Lagarde persévère
CHRONIQUE - Christine Lagarde n’était pas à la fête jeudi 11 mars lors de la conférence de presse qu’elle a tenue à l'issue de la réunion à Francfort du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne. Le maximum qu’elle pouvait annoncer, dans la délicate situation actuelle où le fantôme de l’inflation rôde autour des marchés, c’est que sa politique monétaire demeurait « inchangée », tout en réaffirmant qu’elle serait prête à amplifier encore son soutien à l'économie. Tous ceux qui attendaient un mouvement dans un sens ou dans un autre en sont pour leurs frais.
Il y a eu pourtant une reprise de la hausse des prix, notamment sur le pétrole et autres matières premières, à laquelle s’est ajoutée une tension sur les taux d’intérêt très dangereuse pour les pays européens les plus endettés (Italie, Espagne, Grèce, France).
Les économistes de la Banque centrale européenne reconnaissent eux-mêmes une accélération de la hausse des prix, puisqu’ils tablent maintenant sur une inflation à 1,5% en 2021 pour l’ensemble de la zone euro, alors qu’en décembre ils en étaient encore à prévoir une hausse de 1% , mais ce dérapage n’est pas suffisant pour obliger Mme Lagarde à changer de politique. Elle a d’ailleurs évoqué « une faiblesse prolongée de l'inflation » - un euphémisme.
Rappelons que l’objectif des banques centrales est aujourd'hui une inflation à 2% - objectif qui, on ne le rappellera jamais assez, n’a aucun fondement ni théorique ni pratique. Du moins ce standard permet à Christine Lagarde de justifier son immobilisme. On comprend qu’elle ne mettra un frein aux rotatives de la « planche à billets » de la Banque centrale européenne que si la hausse des prix dépasse le rythme de 2%.
"Les données économiques qui nous parviennent, les enquêtes et les indicateurs à haute fréquence, a encore déclaré Mme Lagarde, suggèrent que la résurgence de la pandémie et l'intensification des mesures de confinement qu'elle entraîne ont probablement conduit à un déclin de l'activité au quatrième trimestre et devraient aussi peser sur l'activité au premier trimestre de cette année."
Le programme de rachats de dette du programme d’urgence contre la pandémie (PEPP), doit toujours porter sur 1850 milliards d’euros à engager d’ici mars 2022. Mais, apprend-on, le Conseil des gouverneurs prévoit que le rythme des achats au titre du PEPP sera «nettement augmenté au cours du trimestre à venir par rapport aux premiers mois de l’année ». Une réponse à la résurgence de la pandémie, qui risque d’arriver trop tard ?
Sur le taux de change de l’euro, la présidente de la Banque centrale européenne a été encore plus prudente, déclarant qu’elle continuera à le surveiller, se gardant bien de livrer la moindre appréciation à ce sujet. Les milliards de dollars que Joe Biden déverse dans les poches des entrepreneurs et des consommateurs américains ne sont certes pas faits pour renforcer le dollar. Du coup, l’euro reste à un niveau élevé, ce qui est un handicap pour les exportateurs européens.
Enfin, Christine Lagarde en a appelé aux Etats membres de la zone euro afin « qu’ils accélèrent le processus de ratification de leurs plans de relance et de soutien et qu'ils déploient les fonds pour une dépense publique productive et des politiques structurelles de relance de la production. » Sous-entendu : nous, Banque centrale européenne, nous faisons notre travail ; à vous, gouvernements, de faire le vôtre. Ce n’est pas la première fois que Madame Lagarde délivre ce sermon. Il est vrai qu’en terme de laxisme monétaire, il lui est difficile de faire plus.
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