Loi Travail : de nombreuses violences en marge des manifestations
Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont battu le pavé ce jeudi 15 pour l'abrogation de la loi Travail, sans doute pour la dernière fois, avec à nouveau de violentes échauffourées à Paris, des blessés et gardes à vue dans toute la France. Au moins un manifestant, ainsi que 15 policiers et gendarmes ont été blessés. Soixante-deux personnes ont été interpellées et 32 placées en garde à vue en France, où 169 manifestations ont eu lieu, a indiqué dans la soirée le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. "Si la plupart d'entre elles se sont déroulées dans le calme, des incidents ont néanmoins été constatés dans la capitale, ainsi qu’à Nantes, Rennes, Rouen, Grenoble, Toulouse et Montpellier", a-t-il souligné, jugeant ces violences "inacceptables". "Les violences, il faut que cela cesse, sans confondre les manifestants qui sont contre la loi Travail avec les casseurs", a de son côté déclaré Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, principal soutien de la loi Travail.
La manifestation parisienne s'est déroulée sous la surveillance de 1.200 policiers entre Bastille et République. Un CRS, pris dans les flammes de manière spectaculaire après le jet de cocktails Molotov place de la République, a été brûlé à la jambe. Comme lors de précédentes journées, des échauffourées ont éclaté à plusieurs reprises entre CRS et jeunes criant "Tout le monde déteste la police!", avec tirs de gaz lacrymogène et dégradations de mobilier urbain.
Selon les autorités, 78.000 personnes ont défilé, 65.000 en régions et 13.000 à Paris. La CGT de son côté en a comptabilisé 170.000, dont 40.000 dans la capitale, des chiffres supérieurs aux deux manifestations précédentes des 5 juillet et 28 juin. Tours, Marseille, Nantes, Rennes, Le Havre, Lyon, Clermont-Ferrand, Grenoble, Lille, Châteauroux...: les opposants ont une nouvelle fois réclamé l'abrogation de la loi Travail, promulguée en août après des mois d'affrontements politiques et de conflit social, sans faire plier l'exécutif. Une journée aux allures de baroud d'honneur, alors que la plupart des décrets de la loi, dont les plus décriés (temps de travail, référendum en entreprise, accords offensifs), doivent être publiés en octobre. "Douze journées de manif, c'est beaucoup pour les salariés, c'est compliqué", a fait valoir le leader de FO, Jean-Claude Mailly. "Ce n'est pas ce que j'appelle un +baroud d'honneur+", a en revanche estimé Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT. "Loi ou pas, ils nous trouveront toujours face à eux", a expliqué François Roche, délégué CGT chez Airbus Helicopters, dans le défilé à Marseille.
En marchant à Nantes, Rebecca, 32 ans, a aussi voulu "montrer qu'on est toujours là et qu'on n'est pas d'accord". Au Havre, baptisée au printemps "capitale" de la mobilisation, ils étaient 3.000 selon la police, 12.000 selon l'intersyndicale. Une nouvelle fois, le défilé nantais, qui a réuni environ 4.000 personnes, a été émaillé d'affrontements avec la police, comme celui de Rennes. A Belfort, le défilé s'est transformé en manifestation des "Alsthommes", qui ont voulu "marquer le coup" pour réclamer le maintien dans leur ville de l'activité ferroviaire d'Alstom. Des appels à la grève avaient été lancés dans la fonction publique, à La Poste, chez Air France et France Télévisions. A la SNCF et à la RATP, le trafic est resté normal. Mais dans le ciel, entre 20 et 25% des vols ont été annulés à Orly. La loi instaure notamment la primauté des accords d'entreprise sur les accords de branche en matière de temps de travail, ce que ses opposants considèrent comme facteur de moins-disant social.
"On n'est pas perdants, on a obtenu des modifications. Le grand perdant de cette loi, c'est François Hollande", a déclaré M. Mailly. Journées d'action, pétition record, sondages défavorables, recours à l'article 49-3 pour faire passer le texte sans vote au Parlement... : cette réforme a connu un parcours particulièrement agité. Fort du soutien de la CFDT, l'exécutif est resté inflexible, défendant un texte de "progrès social" présenté comme une solution pour lutter contre le chômage. Désormais les contestataires espèrent maintenir la pression et empêcher l'application de la loi, en entreprise et devant la justice.
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