Taubira a démissionné : entre lyrisme, humour et passes d'armes, le parcours de la ministre (VIDEOS)
Christiane Taubira a démissionné. "Enfin!", ont immédiatement réagi ses détracteurs (pas forcément tous de l'opposition) à l'annonce de la nouvelle ce mercredi 27 au matin, alors que François Hollande et Manuel Valls, bien que la ministre de la Justice se soit démarquée par une liberté de parole parfois grinçante, regrettent probablement le départ de la garde des Sceaux devenue égérie de la gauche. Perdant ainsi peut-être la "dernière caution de gauche" de ce gouvernement.
Une stature d'icône que Christiane Taubira s'est bâtie en grande partie pendant les débats sur le mariage pour tous, entre novembre 2012 et avril 2013, par ses envolées tribuniciennes dans l'hémicycle, mais pas seulement. Retour en cinq vidéos sur les prises de parole et de position qui ont marqué le parcours de celle dont la culture est reconnue même par ses plus fervents détracteurs, capable de citer de mémoire de longs passages des classiques de la littérature. Et adepte des prises de position chocs.
Acte 1: les débats sur le mariage pour tous
Electrisant le pays, donnant lieu à des manifestations d'une ampleur rare en France rassemblant des centaines de milliers d'opposants, le projet de loi sur l'ouverture du mariage aux couples de même sexe a été l'acte fondateur de la "légende" de Christiane Taubira. Son discours d'ouverture, prononcé le 29 janvier 2013 (dont la retranscription par le personnel de l'Assemblée nationale est à lire ICI) la fera "entrer dans l'histoire", disaient à l'époque les observateurs. A raison.
En une trentaine minutes de prise de parole sans lire ses notes, elle a retracé l’histoire du mariage, de l’union, et des raisons pour lesquels il fallait, disait-elle, ouvrir le mariage à tous les couples. Un discours fort qu'elle a conclu par ces mots, citant un poème du député guyanais Léon Gontran-Damas: "L'acte que nous allons accomplir est +beau comme une rose dont la Tour Eiffel assiégée à l'aube voit s'épanouir enfin les pétales+...".
Acte 2: la lutte contre le FN
Guyanaise, Christiane Taubira a une grande constante dans son parcours politique: la lutte contre l'extrême-droite, qui le lui rend bien. Au Sénat, la ministre de la Justice a récemment eu une vive passe d'armes avec le sénateur du Var frontiste David Rachline, qui fustigeait sa politique pénale, allant jusqu'à l'accuser d'avoir "donné un très fort sentiment d'impunité aux voyous de toutes sortes". La réponse a été pour le moins cinglante: "le laxisme, c'est de s'accommoder d'un leader qui combine à la fois les condamnations multiples et les responsabilités politiques. Le laxisme, c'est de ne pas condamner la violence lorsque des personnes, dans vos manifestations ou en marge, molestent des journalistes ou attaquent des personnes et les jettent dans la Seine", a-t-elle dénoncé, en référence à Brahim Bouarram, mort noyé en marge d'un rassemblement du 1er mai du FN en 1995.
Acte 3: un peu d'humour dans ce monde de brutes
Cible privilégiée de l'opposition, qui n'a eu de cesse de réclamer sa tête ("démission" a été entendu dans le public le jour même de son investiture...), Christiane Taubira a su en jouer avec humour pour, parfois, éviter de répondre sur les sujets qui fâchent. Comme le 23 juin dernier, lorsque le député LR Eric Ciotti l'interroge sur la rumeur de sa nomination au Conseil constitutionnel. Pour éluder, la ministre met les rieurs de son côté en évoquant "l'obsession" du député à son encontre, allant jusqu'à sous-entendre un "sentiment (amoureux) contrarié" de sa part...
Acte 4: après le mariage pour tous, la GPA
Parfois techniques, les débats parlementaires opposent des visions contraires de la société. De là à en oublier l'humain? Sans aller jusque-là, la garde des Sceaux s'est permise de rappeler à une député LR, qui accusait la justice d'avoir légalisé un "proxénétisme procréatif" en reconnaissant la filiation d'un enfant né de GPA à l'étranger, qu"'il s'agit d'enfants, d'enfants en chair et en os". Tout en rappelant que "la GPA est interdite dans notre code civil".
Acte 5: une ministre chez les frondeurs
Au plus fort de la "fronde" d'une partie des députés socialistes, concrétisée par le lancement du club "Vive la gauche" lors de l'université d'été du PS, fin août 2014, et alors qu'Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Aurélie Filippetti viennent de se faire débarquer du gouvernement pour avoir critiqué la politique économique de François Hollande et Manuel Valls, Christiane Taubira s'affiche avec les frondeurs à La Rochelle.
Bien qu'ovationnée, elle n'a pas pris la parole à la tribune, mais dehors, et devant la presse: "nous avons laissé les Français perdre le moral, (…) ne plus croire en leur avenir, alors que ce pays a des capacités extraordinaires. (…) Aujourd’hui, nous n’avons pas le choix, nous devons refaire place à la politique", dit-elle dénonçant implicitement l'orientation prise par le président. Puis de conclure: "j’en assume les conséquences". Mais elle était déjà intouchable.
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