Réseaux sans souci
FRANCE - Le 5 octobre dernier, alors que la loi sur la régulation de l'espace numérique (SREN) était à l’étude à l’Assemblée nationale, le ministre Jean-Noël Barrot a avoué, après avoir mené l’enquête, que “parmi les contenus liés aux émeutes publiés sur les réseaux sociaux, les dénonciations des violences et les appels au calme étaient huit fois plus importants en volume que les incitations à la violence et à la haine”.
Que n’avons-nous pas entendu à propos du rôle joué par les réseaux sociaux dans les émeutes après la mort du jeune Nahel ? Emmanuel Macron lui-même n’avait pas de mots assez durs. Dans un discours remarqué donné le 4 juillet, le chef de l‘Etat avait évoqué l’idée de pouvoir mettre en place des mesures de blocage des réseaux en cas de violences urbaines. Dans le viseur d’Emmanuel Macron : Snapchat et TikTok où s'organisaient, d’après lui, « des rassemblements violents”, et où serait encouragé “une forme de mimétisme de la violence”. Seulement, après enquête, le gouvernement doit bien être obligé de constater que les réseaux sociaux n’ont pas été le vecteur de haine que beaucoup prétendent.
Un groupe de travail parlementaire constitué
Ce constat a été dressé lors de l’examen de la loi SREN à l’Assemblée nationale ce mois d’octobre. Le 5 du mois, le député Victor Habert-Dassault a déposé un amendement afin de forcer les plateformes à retirer des contenus "incitant de manière manifeste à l’émeute, à l’atteinte aux bâtiments publics ou à l’atteinte aux personnes“ en seulement deux heures. Il reprenait là la proposition du sénateur Patrick Chaize faite le 5 juillet lors du premier examen du texte en chambre haute.
A ce moment, le ministre avait incité le sénateur à retirer son amendement en avançant le risque d’inconstitutionnalité. Le dispositif ressemblait effectivement à la loi Avia, censurée le 24 juin 2020 par le Conseil constitutionnel. Le parlementaire avait cependant lourdement insisté et refusé de “lâcher” son texte, à tel point que le ministre avait dû demander une suspension de séance. De retour dans l’hémicycle, Patrick Chaize avait retiré sa proposition mais exigé qu’un groupe de travail se penche sur l’impact des réseaux sociaux sur les émeutes.
“15 % des contenus diffusés sur les réseaux durant cette semaine étaient liés aux violences urbaines”
Ainsi, pour écarter à nouveau l’amendement, cette fois porté par le député Victor Habert-Dassault, le ministre du numérique n’a eu d’autre choix que de mentionner les conclusions observées par ce fameux groupe de travail. “Nous avons tous le sentiment que les réseaux sociaux ont, d’une manière ou d’une autre, joué un rôle lors des épisodes de violences urbaines de juin et juillet derniers, qui ont motivé le dépôt de cet amendement » argue-t-il, avant de poursuivre : “Nous manquions d’éléments tangibles permettant de mesurer le rôle des réseaux sociaux lors de la semaine de la fin du mois de juin et du début du mois de juillet (…). Nous avons obtenu des données montrant que 15 % des contenus diffusés sur les principaux réseaux sociaux durant cette semaine étaient liés aux violences urbaines : c’est considérable, mais ce n’est pas 100 %. Nous avons ensuite affiné ces données et constaté que, parmi les contenus liés aux émeutes, les dénonciations des violences et les appels au calme étaient huit fois plus importants en volume que les incitations à la violence et à la haine.”
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