Un autre ministre macronien devant la justice : Olivier Dussopt, accusé de favoritisme, comparaît devant le tribunal correctionnel de Paris
FRANCE - Après le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, un autre membre du gouvernement Borne se retrouve sur le banc des accusés. Olivier Dussopt, ministre du Travail, est accusé de “favoritisme” dans une affaire qui remonte à 2009, liée à un marché public de 5.6 millions d’euros. Son procès, qui s’est ouvert lundi 27 novembre 2023, doit durer jusqu’au 30 novembre. L’ancien maire d’Annonay, en Ardèche, encourt une peine de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende. Tout comme son collègue, Olivier Dussopt, qui affirme aller au tribunal pour “convaincre de sa bonne foi”, devra démissionner s’il est condamné.
L’affaire est vieille de 14 ans, lorsqu’Olivier Dussopt était maire d’Annonay. C’est Mediapart qui a dévoilé, en 2020, qu’un dirigeant de la Saur, troisième grande entreprise de l’eau en France, avait offert en 2017, lors de la dernière année à la municipalité de l’actuel ministre du Travail, deux lithographies alors que des négociations sur un nouveau contrat étaient en cours. Le Parquet national financier (PNF) a immédiatement réagi, ouvrant une instruction confiée à l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), pour “favoritisme”, “corruption” et “prise illégale d’intérêts”.
Les soupçons de “favoritisme” confirmés... par un autre marché
Il s’agissait finalement d’une fausse piste pour le PNF qui a écarté ces délits, les lithographies reçues étant de faible valeur. Toutefois, une perquisition chez Olivier Dussopt a mené à une nouvelle piste : un compte-rendu d’entretien de 2009 avec le directeur de la Saur, dans lequel est évoqué un marché de gestion d’eau de 5,6 millions d’euros ainsi qu’un e-mail demandant l’évolution des critères de l’appel d’offres.
Le PNF, qui soupçonne un arrangement, retient en janvier 2023 l’infraction de “favoritisme” pour la Saur. La date du procès est fixée en juin et le Premier ministre, Elisabeth Borne, lui témoigne toute sa confiance dans la foulée. Le ministre du Travail comparaît depuis le 27 novembre devant le tribunal correctionnel de Paris.
Début novembre, Olivier Dussopt exprimait son optimisme. “On parle d’une enquête qui a été classée pour 80 %. Quatre points sur cinq ont été classés, il en reste un, sur un marché de 2009, il y a 14 ans. Je vais au tribunal pour convaincre de ma bonne foi. J’ai convaincu le parquet sur les quatre premiers points, je souhaite le convaincre sur le cinquième”, a-t-il déclaré.
A ses côtés, l’ex-directeur général de la Saur, Olivier Brousse, comparaît pour “complicité de favoritisme”. Tout comme le ministre du Travail, il conteste les faits et promet de s’expliquer devant le tribunal. Les deux prévenus encourent deux ans de prison et 30 000 euros d’amende. La société Saur, accusée de recel de favoritisme, risque, elle, une amende de plus d’1,8 million d’euros.
Vers la démission de deux ministres de Macron ?
Lorsqu’elle a été interrogée sur ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, Elisabeth Borne a rappelé que la démission s’appliquait, comme “principe général”, en cas de condamnation, aussi minime soit-elle. Une position nuancée par rapport à celle du président Emmanuel Macron, qui affirmait, durant sa campagne en 2017, qu’il suffisait d’une mise en examen d’un ministre pour que ce dernier démissionne…
En décembre 2021, à la fin du premier quinquennat Macron, Alain Griset, ministre délégué aux PME, a démissionné après avoir été condamné, pour déclaration incomplète ou mensongère de sa situation patrimoniale, à six mois de prison avec sursis et une peine d'inéligibilité de trois ans avec sursis.
Actuellement, deux ministres du gouvernement Borne doivent faire face à des accusations mettant leurs postes en danger. Quelques semaines avant Olivier Dussopt, Eric Dupond-Moretti est passé du 6 au 16 novembre devant la Cour de justice de la République. Il est accusé de prise illégale d’intérêts et encourt cinq ans d'emprisonnement, 500 000 euros d'amende, une inéligibilité et une interdiction d'exercer une fonction publique.
Sa défense mise justement sur son poste de ministre et la démission qui le guette pour plaider sa relaxe. Tel serait, selon ses avocats, “l'enjeu” de la décision de la Cour de justice de la République : “Une condamnation, même la plus petite, entraînerait sa démission”.
Le parquet, de son côté, a requis une peine d'un an de prison avec sursis. Eric Dupond-Moretti sera fixé sur son sort mercredi 29 novembre.
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