Valls veut un "islam fort" pour lutter contre la radicalisation
Le gouvernement veut pouvoir s'appuyer sur un "islam fort" pour lutter contre la radicalisation, thème central de la deuxième réunion ce lundi 21 de l'"instance de dialogue" avec le culte musulman.
Sans contester la "légitimité" du Conseil français du culte musulman (CFCM), les pouvoirs publics ont lancé en juin 2015 une "instance de dialogue" pour élargir le cadre du débat avec "un islam de France sunnite aux multiples sensibilités et sans hiérarchie cléricale", a souligné le Premier ministre Manuel Valls.
Pour la deuxième réunion, quatre mois après les attentats du 13 novembre qui ont fait 130 morts à Paris et Saint-Denis, un sujet a dominé naturellement l'ordre du jour: la prévention de la radicalisation. Quelque 150 responsables musulmans, recteurs de mosquées, imams, aumôniers, acteurs de terrain, militants associatifs et chercheurs ont été invités place Beauvau pour plancher sur ce phénomène "nouveau, complexe, protéiforme", selon les termes du chef du gouvernement.
Le Premier ministre a notamment rappelé les représentants de la deuxième religion de France à leur "responsabilité majeure": "lutter contre la radicalisation, c'est promouvoir un islam fort, républicain et professionnel, organisé". "Il y a plus que jamais urgence", a-t-il martelé.
Il a souligné l'ampleur du travail à mener, avec "plus de 2.000 Français ou résidents en France très directement concernés par les filières syriennes ou irakiennes", sans compter "des milliers de jeunes individus dans nos quartiers qui sont de près ou de loin séduits par cette radicalisation". Près de 1.600 jeunes tentés par le départ pour le djihad irako-syrien sont suivis par les cellules préfectorales, liées par conventions à diverses associations.
"Ce qui s'est passé à Molenbeek (commune de Bruxelles, NDLR), les images que vous avez vues, on peut le ressentir parfois dans certains de vos quartiers", a-t-il lancé à ses interlocuteurs musulmans, trois jours après l'arrestation du djihadiste Salah Abdeslam, qualifiée par Manuel Valls de "belle victoire dans la lutte contre le terrorisme", sur fond toutefois de "menace durable".
Le chef du gouvernement a semblé vouloir nuancer une petite phrase qu'il avait prononcée après les attentats du 13 novembre et qui avait fait couler beaucoup d'encre ("expliquer, c'est déjà vouloir un peu excuser"), en soulignant l'utilité des sciences sociales dans la prévention de la radicalisation.
"Il faut bien sûr chercher à comprendre, ce qui ne veut pas dire chercher je ne sais quelle explication", a-t-il martelé, faisant valoir que "les terroristes sont responsables de leurs actes, ils n'ont pas de circonstances atténuantes, ce sont des individus libres, qui avaient le choix".
Sur le lien possible entre islam et radicalité, il a notamment cité la thèse du sociologue Olivier Roy évoquant une "islamisation de la radicalité" et à rebours celle, "formidablement utile", a-t-il tranché, du politologue Gilles Kepel, qui voit dans le nouveau djihadisme "un épisode supplémentaire du déploiement de l'islam politique".
L’État, "qui ne s'occupera jamais de théologie", compte aussi sur les responsables du culte musulman pour contrer la propagande fondamentaliste qui inonde les réseaux sociaux.
En réponse, le président du CFCM, Anouar Kbibech, a redit son souhait de mettre en place un "conseil religieux" qui aura pour mission d'élaborer un contre-discours en réponse à la propagande fondamentaliste voire djihadiste sur les réseaux sociaux. Cette commission devra refléter "la diversité de l'islam de France", a-t-il fait valoir, une pierre dans le jardin des théologiens gravitant dans l'orbite des Frères musulmans qui ont mis en place leur propre "conseil théologique" dès le printemps 2015.
Le responsable de l'instance représentative du culte musulman (2.500 lieux) a également promis, sans entrer dans le détail, des "programmes éducatifs pluriannuels" dans les mosquées pour "immuniser" les jeunes et convertis face au "dévoiement du texte sacré".
Cette réunion devait être clôturée en fin d'après-midi par plusieurs annonces du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve.
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