Procès en France d'un des principaux cyber-pédocriminels au monde
L'employé communal sans histoire figurait parmi les cyber-pédocriminels les plus recherchés au monde: un père de famille a commencé mercredi à être jugé en France pour la diffusion de milliers d'images sexuelles d'enfants et le viol de ses deux fillettes.
Âgé de 43 ans, l'accusé avait été arrêté en 2020 après avoir été traqué sur le darknet par la police française avec la collaboration d'Europol et d'Interpol et grâce à des recoupements avec le FBI américain et les enquêteurs australiens.
Selon l'acte d'accusation français, il figurait parmi les "10 cibles prioritaires" de la cyber-pédocriminalité au niveau mondial.
Jugé pour avoir détenu et diffusé sur Internet "des dizaines de milliers" de photos et de vidéos pornographiques "mettant en scène de très jeunes mineurs", dont ses deux propres fillettes, l'accusé doit aussi répondre de viols et d'agressions sexuelles répétées sur ces dernières, depuis leur naissance en 2012 et 2015.
Son procès s'est ouvert mecredi pour trois jours et à huis clos à Bordeaux (sud-ouest) devant la cour d'assises de Gironde. Il encourt 20 ans de réclusion criminelle.
"Il est là pour répondre aux questions qui lui seront posées, faire en sorte que tout le monde puisse avoir des réponses", a déclaré à l'AFP son avocat, Me Simon Takoudju.
À la demande de l'avocat de l'ancienne compagne de l'accusé, mère de leurs trois enfants, la cour d'assises a ordonné le huis clos.
Peu auparavant, à l'ouverture des débats, l'accusé avait énoncé ses nom et profession dans le box, crâne ras, barbe de trois jours et sweat-shirt gris.
Quatre associations de protection de l'enfance se sont constituées parties civiles.
Me Emmanuel Daoud, avocat de l'ONG Ecpat France qui lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants, voit dans ce procès "un message fort": "Cela démontre que même lorsqu'on est l'un des 10 pédocriminels les plus recherchés de la planète, à un moment ou un autre, c'est la fin de l'impunité".
"On s'est félicité qu'on ait pu identifier ses deux fillettes, à qui l'on pense énormément aujourd'hui, mais on peut déplorer que l'enquête n'ait pas permis d'identifier toutes les victimes", a déclaré de son côté déclaré Me Florence Pelé, avocate de la Voix de l'Enfant.
- "Imprudence technique" -
Durant plusieurs années, les policiers de l'office français pour la répression des violences aux personnes avaient traqué cet internaute "très actif", connu notamment sous le pseudonyme de "Kali".
En 2017, il avait notamment partagé des photos et une vidéo "de sa propre production" selon l'acte d'accusation, montrant deux fillettes d'"environ 5 ans" pour l'une, "1 ou 2 ans" pour l'autre, qui se sont avérées être les siennes.
Le recours à un pseudonyme et d'autres précautions ont permis à l'accusé d'échapper à la justice, jusqu'à ce qu'il commette une "imprudence technique" en 2020.
Pour transférer une vidéo montrant le viol d'une petite fille de 3 ans, il avait utilisé le serveur d'un opérateur français avec une adresse IP localisée au domicile d'une famille d'un village de Gironde.
Les enquêteurs disposent alors d'une piste. Des recoupements avec le FBI et la police australienne permettent de faire le lien entre des mots de passe régulièrement utilisés par "Kali" sur le darknet, et les premières syllabes du prénom et du nom du suspect.
L'homme est interpellé, des images pédopornographiques et une culotte d'enfant sont retrouvées dans son véhicule, des déguisements et des sex-toys au domicile familial, où la police saisit des disques durs, dont l'un servant à héberger des sites du darknet via le réseau Tor.
D'autres contiennent des dizaines de milliers d'images d'enfants victimes de pédocriminels dans le monde entier.
Pendant l'enquête, l'accusé, décrit comme "immature" sur le plan affectif, avait reconnu avoir agressé sexuellement ses filles mais en "minimisant l'impact" de ses agissements, selon l'accusation.
Il avait expliqué s'être rendu sur le darknet pour dialoguer avec des pédocriminels et "comprendre comment on pouvait en arriver là" avant de "tomber dans l'engrenage".
La propre enfance de cet employé communal a été marquée par "une grande souffrance", selon un expert psychiatrique. Lui-même affirme avoir été violé, petit, par un proche de sa famille, et avoir vu son père agresser sexuellement sa soeur.
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