Donald Trump annule le sommet très attendu avec Kim Jong Un
Donald Trump a annulé jeudi le sommet historique prévu dans moins de trois semaines à Singapour avec le leader nord-coréen Kim Jong Un, dénonçant "l'hostilité" du régime de Pyongyang, tout en ne fermant pas la porte à une rencontre ultérieure.
C'est par un bref courrier d'une vingtaine de lignes adressé au dirigeant trentenaire que le 45e président des Etats-Unis a fait part de sa décision de renoncer au face-à-face du 12 juin, dont il avait lui-même accepté le principe à la stupéfaction générale.
"J'estime qu'il n'est pas opportun, à ce stade, de maintenir cette rencontre", indique le locataire de la Maison Blanche dans ce texte rendu public par l'exécutif américain le jour même où Pyongyang annonçait le démantèlement de son site d'essais nucléaires de Punggye-ri, dans le nord-est du pays.
Washington exige une dénucléarisation "complète, vérifiable et irréversible" de la Corée du Nord.
Mettant en garde la Corée du Nord contre tout acte "irresponsable", M. Trump a assuré que l'armée américaine était "prête" à toute éventualité et que les Etats-Unis restaient déterminés à poursuivre la campagne de "pression maximale".
Le président sud-coréen Moon Jae-in, qui était à la Maison Blanche mardi, a immédiatement exprimé ses "profonds regrets" et convoqué jeudi une réunion d'urgence, avec notamment son chef des services secrets et son ministre de la Réunification.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres s'est dit "profondément préoccupé" par cette annulation.
Après plusieurs semaines de déclarations très optimistes sur ce tête-à-tête - le premier entre un président américain en exercice et un représentant de la dynastie des Kim, qui règne sur la Corée du Nord depuis plus d'un demi-siècle - M. Trump avait changé de ton ces derniers jours.
"J'étais impatient de vous retrouver là-bas", explique-t-il dans sa missive qui oscille entre un certain formalisme et un ton par moments beaucoup plus direct.
"Malheureusement, au regard de l'énorme colère et de l'hostilité affichée dans votre dernière déclaration en date, j'estime qu'il n'est pas opportun, à ce stade, de maintenir cette rencontre prévue depuis longtemps", ajoute-t-il.
- "Si vous changez d'avis" -
"Si vous changez d'avis en ce qui concerne ce très important sommet, s'il vous plaît n'hésitez pas à m'appeler ou à m'écrire", ajoute le président américain qui avait beaucoup investi d'un point de vue politique dans ce sommet, allant jusqu'à évoquer à plusieurs reprises l'hypothèse d'un prix Nobel de la paix, mise en avant par certains élus républicains.
Après des mois de rapprochement et de détente diplomatique, la Corée du Nord a opéré la semaine dernière un spectaculaire retour à sa rhétorique traditionnelle, annulant une rencontre intercoréenne et évoquant la possibilité de remettre en cause le sommet.
La dernière banderille a été plantée jeudi par la vice-ministre nord-coréenne des Affaires étrangères, Cheo Son Hui, qui a fustigé les propos tenus par le vice-président Mike Pence, lequel avait affirmé que "ce serait une grave erreur pour Kim Jong Un de penser qu'il pourrait se jouer de Donald Trump".
Le vice-président américain avait également déclaré que la Corée du Nord pourrait finir comme la Libye de Mouammar Kadhafi, tué lors du soulèvement de son pays après avoir renoncé à l'arme atomique, "si Kim Jong Un ne passe pas un accord" avec Washington sur la dénucléarisation.
"Je ne peux pas cacher ma surprise devant de telles remarques idiotes et stupides venant de la bouche du vice-président américain", a indiqué Mme Cheo, dans une déclaration publiée par l'agence officielle KCNA.
"Nous ne quémanderons pas auprès des Etats-Unis pour un dialogue, ni ne nous donnerons la peine de les persuader s'ils ne veulent pas s'asseoir avec nous", a-t-elle ajouté, en précisant qu'elle recommanderait à M. Kim d'annuler le sommet si les Etats-Unis persistent "dans des actes illégaux et insultants".
- "Un merveilleux dialogue" -
En première ligne sur ce dossier, le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, qui a rencontré Kim Jong Un à deux reprises à Pyongyang, a expliqué que les conditions n'étaient pas réunies pour un "résultat positif". "Nous n'avons reçu aucune réponse à nos demandes" de la part des autorités nord-coréennes, a-t-il regretté devant une commission parlementaire.
Dans son courrier, le président américain évoque l'arsenal nucléaire américain en guise de mise en garde: "Vous évoquez votre arsenal nucléaire, mais le nôtre est si massif et puissant que je prie Dieu que nous n'ayons jamais à en faire usage", écrit-il.
Mais il laisse aussi la porte ouverte à une rencontre à une date ultérieure.
"J'avais l'impression qu'un merveilleux dialogue était en train de s'instaurer entre vous et moi", écrit-il, à Kim Jong Un, assurant qu'il serait "très heureux" de le rencontrer "un jour".
Il prend d'ailleurs soin de remercier aussi ce dernier pour la libération des trois "otages" américains. "C'était un très beau geste qui a été très apprécié", souligne-t-il.
Donald Trump termine sur une note sombre, jugeant que "le monde (...) a perdu une immense occasion d'instaurer une paix durable". "Cette occasion ratée est un triste épisode dans l'Histoire", conclut-il.
Pour Nancy Pelosi, cheffe des démocrates à la Chambre des représentants, le leader nord-coréen est "le grand gagnant" de cet épisode qui démontre que le président américain ne s'était pas préparé. Sur la forme, elle déplore qu'il ait décidé de "tourner les talons dans un courrier au ton familier, quasi copain-copain".
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