’inflation galopante et des futures restrictions liées à la politique de sobriété énergétique prônée par le gouvernement. D'autres pays européens connaissent les mêmes problèmes que la France : au Royaume-Uni, les factures d’électricité ont parfois été multipliées par dix, provoquant des mouvements qui appellent au boycott du paiement des factures d'électricité et du gaz à compter du 1er octobre.

À ce sujet, le risque serait que le gouvernement promulgue des décrets autorisant les délestages, c’est-à-dire des coupures d’électricité à certaines heures de la journée, ce qui semble être une idée envisagée : 

... et de la démocratie ?

Les déclarations d'Emmanuel Macron pendant le Conseil des ministres ont fait couler beaucoup d’encre. Il affirmait notamment que le temps de l’abondance était révolu ! Toutefois, ce que les commentateurs ont omis de rappeler, c’est qu’Emmanuel Macron a aussi déclaré qu’il s’agissait de la "fin de l'insouciance, de la démocratie et des droits de l'homme" : une simple formule macronienne, ou un avant-goût de ce qui nous attend ?

Lire aussi : Guerre en Ukraine: Emmanuel Macron prévient les Français qu'ils vont devoir "accepter le prix de la liberté"

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