PMA, filiation, embryons : une mission parlementaire veut tout changer
PMA pour toutes les femmes, levée de l'anonymat des donneurs de sperme, PMA post-mortem, assouplissement des recherches sur l'embryon : la mission parlementaire sur la loi de bioéthique, dont le rôle est de préparer le débat législatif, a proposé mardi des changements majeurs.
Après avoir mené de nombreuses auditions ces derniers mois, elle a adopté et publié un rapport très attendu, le dernier avant le début du processus législatif.
Initialement prévue au Parlement avant fin 2018, la révision de la loi de bioéthique a été repoussée en raison, selon l'exécutif, de l'encombrement du calendrier parlementaire. Le projet de loi doit maintenant être présenté en Conseil des ministres puis être examiné au Parlement avant l'été.
"Les trois ministères, Santé, Recherche et Justice, décideront quelles préconisations (de la mission) seront retenues", a souligné en conférence de presse l'auteur du rapport, le député LREM Jean-Louis Touraine.
"Si elle suit la plupart des préconisations, cette modification (de la loi) sera la plus importante (en ampleur) de l'histoire de la bioéthique dans notre pays", a-t-il jugé.
Le volet le plus sensible du futur texte de loi est l'ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée) aux couples de femmes et aux femmes seules, comme Emmanuel Macron s'y était engagé pendant sa campagne.
La mission de l'Assemblée nationale prend parti pour cette mesure.
"L'ouverture de l'accès à l'AMP (assistance médicale à la procréation, nom officiel de la PMA, ndlr) apparaît comme une nouvelle étape sur le long chemin de l'émancipation des femmes (...) et sur celui de la reconnaissance de toutes les familles", estime la mission.
La prise en charge de la PMA par la Sécu serait assurée "dans les mêmes conditions que pour les couples hétérosexuels".
Pour établir la filiation, un nouveau régime serait créé pour les couples bénéficiaires d'une PMA, qu'il s'agisse d'hétérosexuels ou d'homosexuelles. Au moment de la déclaration de naissance, ils devraient transmettre à l'officier d'état civil une "déclaration commune anticipée" rédigée devant notaire avant la PMA.
Le fait qu'un enfant soit né par PMA serait donc porté sur son état civil, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Cette solution "fait perdre aux couples hétérosexuels la possibilité de ne pas révéler à leur enfant son mode de conception", reconnaît le rapport.
- "Rapport militant" -
Pourtant opposé à l'élargissement de la PMA, le président de la mission, le député LR Xavier Breton, n'a pas voté contre le texte.
"C'est un rapport militant, engagé, mais au moins on a un exposé de l'engrenage inéluctable qui amènera à bouleverser la société", s'est-il justifié. Selon lui, quatre membres de la mission ont voté contre, sur une vingtaine de présents.
Le rapport juge en outre que l'ouverture de la PMA aux femmes seules imposerait d'autoriser la PMA post-mortem. La conjointe d'un homme décédé aurait le droit de se faire inséminer avec son sperme (au cas où il l'ait congelé avant son décès) ou de se faire implanter un embryon conçu in vitro avant le décès.
Par ailleurs, la mission préconise la levée de l'anonymat des donneurs de sperme.
Les enfants conçus par PMA pourraient connaître l'identité du donneur sur simple demande, dès leurs 18 ans, pour tous les dons effectués après l'entrée en vigueur de la loi. Pour les dons précédant la loi, l'accord du donneur serait obligatoire.
Enfin, la mission considère qu'il faut maintenir l'interdiction de la GPA (gestation pour autrui, c'est-à-dire le recours à une mère porteuse), tout en reconnaissant à l'état civil les enfants conçus grâce à une GPA pratiquée à l'étranger.
Les associations de défense des homosexuels ont salué la publication du rapport, en réclamant un démarrage rapide du processus législatif.
A l'inverse, l'association anti-PMA Alliance Vita a estimé que "seule une mobilisation citoyenne tenace pourra dissuader le président de la République d'exécuter les préconisations de ce rapport".
Au-delà des mesures concernant la procréation, la mission propose d'autres changements d'importance.
Elle souhaite ainsi assouplir le cadre des recherches sur l'embryon et permettre à tous les couples de faire des tests génétiques avant de concevoir un enfant, afin de repérer d'éventuelles maladies graves dont il pourrait être atteint.
Le gouvernement organisera dans les prochaines semaines des "séminaires" pour les députés et les sénateurs sur quatre thèmes de bioéthique (procréation, recherche sur l'embryon, filiation, diagnostics génétiques), a annoncé Matignon vendredi. Le but : "créer au Parlement les conditions d'un débat le plus précis et le plus apaisé possible".
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