Premier tour des régionales : la gifle
L'AVIS TRANCHANT D'ALAIN - Les lendemains de scrutin sont toujours propices aux commentaires. En donnant dans une métaphore de circonstances en ces temps de championnat d'Europe de football, il convient cependant de ne pas méconnaître que nous ne sommes qu'à la mi-temps du match des élections régionales, et qu'il reste encore 45 minutes à disputer, voire 50 minutes avec le temps additionnel, celui de l'élection des présidents de région... Aussi est-il prudent de se garder de déduire des conclusions trop hâtives du premier tour du 20 juin. Dans une semaine, les enseignements de cette consultation apparaîtront en toute clarté.
Mais, dès maintenant, de grandes tendances apparaissent. Et, en premier lieu, la progression régulière, scrutin après scrutin, de l'abstention qui ne cesse d'être préoccupante pour notre démocratie. À ceux qui estiment que la solution résiderait dans une représentation proportionnelle des opinions à l'Assemblée Nationale, j'objecterai que ce n'est pas cela qui donnerait au citoyen le sentiment de participer à la gestion de ses affaires. Comme dans les premières et grandes années de la Vème République, il me semble plus judicieux de remettre à l'honneur le référendum et de le réserver au règlement des grands dossiers, à commencer par celui des institutions avec l'instauration du septennat non renouvelable, et à continuer par celui des retraites qui touche tous les Français.
L'autre enseignement majeur de ce premier tour des élections régionales concerne le pouvoir exécutif. Et, là, point de doute : le dégagisme a fonctionné à son endroit. Même si on a entendu le contraire dimanche soir sur les plateaux télévisés, il est trop réducteur d'expliquer la réussite du premier tour pour des présidents de région par "la prime aux sortants". C'est d'abord oublier qu'ils avaient renversé les présidents sortants six ans auparavant. Et c'est peut-être minimiser le fait que l'importance de leur engagement et la qualité de leurs réalisations ont été salués par les électrices et les électeurs qui leur ont apporté leur suffrage.
Disons-le clairement. Les Françaises et les Français étaient parfaitement libres de voter pour les candidats missionnés par La République en marche, voire par le président de la République lui-même, qui n'a pas craint d'arpenter les rues des Hauts de France la semaine dernière. S'il est une leçon que l'on peut d'ores et déjà déduire du scrutin, c'est qu'ils n'ont pas fait ce choix. Pour Emmanuel Macron, qui avait dépêché cinq de ses ministres - et non les moindres, les ministres de l'Intérieur et de la Justice ! - dans la région des Hauts de France, le camouflet est indéniable. Il entendait barrer la route de l'Elysée à Xavier Bertrand. Ses ministres sont au tapis. Ils seront dans les tribunes pour le second tour de scrutin ! Dans l'ancien monde, ils auraient été priés de quitter le gouvernement. Dans le nouveau monde, recomposer le gouvernement serait une tâche, non pas jupitérienne, mais vraiment herculéenne dans l'ambiance du moment...
On comprend mieux, en ce jour d'été, pourquoi le président de la République entendait reporter le scrutin régional au lendemain de l'élection présidentielle de 2022. Car quand le peuple se rend aux urnes, même en petit nombre, il est impossible de ne pas tirer de leçons de son vote. S'il est évidemment prématuré de considérer que la donne en est changée pour 2022, a contrario il n'en est pas moins permis de rappeler que l'élection présidentielle de 2017 aurait sans doute connu un tout autre épilogue si François Fillon n'avait pas été littéralement empêché, et si les dirigeants de son camp lui avaient imposé de renoncer à sa candidature dès janvier 2017 à l'annonce de ses "affaires". Et tant pis pour la primaire...
Peut-être y verrons-nous plus clair dans une semaine après un second tour où un retour des électeurs aux urnes pourrait réserver quelques surprises. En l'état, il est certain que M. Macron a été bien imprudent de se mêler d'une cuisine électorale qui ne relève pas des attributions présidentielles.
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