Primaire de la droite : avortement, fonctionnaires, économie, les coups partent entre Juppé et Fillon
L'entre-deux tours de la primaire de la droite se tend: pour refaire son retard, Alain Juppé pilonne François Fillon en attaquant son programme économique "brutal" et ses positions sur l'avortement, ce qui a ulcéré son adversaire jugeant qu'il "tombait bas".
Après avoir dénoncé devant ses soutiens lundi la vision "extrêmement traditionaliste" de la société portée par François Fillon, Alain Juppé l'a appelé mardi à "clarifier" sa position sur l'avortement.
Le favori des sondages avait en effet expliqué en juin que "philosophiquement et compte tenu de (sa) foi personnelle", il ne pouvait pas "approuver l'avortement". Interrogé sur le sujet fin octobre, il distinguait toutefois ses "convictions et l'intérêt général". "Jamais personne et certainement pas moi ne reviendra sur l'avortement", tranchait Fillon.
Ce mardi 22, c'est notamment sur cette question qu'il a reçu le soutien du président du parti démocrate chrétien Jean-Frédéric Poisson. Répondant à sa demande, M. Fillon a assuré dans une lettre publiée par Le Figaro qu'il "partage totalement" sa volonté de replacer "au cœur des politiques publiques" notamment "la politique familiale" et "l'accueil de la vie", sans évoquer explicitement l'avortement.
En déplacement à Viry-Châtillon (Essonne), où Alain Juppé s'était rendu le 8 novembre, François Fillon a vigoureusement réagi à l'attaque de son concurrent: "Jamais je n'aurais pu penser que mon ami Alain Juppé tombe aussi bas!"
"Est-ce qu'une seule fois j'ai pris une position contraire à l'avortement? (...) Que la campagne reprenne sa dignité et qu'on cesse les polémiques qui sont inqualifiables et qui, franchement, abaissent le niveau", a répliqué M. Fillon.
Les fillonistes sont venus à sa rescousse, le porte-parole Jérôme Chartier parlant de "polémique honteuse". Pour Isabelle Le Callennec, membre du collectif Les femmes avec Fillon, "ce n'est pas un sujet". "On ne peut pas banaliser l'IVG, ça reste un acte qui n'est pas anodin. C'est le seul message qu'on veut envoyer", a-t-elle expliqué.
Alain Juppé (28,5%), seize points derrière François Fillon (44,1%) selon les résultats toujours provisoires au premier tour de la primaire, est bien décidé à mettre "toute la gomme" selon son expression pour rattraper son retard d'ici dimanche.
Mais s'il rejette l'idée d'une "campagne d'affrontement personnel" avec Fillon, pour qui il a "de l'amitié et de l'estime", le maire de Bordeaux critique de plus en plus clairement son adversaire et aussi son programme économique "brutal" qui selon lui ne se "fera pas", notamment les suppressions de 500.000 postes de fonctionnaires.
Alors qu'Alain Juppé promet notamment de renforcer la police "à hauteur de 10.000 personnes", François Fillon a estimé que "la question des effectifs (policiers) n'est pas centrale". "S'il faut, on créera des postes. Mais il y a des tâches administratives qui peuvent être supprimées", a expliqué M. Fillon, après avoir taxé dans Le Parisien de "décalé" le programme d'Alain Juppé.
Après ces échanges acerbes, les deux finalistes tiennent meetings ce mardi soir. A Lyon pour le député de Paris, où s'exprimeront Bruno Le Maire et Laurent Wauquiez, et à Toulouse pour Alain Juppé qui aura le soutien de Jean-François Copé et Nathalie Kosciusko-Morizet.
Auparavant, François Fillon a recommandé à ses soutiens parlementaires à la Maison de la Chimie à Paris de "ne pas avoir la grosse tête" car selon lui "rien n'est joué" pour le second tour.
Soutien de la première heure d'Alain Juppé, François Bayrou, a dénoncé mardi auprès de l'AFP "la brutalité du programme" de M. Fillon. Ce dernier refuse tout "pronostic" sur le choix de celui avec qui ses relations sont "cordiales".
Grand favori du second tour, le député de Paris continue à cristalliser les critiques des autres partis.
Le projet de la droite est "dur" et "réactionnaire", a commenté Manuel Valls à l'Assemblée nationale, tandis que le secrétaire d’État aux Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, répétait que "M. Fillon a coché toutes les cases de la plus grande radicalité de la droite, la droite la plus dure". Le FN, lui, a dénoncé le "passif" de François Fillon comme Premier ministre et son programme "ultralibéral".
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